Bien que méconnue, « The Big Year » (aussi appelée "Drôles d'oiseaux chez nous), comédie de David Frankel, réalisateur des pourtant célèbres Le Diable s’habille en Prada et Marley et moi, ne manque pas de charmes, parmi lesquels la célébration douce et joyeuse d’un des plus grands plaisirs qui soit, observer les animaux.


L’idée est étrange, ou plutôt elle est inhabituelle voire unique dans le paysage de la comédie américaine. Elle se développe grâce au « Big Year », une année d’observation d’oiseaux à travers le continent (nord)-américain. Une grille de score permet de départager les observateurs les plus passionnés, dont le record est détenu par Kenny Bostick. Ce dernier souhaite améliorer sa prestation, mais deux nouveaux venus souhaitent eux aussi dépasser le maître. Brad Harris, trentenaire un peu perdu, qui veut profiter de cette occasion pour montrer à tous ce qu’il vaut, y compris à lui-même. Et Stu Preissler, habile chef d’entreprise, qui veut célébrer sa nouvelle retraite avec cet événement, mais qui n’est pas encore certain de savoir s’il veut décrocher de cette vie entrepreneuriale.


Brad et Stu vont se rapprocher, s’estimer et s’épauler face à l’expérience de Kenny. Si ce dernier est l’homme à abattre, et s’il est capable de quelques petites manigances, il n’est pas pour autant le méchant compétiteur. S’il est prêt à gagner, il usera de moyens malgré tout honnêtes, sans chercher à humilier ses concurrents.


Il faut reconnaître à Owen Wilson qu’il endosse là un beau rôle, qu’il interprète avec une certaine nuance, peut-être à le rapprocher de son interprétation dans La Famille Tenenbaum. Il se montre à la fois confiant et fragile, emporté par son objectif, et s’il souffle quelques jours avec des proches ou des inconnus il peut se révéler alors charmant et sympathique. Mais il n’oubliera pas son but, et devra parfois sacrifier ce qui lui semble moins important.


Brad Harris est joué par Jack Black et s’il est souvent demandé à l’acteur de faire le trublion, ce n’est pas le cas ici. Brad se questionne, il s’interroge, et même s’il est un vrai passionné, qu’il peut reconnaître n’importe quel chant d’oiseau, il n’a pas aussi les mêmes facilités financières que d’autres de ses rivaux. Son rêve peut s’écrouler faute d’argent, parcourir les meilleurs endroits propices à l’observation d’oiseaux représente un coût. Jack Black le joue comme une force sensible, déterminé mais malgré tout avec une pointe d’incertitude.


Steve Martin en jeune retraité tiraillé entre son passé d’entrepreneur, cette lubie ornithologue et son nouveau rôle de papy n’est pas aussi à l’aise que ses deux camarades. S’il est plus convaincant quand il doit se montrer attentionné auprès de ses proches, il l’est un peu moins dans cette course à l’oiseau, où il est peut-être trop difficile pour l’acteur de se montrer presque banal, sans user de l’humour doucement farfelu qui est le sien.


Ces trois personnages centraux n’existent pas seulement pour leur quête, mais aussi vis à vis de leurs proches, tous bien entourés mais parfois inquiets de les voir se lancer dans une aventure qui s’étirera sur une année, parfois soulagés de les retrouver plus forts. Le film peine tout de même à faire exister leurs vies en dehors de leurs escapades jumelles en main, mais les personnages sont développés, ils ont un fonds, avec des envies et des doutes, des évolutions aussi. L’arrière-banc de comédiens est d’ailleurs bien rempli, avec Rosamund Pike, JoBeth Williams, Anjelica Huston, Jim Parsons, Kevin Pollack et Joel McHall (célèbre acteur de Community, je vous recommande la série).


D’ailleurs, si ces trois ornithologues amateurs mais déterminés sont bien entourés avec leurs proches, ils doivent aussi tirer leurs épingles du jeu avec les autres ornithologues. Que ce soit à cause d’une tempête qui déplace des nuées ou d’une île réputée pour sa richesse aviaire, Kenny, Brad et Stu ne sont que rarement seuls dans le plan, toujours accompagnés d’une horde d’ornithologues, certains auront aussi droit une mise en avant. Si le spectateur peut sourire de cette passion dévorante, le film ne la dénigre jamais, préférant s’amuser avec ses personnages que contre eux. L’humour n’est jamais humiliant, tout comme il n’est pas question de crasses sordides. La compétition existe, mais elle se fait dans une saine rivalité, honnête dans les grandes envolées. Le « Big Year » repose d’ailleurs sur la confiance, il n’y a pas de preuves demandées, même si les oiseaux les plus rares seront recherchés pour être immortalisé sur une photographie.


Tous ces ornithologues feront bien du voyage pour compléter leur petit carnet. Le film a été tourné principalement au Canada, dans de beaux paysages verdoyants ou plus rudes, aux horizons lointains et qui créent de soudaines envies de vacances. Les oiseaux sont ici à l’honneur, le temps d’une scène, d’une photographie ou d’un regard, avec parfois même quelques informations bienvenues données par les protagonistes. Mais Drôles d’oiseaux n’oublie jamais ses têtes d’affiches, les replaçant toujours rapidement dans le cadre, quand on aurait aimé apprécier un peu plus longtemps la beauté de la nature.


Devant ce film, on ne peut que respirer, profiter de ses quelques bouffées d’air frais avec son ode à profiter de la nature mais aussi de la vie, grâce à ses personnages tendres et bienveillants. Malgré la présence de trois comiques souvent cantonnés à des comédies un peu balourdes, si Drôles d’oiseaux existe c’est grâce à eux. Le film reste une grosse production américaine, avec d’habituelles faiblesses sur la catégorisation, mais il offre un rire doux et apaisé très appréciable.

SimplySmackkk
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le 3 mai 2022

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