J'abandonne. J'abandonne l'envie de comprendre ce qui attire désormais la plupart des gens à penser que tel ou tel film est bon ou pas. Je dois être un alien, un ovni, je ne sais pas. Quoi qu'il en soit, visiblement, y'a un problème.
Qu'est-ce qui ne tourne pas rond, chez vous ? Est-ce que vous avez décidé de déclarer la guerre à J. J. Abrams juste parce qu'après Shyamalan c'est LE mec sur lequel on aime taper pour le plaisir ? Quand j'ai vu les notes de Cloverfield Paradox, j'ai cru halluciner. Ce film est BON, et demeure à mes yeux le meilleur de la saga Cloverfield ! C'est le mélange des genres qui vous déplaît ? Sérieusement ? Pourtant, le lien avec le premier film est plus que cohérent et intelligent. J'avais déjà signalé dans ma critique qu'Abrams prenait du plaisir à conjuguer les éléments de science-fiction qui lui plaisaient, qui l'attiraient et qu'il savait rendre hommage à ses œuvres et références préférées. Ici, il s'agit bien du même système, quoiqu'encore renforcé. Pourquoi ? Eh bien peut-être parce que le film est plus mûr que son ancêtre ?
Pour commencer, situer l'action dans l'espace et non plus aux Etats-Unis est un bon moyen de revenir à la thématique universelle qui occupe de nombreux esprits créatifs du XXIe siècle : la fin du monde. C'est la planète entière qu'il s'agit de sauver, et non plus seulement les enfants de l'Oncle Sam. Rien que cet élément témoigne d'une volonté d'ouverture un peu plus intelligente que les Michael Bay et autres connards dont les films me laissent plutôt circonspecte. Et quoi de mieux pour rendre hommage à plusieurs pays du monde qu'un casting cinq étoiles monstrueux ?!
Pour rappel : Daniel Brühl, Gugu Mbatha-Raw, Zhang Ziyi, Donal Logue, David Oyelowo... Sérieux ? Ça vous laisse de marbre ? Parce que non contents de rendre le film puissant et porté par des épaules plutôt solides, on ne peut pas dire que ces acteurs se reposent sur leurs lauriers (mention spéciale à Brühl qui reste à fond du début à la fin, et à Mbatha-Raw qui, déjà consacrée par Black Mirror, incarne à la perfection les rôles tragiques et torturés). La qualité du film réside également à mon sens sur un équilibre maîtrisé entre un postulat classique (une équipe est envoyée dans l'espace pour sauver le monde), et un renouveau du genre dans la vision souhaitée par le réalisateur. Et si c'est ça qui vous a dérangé, alors j'peux plus rien pour vous. Car quoi de plus jouissif que de voir puisé un peu partout les éléments de la SF les plus dérangeants, monstrueux ou géniaux pour les mêler en une seule et même œuvre ambitieuse et divertissante à la fois ? La quête des références devient un jeu auquel je me suis livrée avec passion :
• L'équipe peu à peu disloquée façon Sunshine.
• L'atmosphère et les enjeux oppressants d'Interstellar.
• Le huis-clos à la Alien.
• La paranoïa à la The Thing.
• La machine nommée Shepard (Coucou Lost).
• Un certain "Shaw" mentionné + un œil qui part en couille + les vers dégueulasses (Coucou Prometheus).
• Le retour des créatures du premier volet (Coucou Cthulhu).
• La séquence de bricolage spatial (Coucou Gravity).
Vous appelez ça du repompage ? Moi j'appelle ça du génie. Parce que ce putain de film est indéniablement plus rythmé que Sunshine. Plus humble qu'Interstellar. Plus dynamique qu'Alien. Plus intelligent que Gravity. Et cent fois meilleur que Prometheus, cela va sans dire.
L'arc narratif qui se poursuit également sur Terre (renversant pour une fois le traditionnel : le mec se barre sauver le monde, la nana reste à attendre comme elle le peut) n'est pour une fois pas négligé, et crée une véritable inquiétude pour l'avenir de notre planète. La première scène de "bombardement russe" (If you know what I mean) dans une ambiance de Guerre Froide est aussi réaliste qu'anxiogène, et accroît un peu plus la tension nerveuse au lieu de constituer des bulles de relâchement entre deux scènes de vaisseau.
Rien que pour ça : The Cloverfield Paradox reste à mon sens infiniment supérieur à ce que la populace a pu en penser. Je n'ose imaginer ce qu'une sortie cinéma aurait donné, mais je reste convaincue que l'expérience aurait pu être fantastique.
Bref : faudra vraiment que vous m'expliquiez ce qui vous fait rêver, car cette moyenne générale m'est infiniment plus difficile à intégrer que la théorie du chaos dans l'espace.
PS : Coucou Ian Malcolm.