Avec le décès d'Heath Ledger peu avant la sortie du film, The Dark Knight a vite fasciné autour de lui, que ce soit dû à l'annonce de cette tragique disparition ou par l'engouement croissant que suscitait ce deuxième volet. Dire que cet épisode était attendu relevait de l'euphémisme. Car après un Begins manquant cruellement d'originalité et de prises de risques, Nolan était attendu au tournant. La nouvelle du Joker en grand méchant principal, 21 ans après celui de Nicholson, rassura les déçus du premier opus au méchant mièvre et caricatural.

L'intrigue se passant directement après la fin du précédent volet, l'environnement change pourtant du tout au tout. Gotham étant dorénavant plus la copie conforme du centre d'affaire New-Yorkais peuplé de ses immenses tours, que du taudis sale et inquiétant que l'on avait quitté. Si Nolan opère ce choix, c'est principalement pour mieux installer le cadre du traumatisme post 11 septembre qui traversera tout le film, traumatisme d'ailleurs entièrement personnifié par le personnage du Joker, que l'on découvre rapidement au prix d'une scène de braquage impressionnante en hommage au film « Heat ».

Si le personnage apparaît très vite c'est qu'il est l'essence même de ce second Batman, si bien que celui ci se verrait presque passé au second plan, tant le Joker accapare l'attention, emplit d'énergie les scènes ou il apparaît et fascine celles ou il s'absente. La performance de Ledger est ici monumental, faisant presque passer le Joker de Nicholson pour un clown de bas étage, tant il imprègne le film de sa malsainitude et de sa folie, le personnage n'a aucune limite, l'acteur aura trouvé là le rôle de sa vie. Le film se concentre pourtant sur trois hommes, la pierre angulaire de l'intrigue : Batman, Le Joker et le nouveau procureur de Gotham «Harvey Dent» en qui la ville voit le dernier espoir, et en qui Batman voit son remplaçant idéal. Mais Bruce Wayne peut-il réellement se passer du justicier masqué? Il est évidemment toujours question de dualité avec Nolan, Batman personnifiant à lui seul le problème de la coexistence des identités, et plus encore dans ce Batman là. Les trois personnages principaux ayant chacun leurs propres dualités, qu'elles soit cachées, apparentes ou en devenirs elles permettent au film d'atteindre une profondeur identitaire et psychologique jamais vu auparavant.

Le titre « Chevalier Noir » fait opposition à celui du « chevalier blanc » incarné par Aaron Eckhart et porteur des espoirs de toute une ville, il sera donc le centre idéologique des deux camps, du combat entre Batman et le joker, de la justice contre le chaos, le dernier rempart contre l'anarchie et la tyrannie grandissante. Batman doit aussi faire face à son plus grand dilemme, tiraillé par les sentiments qu'il porte à son amour de toujours et par la culpabilité naissante de voir les gens mourir autour de lui, Batman se pose des questions : peut-il être et paraître à la fois, le symbole de Batman revêt-il plus d'importance que ses actes, le sacrifice du symbole ferait-il de lui un héros, autant de questions qui rendent le personnage si subtil et si complexe à la fois.

En utilisant le Joker pour installer la peur et l'anarchie sur Gotham, Nolan réveille le traumatisme Américain, à travers les différentes scènes de paniques générales dû aux nombreuses annonces d'attentats du clown terroriste, le réalisateur frappe ou ça fait mal et ravive les plaies latentes du 11 septembre, comme pour mieux moderniser son propos et installer l'univers du super héros dans le contexte réaliste et insécuritaire d'aujourd'hui.

Si Begins pêchait un peu dans ses scènes de combats, celles de The Dark Knight sont plus accomplies, les scènes d'actions plus nombreuses sont aussi plus impressionnantes qu'avant et mieux orchestrées. Mais là ou Nolan fait la différence, c'est dans l'intensité vertigineuse qu'il imprègne au film, la force dramatique de chaque situation regorgeant d'originalité et de malice sans faiblir à aucun moment. Le casting étant sensiblement le même que pour Begins, il est aisé de constater la somme de talents affichés à l'écran, à lequel vienne se rejoindre Maggie Gyllenhaal ( qui remplace talentueusement Katie Holmes ) ainsi qu'Aaron Eckhart, dont la prestation est absolument fascinante, sans parler du regretté Heath Ledger dont les louanges ont déjà été adressées.

Fort d'un casting aux performances surréaliste et aux personnages charismatiques, The Dark Knight est entièrement marqué de son empreinte par Heath Ledger dont la présence morbide transcende chacune de ses scènes. Nolan se différencie encore totalement du reste de la saga, plus sombre, plus actuel et aussi plus psychologique que les précédents, ce Batman là est incontestablement le meilleur à ce jour.
Nicolas_Chausso
10
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le 4 juin 2013

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