Au moins, j'aurai fait tout Stanford en peu de temps. L'idée d'un remake pouvait être effectivement une bonne piste au vu des faiblesses du film allemand, beaucoup trop expéditif quand il brodait en dépassant le cadre de l'expérience, la démonstration surpassant dès lors logique et réalisme. Ici, le traitement est un peu différent, mais aussi plus tenu, un peu plus lisse, et ce n'est finalement pas un mal sous certains aspects. Le problème, c'est surtout Hollywood qui fait de la psychologie, de la finesse à coups de hache... A l'image toujours de cette mauvaise séquence des images subliminales de violence qui ne sert à rien, sinon paraphraser l'inévitable...

Le début d'expérience est identique, sans intrigues secondaires, sinon la petite aventure du héros pacifiste avec une hippie mal coiffée qui sent bon la bière. Ce qui fait plaisir, c'est aussi de voir Whitaker dans le rôle d'un catho humaniste qui se retrouve dans l'uniforme d'un gardien, et sent peu à peu des pulsions sadiques l'animer (et là, hollywood se montre un peu trash, mais trop justement, le personnage basculant trop vite dans une mécanique de sadisme déguisé (le coup de l'érection après la reprise en main musclée de la situation)). On soupire également quand le queutard de service dans le rôle du gardien se voit demander par un scientifique si il est gay alors qu'il parle depuis le début du film de bouffer de la touffe. Et là jaillit une homosexualité inavouée qui le pousse à abuser de son autorité sur un jeune cobaye à moustache... Rah, c'est téléphoné ! Pas logique, téléphoné, souligné, encadré ! La seule bonne chose qu'on peut en retirer par généralisation, ce sont les initiatives individuelles qui minent le travail du groupe sensé instaurer l'ordre. Mais abordons la dynamique de l'ensemble du film. Les rapports dans les deux groupes sont moins effusifs, plus contrôlés. C'est presque théâtral là où L'expérience était plus réalité filmée (l'abandon du style caméra à l'épaule y est aussi pour quelque chose). Mais ce contrôle est finalement salutaire à la mécanique psychologique, puisqu'il introduit une notion de dosage dans la violence. Aussi, les gardiens savent en connaissance de cause qu'ils vont employer des méthodes humiliantes et psychologiquement violentes, mais ils le font avec cette notion d'escalade contrôlée de la violence, insistant moins sur la notion de rôle à jouer que sur le fait de contrôler la situation de la meilleure façon possible. D'ailleurs, ce sont eux qui incitent au calme et recommandent à chacun de se conformer aux règles de vie pendant la durée de l'expérience afin que chacun puisse toucher pépère son salaire. Et c'est là que la responsabilité des prisonniers augmente d'un cran. Le film montre au moins deux meneurs refusant par simple esprit de défiance de se plier à l'autorité des gardiens. La logique de cassage se pose d'elle même. D'ailleurs, une pression supplémentaire est faite sur les gardiens, ces derniers devant réagir aux situations problématiques dans la demie-heure qui suit les évènements. En rajoutant, comme menace ultime, le non paiement de l'ensemble d'un groupe (prisonnier ou gardien) si ce dernier outrepasse ses commandements. Plus que jamais, les gardiens sont sous pression et dans une position défavorable car ayant une plus grande responsabilité. Donc a lieu la séquence copié collé de l'humiliation à la pisse. Dans ce cadre, elle est logique. Mais entre les deux, le détail du prisonnier malade se révèle être un grave problème de cohérence dans le script. Le diabétique est tout simplement inapte à suivre l'expérience sans traitement, or les gardiens n'ont aucun moyen de contacter les scientifiques ni d'avoir du secours médical (chose impensable en prison). La marche vers la violence est plus progressive, mais le contexte merde gravement, rendant déjà l'expérience complètement immorale et illogique (puisque la violence n'émerge pas simplement des comportements du groupe, elle est de toute façon générée par le système de contrainte, qui perd son caractère aléatoire pour tendre à l'incitation directe à la violence. Maltraitance évidente et obstination peu logique de la part des gardiens. Et là, tout s'est effondré.

Néanmoins, le film continue avec son petit dosage de la violence. Les scientifiques brillent par leur absence, on se demande bien ce qu'ils foutent alors qu'on assiste de façon évidente à des traitements de plus en plus violents et que l'état du diabétique s'aggrave de jours en jours. En d'autres termes, ils sont illogiques et le contexte même de pression disparaît, puisqu'ils sont mystifiés au point d'être physiquement absents des lieux. Mais les gardiens s'obstinent. Whitaker avec sa gaule sadique qui finit par le rendre nanar (toileeeette !), glouglou dans les toilettes alors que le héros a déjà enduré la pisse, et qui lui fait avoir une crise de confiance en soit, ça chie dans la colle. Alors qu'un mécanisme intéressant se met en place avec la dégradation d'un gardien au rang de prisonnier, le montage part en couille et sombre dans le ridicule avec une grosse voix off trafiquée. Les gardiens tapent dans le tas sur une musique électro dark, Whitaker parle d'une ampoule comme il parlait de Dieu... Les 5 dernières minutes et la nouvelle émeute redeviennent enfin logiques, mais toutes les dernières étapes pour y arriver relèvent du foutage de gueule. Et d'ailleurs, l'espèce de final où tout le monde retrouve une sorte de dignité grave, genre nous sommes tous des victimes en fait, elle ne fonctionne pas. Après une rixe comme ce qui venait de se passer, on ne retrouve pas en si peu de temps une dignité. Pas ainsi en tout cas. Démonstration manifeste que l'homme devient violent quand on l'y pousse, The experiment partait mieux pour finir plus bas que son prédécesseur, la faute à un gros problème de gestion psychologique malgré les ambitions. Fort malheureusement pour lui, quand un film rate ce qui fait l'essentiel de son message et de son intérêt, on s'accordera pour conclure que c'est pas vraiment la joie. Il paraît qu'Elija Woods a plaqué le tournage après quelques jours... De la clairvoyance, il en aura eu encore plus en participant au Maniac d'Alexandre Aja...
Voracinéphile
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le 22 janv. 2015

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