Il est l’or, l’or de se faire arrêter

Billy Chung n’est pas le réalisateur le plus connu de l’ex-colonie britannique. Bien qu’il tourne depuis le début des années 90 et qu’il est encore aujourd’hui en activité, aucun film de sa filmographie n’est réellement marquant. Il y a bien The Assassin (1993) avec Max Mok, wu xia pian bien violent et énervé, qui tire son épingle du jeu, ou encore le polar Paramount Hotel (2000), très efficace malgré un petit budget. Mais dans l’ensemble, ses films ne brillent pas par leur grande qualité et/ou originalité. C’est un tâcheron honnête diront certains, et on ne peut pas leur donner tort. Avec The King of Robbery, on est dans la moyenne de ce qu’il a l’habitude de faire, c’est-à-dire un film assez lambda, qui brille sur certains aspects, mais qui se rate avec d’autres.


The King of Robbery s’inspire d’un fait réel puisqu’il est basé sur l’histoire du gangster notoire Yip Kai Foon. Pour la petite histoire, le criminel a fait la une des journaux dans les années 80 après avoir repoussé la Police sur Nathan Road en leur tirant dessus avec un fusil d’assaut AK-47 pendant que lui et ses complices dévalisaient une série de bijouteries. Les spectateurs qui assistaient à ces fusillades à l’époque ont cru, à tort, qu’elles étaient mises en scène pour un film. Au sommet de sa « notoriété », la tête de Yip était mise à prix à hauteur de 1 millions de HK$. Il est arrêté en 1996 après avoir pris une balle dans la colonne vertébrale à la suite d’une fusillade à Kennedytown en mai 1996. Handicapé à vie, en fauteuil roulant, il purgeait depuis une peine dans la prison de Stanley à Hong Kong après avoir été reconnu coupable en 1996 de meurtre, de possession d’armes et de munitions. Il a été condamné à 41 ans d’emprisonnement. Sa peine a été réduite à 36 ans après un appel. Il est mort en prison d’un cancer en 2017 à l’âge de 55 ans. De nombreux documentaires en Asie lui ont été consacrés, tels que Hong Kong’s King of Thieves, ainsi que des films. Citons par exemple Trivisa (2017) qui a raflé cinq prix aux 36th Hong Kong Film Awards, The Most Dangerous Man (2010), et donc The King of Robbery (1996) dont nous parlons ici. Mais le film de Billy Chung semble, lui, être complètement opportuniste. On a cette impression parfois de tournage à la va vite, pour pouvoir coïncider avec la date de jugement du vrai criminel. La sortie du film a même été retardée par une décision de justice afin de ne pas porter préjudice au procès de Yip Kai-Foon. Mais revenons-en au film même si, il faut l’avouer, il est au final bien moins intéressant que l’histoire dont il s’inspire.


Le casting y est des plus intéressants et est sans doute le gros point fort du film. Les amateurs reconnaitront aisément tout un tas de gueules du cinéma de Hong Kong, à commencer par l’indécrottable Simon Yam (SPL, Breaking News) qui une fois de plus dégueule de charisme et impressionne en grand méchant. A ses côtés, Roy Cheung (Prison on Fire, City on Fire) qui continue encore et toujours son exploration des rôles de méchants. Mais citons également la jolie Anita Lee (Tiger Cage 2, Satin Steel), Chin Ka-Lok (Bury Me high, Operation Scorpio), également chorégraphe du film, Philip Keung (Unbeatable, Beast Stalkers) ou encore Jason Pai Piao (Shaolin Intruders, The Lady assassin). Mais très vite, on constate qu’il n’y a pas de subtilité ou de développement des personnages Ils tuent quiconque se met en travers de leur chemin, et c’est à peu près tout. L’histoire d’amour au milieu de tout ça n’apporte strictement rien et c’est tellement la pénurie à ce niveau-là que certaines scènes arrivent sans aucune explication. D’autant plus qu’il est difficile de s’identifier à ces anti-héros, de vrais malfrats sans foi ni loi, et du coup difficile de s’attacher à eux au point qu’on se fiche de leur sort. Même chose au niveau de l’intrigue, ultra basique (voler, tuer, s’échapper, et on recommence). La mise en scène de Billy Chung est assez sommaire, parfois presque amateur (c’est quoi cette caméra qui n’arrive pas à rester stable ???). Néanmoins, il insuffle suffisamment de punch dans ses scènes d’action, plutôt nombreuses. Tournées dans les rues de Hong Kong et leur ambiance bien particulières, elles sont souvent intenses, bien violentes, brut de décoffrage, toujours dans un style très réaliste. Chung ne cherche jamais à styliser les gunfights en eux-mêmes, même si on trouvera bizarre de nous les remontrer une deuxième fois parfois, au ralenti, avec un étrange filtre de couleur du plus mauvais effet. Dommage qu’entre ces scènes d’action, il ne se passe pas grand-chose, avec des moments où les bandits sont en planque à échanger des lignes de dialogues insignifiants.


The King of Robbery est une série B de Hong Kong en demi-teinte. On salue l’effort de nous présenter cette histoire vraie de la manière la plus brute possible, mais la mise en scène ratée et le manque de développement des personnages ne vont pas en faveur du film.


Critique originale avec images et anecdotes : ICI

cherycok
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le 17 juin 2021

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