De Refn je n'ai vu que Drive. Le reste de sa filmographie a beau avoir une place de choix dans ma liste d'envie, je n'ai toujours pas pris le temps de les regarder. Pourtant, en voyant le trailer de ce film, j'avoue avoir été hypé l'ambiance qui semblait s'y dégager. Mes attentes étaient donc assez élevées.


Jesse (Elle Fanning), nouvelle venue dans l'industrie de la mode, est une beauté virginale qui attise tous les regards. Ce n'est pas son naturel qui les fait saliver, mais sa "virginité". Une prodigieuse toile vierge qui ne demande qu'à être salie. De la première à la dernière scène, on la toise, on la scrute, on l'évalue. Chaque centimètre carré de son épiderme sont autant de territoire à conquérir. Son image, son sang, sa chair et son hymen, autant de trophées sacrés à brandir. Elle traverse les étapes avec une naïveté confondante qui n'a d'égal que son narcissisme grandissant. Elle s'attire les foudres de ses concurrentes bioniques qui comptent plus d'opérations chirurgicales que de neurones restants. Sa glorification n'est en fait que factice. Tombera-telle dans cet abîme du néant ? Oui. Littéralement.


Avec The Neon Deamon, NWR rend l'impossible possible. Il met en scène le culte du vide. Il célèbre cette idée abstraite en la rendant vulgairement palpable: les lumières stroboscopiques impriment nos rétines, les beats électroniques imprègnent nos tympans, l'horreur s'immisce dans notre esprit. Parfois jusqu'à saturation, comme pour ma voisine de droite qui a commencé peu à peu à exprimer son dégoût avant de partir de la salle d'un pas décidé, à vingt minutes de la fin.


L'apparition du titre avec un geyser de paillettes dorées en toile de fond donnait la couleur. Ce film est une projection artistique qui déroule ses codes symboliques sans concession. Il s'empare de la cruauté d'une réalité pour l'esthétiser à l'extrême, quitte à la magnifier. J'ai vraiment été impressionné par le sens des détails balisant le parcours de la jeune femme. À l'image d'un plan durant lequel Jesse s'apprête à quitter la voiture de son ami pour rentrer chez elle. Le véhicule est irradié d'un bleu apaisant tandis que la réflexion de la flèche rouge du panneau du motel sur la carrosserie annonce un futur danger dans cette direction. La force des images double celle de la parole et forme une expérience artistique qu'on se plait à contempler. Il en va de même pour les apparitions horrifiques qui s'intègrent parfaitement au film. La violence et la cruauté de certaines scènes se veulent insoutenables, mais je n'ai ressenti aucune frayeur : le film hypnotise plus qu'il ne terrifie.


Finalement, The Neon Deamon m'a fait l'effet d'un Spring Breakers : une parfaite démonstration qui transcende son sujet. Un étalage brut, esthétique et clivant.

GigaHeartz
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le 9 juin 2016

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