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La bande-annonce nous avait vendu une sorte de "Black Swan"-like, une production typique Netflix s'inspirant d'un film meilleur pour un résultat mineur. En réalité, il n'en est rien si l'on excepte l'aspect thriller psycho-horrifique sur fond de rivalité artistique, "The Perfection" va partir vers des horizons bien différents du film de Darren Aronofsky. À vrai dire, il est même très dur d'en parler sans en gâcher la teneur...


D'abord, sachez que "The Perfection" est une vraie proposition d'horreur adulte de la part de Netflix, le film de Richard Shepard va aller très loin dans le sordide aussi bien suggéré qu'explicite (de mémoire et de ce point de vue, on n'avait pas vu une production repoussant autant les limites depuis un moment sur la plateforme). Ensuite, il est très dur de proclamer haut et fort que "The Perfection" atteint justement la perfection tant sa construction à tiroirs est aussi maligne que maladroite...


Prenez la première partie du film (on ne trahit rien, c'est le pitch), elle raconte le retour à la vie normale de Charlotte, une violoncelliste de génie qui, adolescente, a dû renoncer à son art pour s'occuper de sa mère malade. Cette dernière étant depuis décédée, Charlotte, aujourd'hui adulte, part en Chine retrouver son professeur et celle qui lui a "volé" sa destinée de célébrité mondiale dans son domaine. Pendant près de 45 minutes, "The Perfection" va s'intéresser à la rencontre des deux jeunes femmes et ses conséquences pour s'arrêter sur un twist qu'à peu près tout le monde devrait voir venir, d'autant plus que le réalisateur vend une des clés du mystère en amont et se croit très malin avec un retour en arrière explicatif complétement artificiel. Si on s'arrêtait là, le film ne vaudrait pas tripette mais cette première partie s'inscrit dans un ensemble en réalité beaucoup plus vaste qui va entraîner "The Perfection" vers des ténèbres impressionnants.


Une fois une seconde révélation intervenue, le potentiel glauque du film éclate au grand jour ! L'atmosphère devient aussi pesante qu'une brouette d'enclumes sur les épaules du spectateur. Richard Shepard, que l'on sentait toujours prompt à prendre des risques à la réalisation à travers quelques chouettes plans malgré un aspect téléfilm, se libère complètement derrière la caméra, conscient de l'opportunité que lui offre ce climat étouffant désormais bien installé. "The Perfection" propose enfin les belles choses (enfin "belles", cinématographiquement parlant, hein !) que son titre suggérait et va s'aventurer dans une violence psychologique et même physique d'une radicalité rare dans la masse de ce genre de propositions. On est comme sonné et imprégné par l'ambiance de ce qui est maintenant un huis-clos dont on ne distingue plus aucune issue pour reprendre son souffle.
Viendra un twist de conclusion, sans doute celui de trop, histoire de délier un peu trop facilement les noeuds d'une situation inextricable. Cette solution sera toujours dans la même donne extrême que les événements précédents mais elle aura un arrière-goût de porte de sortie un peu plus logique (et donc attendue) que ce que vers quoi "The Perfection" commençait à se diriger...


En définitive, "The Perfection" est un bon film mais un bon film tout de même très bancal. La proposition audacieuse de cinéma est bel et bien là ne serait-ce que pour la maturité et l'originalité de thriller horrifique qu'elle représente dans le paysage actuel aseptisé (surtout venant de Netflix), toutefois, elle est aussi très maladroite dans sa construction (même si sa première partie fait partie d'un tout plus important, il est impossible de ne pas se dire qu'on nous a baladé sur une vraie/fausse piste pendant la moitié du film pour quelque chose d'une importance bien moindre que l'ensemble). En fait, si on devait le caricaturer, "The Perfection" est vraiment parfait lors de son ultime scène, comme si toutes les bonnes choses que l'on y avait vu jusque-là se conjuguaient dans une osmose de cruauté à se damner de beauté morbide. Certes, le film offre un voyage inégal mais tout ce que vers à quoi il se destine en fait une proposition fascinante et à découvrir. Rien que pour ça, il mérite d'être saluer...

RedArrow
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le 24 mai 2019

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RedArrow

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