Pour un américain, Terrence Malick est probablement au cinéma ce que Hemingway était à sa littérature. Un grand auteur, dont on sait dores et déjà qu'il sera étudié dans plusieurs décennies. Son oeuvre arbore en effet, tous les atours de l'oeuvre mémorable, récit ample, ambitieux et perfectionniste. Avec The Tree of Life, Malick asseoit un peu plus son statut de cinéaste majeur. Il ajoute au film une dimension temporelle et hyper-elliptique qui le rapproche un peu plus, par une combinaison croissante du métaphysique et du grand spectacle, de l'un des auteurs les plus influents du XXe siècle, Stanley Kubrick. On ne peut manquer de rapprocher ce film du 2001 : L'Odyssée de l'espace de ce dernier. Sont ainsi évoqués dans un récit à niveaux multiples la vie à l'échelle de l'individu, en tant que membre d'une famille, et à celle de son espèce. Dans un film très personnel dans lequel sont évoquées les relations d'un aîné et de sa relation à ses frères, sa mère et au père castrateur, obsédé par la réussite de ses enfants, Malick déroule une oeuvre qui semble reprendre à zéro les bases de la grammaire cinématographique cherchant, à la manière d'un Bresson, à trouver ce qui fait l'essence propre du récit cinématique. En ce sens, l'oeuvre à venir de Malick est prometteuse.

Pour autant, Tree of life, s'il témoigne d'une maîtrise des structures narratives étonnante, d'une audace formelle et d'une photographie à couper le souffle ne parvient pas à capter tout à fait ce qui doit, selon moi, être au coeur de toute oeuvre cinématographique, la simplicité. Le risque, lorsque l'on s'attaque à un sujet aussi complexe et ambitieux que celui de Tree of Life, c'est de passer tant de temps à penser le film que l'on finit par perdre de vue la base du récit, faisant de la surcouche formelle un obstacle à une perception transparente du film lui-même. Ici, ce qui pose problème et qui peut également finalement être reproché à de nombreuses oeuvres de Malick, c'est une forme de maniérisme trop prononcé. Chaque plan, chaque voix off, chaque effet narratif par excès de forme ne devient plus que le spectacle désincarné de lui-même. Malick est parvenu à limiter la casse en offrant un récit finalement assez fluide, qui, quoique contemplatif, parvient à maintenir le spectateur pendant une grande partie de l'histoire dans le "vif de l'action" mais s'essoufle peu de temps avant la fin.

Il n 'en reste pas moins que c'est une prouesse d'être parvenu à garder ce niveau de fluidité en produisant une oeuvre si complexe d'un point de vue structurel. L'oeuvre d'un très grand auteur de cinéma, définitivement.
DreamNeuville
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le 25 mai 2011

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