Tout pourrait commencer comme un conte de Noël. Une famille nombreuse vit dans une chaumière en bordure de la forêt. Ou plutôt la suite d'un conte après le traditionnel : "ils vécurent heureux et eurent beaucoup d'enfants".
Mais un drame a eu lieu : le dernier-né a disparu. Victime d'un loup, d'un rôdeur,ou d'une sorcière comme sur l'affiche. Nul ne le sait. A l'occasion d'une chasse Robert Eggers nous montre une forêt protectrice et rassurante. Le père, voulant tuer un pacifique rongeur, rompt l'équilibre et est aussitôt puni.
Mais voilà que Caleb, le fils aîné disparaît lui aussi. Au passage il est bon de rappeler qu'il s'agit bien d'un film d'horreur et le premier jump scare intervient à la 42e minute. Le second interviendra au bout d'1 heure 13. La menace se fait de plus en plus précise; si elle ne vient pas de la forêt elle ne peut donc venir que du sein même de la famille.
L’héroïne, une adolescente aux yeux clairs filmée dans un halo de lumière comme dans une toile de Vermeer porte sur son entourage un regard lucide et sans concessions. Elle apparaît terriblement seule au sein de cette famille obscurantiste. Le père de famille, se prenant pour Dieu ou le Christ écrase les enfants. La mère, de plus en plus hystérique, ne fait qu' infliger reproches et punitions à sa fille. Les jumeaux, plus jeunes que l'héroïne sont deux garnements insupportables, toujours prompts à accuser leur sœur.
Et les parents, persuadés que tous les malheurs viennent de leur fille, vont se lancer dans une chasse à la sorcière digne d'un Mc Carthy féroce traquant sans relâche une piste communiste. Sans jamais faire leur auto-critique. Car si sorcière il y a c'est en vertu du principe qu'un extrême (la dévotion superstitieuse) engendre un extrême opposé (voir le Sabbat Noir de la fin).
La plupart des films d'horreur, œuvres de geeks coréens, et se déroulant à une vitesse vertigineuse ne laissent aucune trace. Mais là où The Witch sort du lot, c'est en s'écartant des codes du genre pour faire ressentir le mal-être d'une jeune fille doublé d'une critique subtile de la superstition.