Une histoire au coin du feu
Une scène charnière, celle de l'incendie du derrick, me semble cristalliser plusieurs éléments essentiels du film:
C'est une scène à la puissance graphique évidente. Les flammes, leur beauté sauvage, comme symbole de ces grands espaces rongés par le soleil, aussi hostiles que cinégéniques.
C'est une scène de réalisation virtuose de la part de Paul Thomas Anderson, avec cette alternance soignée de plans larges et travellings au coeur des hommes.
C'est une scène vérité sur le personnage de Daniel Plainview, car selon l'adage c'est dans les moments critiques que la nature profonde des hommes se révèle. Ici plus de discours rassurant de bon père de famille. Ses yeux ne mentent pas, brillant bien plus à l'idée des dollars que pleurant l'accident de son fils.
C'est une scène symbolique, où on peut y voir le feu et la destruction faire germer la richesse, tel ce capitalisme version pionnier qui ne s'embarrassait pas de manières.
Plainview contemple alors le point de départ de son empire, et on peut s'amuser à déceler dans ces flammes le signe d'une future folie destructrice à la Néron, tandis que sa paranoïa le poussera à éviter à n'importe quel prix son propre "Tu quoque fili".