Après la claque The Card counter, j’ai pensé que c’était le bon moment pour découvrir ce Schroeder qui se déroule aussi dans l’univers des casinos. Cette fois moins autour du poker que de la roulette. C’est un beau film sur un homme dévoré par le jeu. Voire dévoré par la sensation de perdre. « Tout est plus beau quand j’ai perdu ». Le parfait pigeon des casinos, en somme. Puisque s’il gagne, Elric (Jacques Dutronc) relance systématiquement ses gains, de façon compulsive : Il faut le voir courir de table en table, en sueur, et y balancer ses jetons : terrifiant. Et il perd souvent tout, inéluctablement. Une première rencontre le fait se raccrocher à la chance, une superstition autour du chiffre 7 arboré par une autre joueuse, Suzie (Bulle Ogier) qu’il croise autour d’une table à Madère. Le tandem qu’ils vont former ensemble est aussi beau que troublant, comme si deux aimants s’étaient trouvés. C’est pourtant une autre rencontre qui va un temps les séparer. Elric va croiser la route de Jorg, tricheur professionnel, qui va l’embarquer dans ses combines. Jorg ne sera que moteur de ce glissement puisque c’est avec Suzie, qu’Elric retrouve plus tard, qu’il va se lancer dans un autre système de triche. Il y a le fantasme d’un château au bord du lac Leman mais ce n’est jamais une fin en soi. Le happy end masque un ton nettement plus grave tant il est évident qu’Elric, dépendant à la perte, reviendra au jeu très vite, aux tables d’Annecy. La mise en scène de Schroeder colle au personnage, tant elle aussi répétitive et monocorde (d’un classique froid, élégant mais troublant) que lumineuse et insondable – notamment dans son utilisation des ellipses, sa captation très étrange des lieux et sa photo instable résultante légitime de l’instabilité de son personnage. Pour ne pas dire de son cinéaste, qui après ses films emblématiques de la culture hippie (More & La vallée), un docu sur Idi Amin-Dada, un film autour du sadomasochisme et un autre autour du jeu, s’envolera bientôt pour Hollywood.

JanosValuska
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le 18 févr. 2022

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