Où ailleurs qu'à Hong Kong pouvait-on inventer un concept aussi saugrenu que celui des Tricksters ? Une petite explication s'impose pour les moins familiers du genre. Souvenez vous, quand vous aviez 8 ans... Dans votre classe, il y avait forcément un clown de service (si ça se trouve, c'était même vous !), adepte des farces et autres mauvais tours. Le trickster, c'est lui ! Mais avec 20 ans de plus et qui aurait fait de sa vocation comique un authentique métier. Une sorte de rois des farces et attrapes dont le job est de piéger les gens et les humilier. Du grand n'importe quoi comme HK s'en est fait une spécialité ! Un des premiers films à exploiter ce concept, on le doit à John Woo ( !!! ) avec son Money Crazy. Le genre n'en est alors qu'a ses balbutiements et ce sera Wong Jing qui lui donnera ses lettres de noblesses (pour ainsi dire...) en 1992 avec Tricky Brains. Par la suite, Wong alimentera le genre par quelques productions comme ce Tricky Business.

Malin, Wong Jing confie la réalisation à un habitué de la comédie, le réalisateur Lee Lik Chi, responsable de la plupart des meilleurs films de Stephen Chow. Un bon calcul, Lee n'ayant pas son pareil pour mettre en valeur les gags grâce à sa réalisation énergique. Ici encore, il prouve sa valeur en mettant en scène des situations bien délirantes (combat contre un homard, gadgets plus déjantés les uns que les autres...) et en faisant progresser le film à un rythme soutenu. Le concept des tricksters a beau être complètement surréaliste, il est extrêmement efficace dans le cadre de comédies allumées.

Hélas, Lee Lik Chi ne reste pas dans son domaine fétiche et après un tiers de métrage fait bifurquer Tricky Business dans la romance. A vrai dire, le responsable est probablement Wong Jing, coutumier du fait comme l'atteste A True Mob Story pour ne citer que celui là, cherchant à capitaliser sur le succès du couple Anita Yuen/Lau Ching Wan de C'est La Vie, Mon Cheri. Et on sent que le metteur en scène est beaucoup moins à l'aise dans cet exercice. Le concept fait penser à The Killer mais là où la naïveté de Woo sublimait l'amour de ses personnages, leur donnant une dimension quasi mythique, Lee Lik Chi ne fait qu'accumuler les clichés les plus sirupeux (les amoureux qui font du vélo main dans la main dans un pré...). La relation respire l'artificialité et ralentit le film au lieu de l'enrichir. Heureusement que Lee finit par remettre la comédie au premier plan à la fin de chacune de ces trop longues séquences.

Par contre, on peut être surpris par le choix de Lau Ching Wan pour interpréter le trickster. Lau est un excellent acteur mais la comédie n'est pas sa spécialité première, surtout à ce moment de sa carrière. Durant l'essentiel du film, il reste figé dans une attitude sérieuse, sans le petit grain de folie que le personnage requiert. A ce niveau, Stephen Chow était bien plus convaincant. Peut être conscient du trop grand sérieux de Ching Wan, Lee Lik Chi (ou plus probablement Wong Jing) lui adjoint les services des Soft and Hard Kids, Eric Kot et Jan Lam. L'idée a de quoi faire peur, toutes les apparitions du duo dans des films s'étant révélées désastreuses. Pourtant, ici, leur présence est judicieuse. Ils apportent cette énergie débile nécessaire, le tout en ne surjouant pas trop. Face à eux, on retrouve Law Kar Ying, comme toujours excellent. Son interprétation d'un trickster du coté obscur, tout en théâtralité et emphase, est un pur délice. Sa prestation est un véritable plus pour le film.

Tricky Business est une comédie inégale, plombée par la tentative ratée de créer une histoire d'amour touchante, mais qui offre suffisament de bons moments pour mériter une vision. L'honneur de Lee Lik Chi est sauf.
Palplathune
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le 25 févr. 2011

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