Truth, assorti de « Le Prix de la vérité » en français, est de ces découvertes retardée encore et encore, la faute à un vilain a priori nous susurrant à l’oreille qu’il n’y a pas de quoi s’en émouvoir. Malgré tout, son visionnage réalise deux prouesses en une : confirmer l’impression première, mais tout en portant à notre connaissance un sujet valant le détour, surtout au regard de ses ramifications morales, historiques… et déontologiques.
Plus couramment associé à l’exercice de scénarisation (Basic, Zodiac), James Vanderbilt s’essayait ici à la double-casquette pour la première fois : en découle un exercice des plus sommaires, affublé des attributs si caractéristiques du genre du biopic. Car si Truth n’en est pas vraiment un en tant que tel, son académisme formel et narratif suit essentiellement les pas de Mary Mapes, à la fois personnage et auteur du livre dont il s’inspire : Truth and Duty (...).
Anciennement productrice et partie-prenante de l’affaire des documents Killian, elle en relatait les fondements et conséquences, base de travail idéale pour Vanderbilt. Toutefois, à la lecture des événements, nous nous interrogeons sur la pensée de l’auteure et la transposition du réalisateur : en ce sens, il semble évident que les retombées de cet épisode méconnu (tout est relatif) mais passionnant ne sont en rien une injustice (manichéenne). Mais, dans le même temps, le parti-pris du film semble sans équivoque : si erreur(s) il y a eu, la quête de vérité du personnage et de ses comparses tend à les exempter de tout reproche.
Or, si l’intrigue souligne judicieusement les travers d’une industrie médiatique douée d’idéaux sur le déclin, et d’un pouvoir politique trop influant, Truth ne met pas autant l’emphase sur les jugements hâtifs de ses protagonistes : chose que pointeront fort logiquement du doigt les membres d’un jury certes partial, mais dans son bon droit. De prime abord, le long-métrage semble donc coincé entre deux postulats aux antipodes mais non moins valables, le regard de Mary Mapes se chargeant de faire pencher légèrement la balance dans un sens.
Ainsi, cette cadre de CBS a-t-elle tiré des leçons d’un tel échec ? La question se pose, à plus forte raison que le récit ne lésine pas sur l’impact ressenti : lynchage médiatique, soutien infaillible du couple, l’ombre paternelle pernicieuse… à l’instar du compartiment plus fictif de l’œuvre, à l’image du trio Mike/Roger/Lucy, Truth nous ramène toujours à l’intégrité de sa figure de proue, légitime car en croisade au nom de la sacro-sainte-Vérité. Son collègue et ami, Dan Rather, parachève enfin cette impression : à la fois « mentor » et père de substitution, celui-ci apaise et a toujours le mot juste, faisant montre d’une probité totale… quitte à, probablement, embellir quelque peu la réalité.
C’est plutôt regrettable car ses deux têtes d’affiches, Cate Blanchett et Robert Redford, sont proprement excellents, de quoi porter Truth plus loin que ce ne nous pensions être possible. Néanmoins, force est de constater qu’un documentaire aurait très certainement traité plus justement d’un tel sujet.