TU NE TUERAS POINT ou Hacksaw ridge en vo.
ADAPTÉ D’UNE HISTOIRE VRAIE mention en gros plan à l'ouverture du film.


Je vais commencer par vous poser une petite question. Si je vous dis guerre et cinéma, quels sont les films qui vous viennent à l’esprit ?
Dans ce domaine, on choisit soit de faire de la propagande soit de dénoncer. Mel Gibson réalise avec TU NE TUERAS POINT son 5e film, après L’homme sans visage, Braveheart, La Passion du Christ et Apocalypto. Sur un scénario que lui a présenté le producteur Bill Mechanic (le remake us de Dark water, Le nouveau monde de Terrence Malick ou Coraline d’Henry Selick), qui a insisté car cela correspondait totalement aux inspirations de Mad Mel : la notion de sacrifice, le dépassement de soi par la religion et la critique de la guerre. Et l’excès. Mais avant de parler de ceux du réalisateur, synopsis please !
Desmond Doss est un jeune homme américain qui décide pendant la 2nde Guerre Mondiale de s’enrôler dans l’armée afin d’aller défendre sa nation, main sur la poitrine. Son autre main est sur la Bible puisqu’il a juré de ne jamais toucher une arme, de ne jamais prendre une vie, comme le 5e Commandement l’ordonne : « Tu ne tueras point ». Subtil. Il va devenir le premier objecteur de conscience à recevoir la médaille d’honneur puisqu’il va sauver 75 hommes lors d’une boucherie – pardon, d’une bataille – particulièrement meurtrière, sur l’île d’Okinawa dans le Pacifique.
Au casting, dans le rôle du gentil bagarreur format brindille Andrew Garfield qui troque la tenue de Spiderguy pour le pantalon en velours côtelé (et vu récemment dans le film 99 Homes) ; Teresa Palmer pour la team australienne, est la jolie fiancée du héros qui pour une fois n’est ni mort-vivant comme dans Warm bodies, ni témoin d’un fantôme possessif qui se fait les ongles sur le parquet dans Lights out ; Sam Worthington team Austrie aussi, est pour une fois du côté des gradés et plus un cul-de-jatte sur une planète bleue en 3 ou 4D (je sais plus où on en est avec Cameron et ses ambitions) ; Vince Vaughn nous fait de gros clins d’œil appuyés à Full Metal Jacket, mais c’est moins drôle sans Owen Wilson ; et Hugo Weaving est le papa de Desmond, ancien miltaire de la 1ère GM, rentré intact physiquement mais traumatisé psychologiquement, il ne court plus ni après Mulder, ni après Neo, ni même après Captain America. Faudrait pas vieillir.
Mel Gibson est réputé pour ses excès dont le contrebalancement a été très bien mis en images par sa grande amie Jodie Foster dans Le complexe du castor. Desmond Doss, adventiste convaincu, est resté toute sa vie assez modeste et n’a accepté que dans les dernières années seulement qu’un documentaire et un film soient réalisés pour raconter ce qu’il avait accompli. Adventiste pour Église adventiste du septième jour, mouvement protestant dont vous n’avez besoin ici que de savoir que leur sabbat est le samedi (coucou Les chariots de feu), qu’iels sont attachéEs aux principes de la liberté de conscience et qu’iels sont parfois considéréEs comme secte. Y en a même à dans ma ville !


Le film en lui-même est assez classique. En trois parties, on nous fait le coup de l’explication analytique psychologique clichay du trauma enfantin, avec un vétéran ravagé qui pense à ses copains qui ne sont pas revenus. C’était pas ma guerre. On a une amourette bien niaise, avec un Andrew Garfield en ravi de la crèche à la limite du harcèlement de rue, qui trouve que voler un baiser à une femme, c’est romantique. Remarque, si elle aime ça et ne se refuse pas, je suis à la limite de dire culture du viol. Bravo et merci.
Ensuite c’est l’entraînement au fort, entre hommes virils, gaulés comme des culturistes, à poil, tout muscle dehors et… tous blancs ! Bravo et merci. Si vous avez vu Full metal jacket ou la comédie musicale Hair, que vous aimez les ambiances de vestiaires et les films de gladiateurs, vous rirez avec moi. Rire blanc, bien sûr. Là c’est un harcèlement sur la virilité, le courage et la lâcheté, le premier étant tellement valorisé par des scènes de tabassage nocturne pour donner envie au gringalet de rentrer dans sa ferme… Et comme c’est made in America, on passe longuement par des entretiens juridiques car les tribunaux sont plus présents dans leur fiction que dans la nôtre.
La 3e partie nous montrera sur une île japonaise cruciale stratégiquement que la guerre, c’est moche. Bouh, caca ! Je ne me suis toujours pas remise de la violence graphique incroyable de Spielberg dans Il faut sauver le soldat Ryan et son débarquement rouge et noir made in Normandie, façon tripes à la mode de Caen... Là, oubliez ! D’un côté on a les méchants jaunes, ces sournois japonais qui ne respectent pas même le drapeau blanc, n’ont aucun honneur, que du vice et de l’autre nos courageux et rédemptés américains, déchiquetés par les balles, les tripes à l’air, les membres ne tenant que par des lambeaux de chair, des explosions moches comme si on y était. Longuement. Très longuement. 25 minutes de bidoches, d’explosions et de napalm au ralenti. Parce que quelqu’un qui brûle, c’est toujours mieux au ralenti. J’apprécie que les effets soient très old school, avec des comédiens handicapés, des vétérans à qui il manque maintenant des membres et qui ont accepté de rejouer finalement leurs traumatismes… Mais déesse ! C’est moi la bizarre qui aime regarder des films d’horreur avec des monstres qui n’existent pas ou les exaltés qui voient de la beauté dans une génération qui ne se contentent pas de deux trous rouges au côté droit ?
Cette 3e partie écœurante se poursuit de nuit après le repli de ce qui reste des troupes américaines débarquantes. Le jeune héros, qui refuse de prendre une arme mais pas de se prendre une balle, rampe et court de blessé en blessé abandonnés pour leur administrer sommairement des premiers secours à base de doses de morphine cuicui les petits zoiseaux. Il les redescend tous seul un par un de la falaise en bas de laquelle ils sont récupérés par d’autres oiseaux qui ne pensent pas une seconde à remonter l’aider. Nan. Mode berseker [ON] !!
Je vous passe la suite. Il ne s’agit pas d’une reconstitution historique mais d’un truc romancé. L’homme est devenu un héros comme les américains aiment s’en fabriquer. Comme le William Wallace que s’était confectionné Mel Gibson auparavant. Je peux comprendre. Est-ce qu’on n’a pas besoin de héros en ce moment ? Ok mais pas sans occulter leurs zones d’ombre comme ici l’antimitarisme pour Desmond Doss qui ne remet pas en question le fondement même de la guerre qui reste sacrée, ne faisant pas de lui un pacifiste.
Je crois que j’aurais préféré voir un Clint Eastwood, républicain pur sucre, s’emparer du sujet pour y ajouter une dose de cynisme. Ça aurait été moins niais. Mais pas moins raciste.

Gribbsie
5
Écrit par

Cet utilisateur l'a également ajouté à ses listes Videovore, 2016, quand les alèses se taisent et 2016 synchronisation

Créée

le 11 nov. 2016

Critique lue 666 fois

Gribbsie

Écrit par

Critique lue 666 fois

D'autres avis sur Tu ne tueras point

Tu ne tueras point
guyness
2

La dernière tentation du fist

Rater un film est à la portée d'à peu près tous les réalisateurs. Presque tous, même les plus grands, ont un jour loupé la marche de leur ambition. Non, le vrai exploit, c'est d'arriver à rater...

le 22 févr. 2017

140 j'aime

77

Tu ne tueras point
Vnr-Herzog
4

Le triomphe de la volonté

Il a beaucoup été reproché aux distributeurs français le titre francophone Tu ne tueras point en lieu et place de Hacksaw Ridge, qui désigne l'endroit où se tient la bataille au cœur du nouveau film...

le 1 mars 2017

134 j'aime

14

Tu ne tueras point
Laaris
4

Tu ne riras point

Un vegan bigot oppressif décide d'aller faire la seconde guerre mondiale à mains nues. Au début il passe pour un con, se fait bolosser par Vince Vaughn, et finit en cour martiale, mais s'en sort...

le 9 nov. 2016

88 j'aime

20

Du même critique

La Belle Saison
Gribbsie
4

Qui trop embrasse, mal étreint.

Je préviens d’emblée, je vais me faire des amiEs. J’ai déjà taillé un costard à l’épouvantable Le Vide d’Adèle (hein ? quoi ? On me dit dans l’oreillette que C’est La Vie d’Adèle le véritable titre...

le 28 août 2015

15 j'aime

3

30 jours de nuit
Gribbsie
6

Problème de temporalité

Ma principale remarque au sujet de ce film sera au sujet de son plus gros défaut : la temporalité. Quel dommage qu'un film sensé se dérouler sur 30 "jours" semble avoir lieu sur seulement quelques...

le 17 mai 2013

6 j'aime

World War Z
Gribbsie
1

world war ZZZZZZZZZZZZZZZ

World War Z, ou 40 ans des pires films de zombies Z compilés. Tous les clichés sont enfilés les uns après les autres. Si ça n'avait pas eu la prétention d'adapter le roman original et éponyme de Max...

le 28 juin 2013

5 j'aime

1