L'art du pilleur de troncs
Une des comédies les plus enlevées de Mocky, grinçante et irrévérencieuse. Cinéaste inégal qui s'est commis souvent dans des caricatures outrancières, il a toujours pratiqué un humour très...
Par
le 27 juil. 2017
29 j'aime
Un film indispensable dans toute DVDthèque qui se respecte. Un film de Jean-Pierre Mocky de la grande époque (1963) où il avait des choses à dire et à montrer que je prends plaisir à regarder de temps à autre : je n'y ris pas ou pratiquement pas, je souris beaucoup mais surtout je savoure les dialogues …
En visionnant le générique, je m'aperçois que c'est tiré d'un roman que je ne connais pas, "Deo Gratias" de Michel Servin. Tout un (beau) programme. Prolonger ma réflexion (philosophique) à travers ce livre, voilà qui ne me déplairait pas.
C'est que le sujet m'interpelle : une famille aristocratique et catholique ruinée remonte la pente grâce aux prélèvements effectués dans les troncs d'église.
"Nous sommes une goutte de paresse dans un océan de labeur" dira Georges en écho à son père, dogmatique : "le travail ! Ah ça non !"
Et le bon fils de famille, descendant de haute lignée, de conclure dans sa prière fervente : "Aujourd'hui, les gens travaillent trop. Ils travaillent tellement qu'ils n'ont plus le temps de songer à Vous"
Le sujet est bien lancé, sarcastique avec une pointe de satire. Que j'aime bien. Parce que, mine de rien, je viens de comprendre quelque chose. Figurez-vous que, moi, quand je prie (de façon très pieuse et très fervente, bien entendu sinon ça ne vaut pas), j'ai toujours l'impression qu'On ne m'entend pas, qu'On ne m'écoute pas. Je croyais naïvement que c'est parce que je ne donnais pas assez à la quête (ou dans les troncs). Mais non, c'est juste que je ne fais pas partie de la bonne classe ! Et comme, en plus, j'ai passé ma vie à travailler …
Et même, je comprends maintenant comment la classe aristocratique a pu se maintenir à la tête de la France pendant tant de siècles. Avec de bons privilèges, il suffisait de prélever au bon endroit, le tout avec l'appui de Dieu.
"Je ne peux pas leur voler de l'argent qu'ils ont donné. Personne ne les oblige à donner ! Ils donnent de leur plein gré."
L'humour grinçant du film passe d'autant mieux que c'est Bourvil qui le manie avec son air de pas y toucher et ses personnages un peu candides, laissant une marge à l'interprétation du personnage par le spectateur. La présence de Bourvil dans les films de Mocky est un gage de succès car son comportement ne va jamais trop loin ("La grande lessive", …) et permet (peut-être) de tempérer les ardeurs de Mocky. Il me semble qu'en l'absence de Bourvil, l'humour des films de Mocky est souvent trop appuyé et perd en efficacité. On voit par différence, le jeu de Jean Poiret, ici, dans son rôle d'adjoint et d'ami de Georges, plus affirmé et en définitive moins amusant. En particulier dans la discussion rhétorique entre Poiret et Bourvil sur ce qui est un vol et sur ce qui ne l'est pas.
Au-delà de la famille aristocratique de Georges, il y a la police représentée par le chef (Marcel Peres), les inspecteurs de base (Francis Blanche, Jean Tissier, …) : c'est leur impuissance qui est amusante face à Georges qui a toujours une petite longueur d'avance. Forcément puisqu'il est aidé par le Ciel qui le prévient à temps à travers "un rêve en couleur". Belle astuce de Mocky.
Et pour finir, le film est une agréable balade dans ce Paris des années 60 où le bistrot de quartier est le lieu incontournable de tous les échanges, presqu'un lieu neutre où on dépose les armes, un peu comme les églises, d'ailleurs …
Ce film de Jean-Pierre Mocky est assurément une belle réussite intelligente et jubilatoire …
Cet utilisateur l'a également ajouté à sa liste Les meilleurs films de 1963
Créée
le 15 mai 2025
Critique lue 86 fois
15 j'aime
14 commentaires
Une des comédies les plus enlevées de Mocky, grinçante et irrévérencieuse. Cinéaste inégal qui s'est commis souvent dans des caricatures outrancières, il a toujours pratiqué un humour très...
Par
le 27 juil. 2017
29 j'aime
Le vilain garçon Jean-Pierre Mocky, grand distributeur de poil à gratter, signe avec Un drôle de paroissien l’un de ses films les plus connus et pourtant pas l’un de ses moins apaisés. Quand Mocky...
le 10 avr. 2021
22 j'aime
7
Un film indispensable dans toute DVDthèque qui se respecte. Un film de Jean-Pierre Mocky de la grande époque (1963) où il avait des choses à dire et à montrer que je prends plaisir à regarder de...
Par
le 15 mai 2025
15 j'aime
14
Au départ de cette aventure, il y a un roman écrit par la romancière R.A. Dick en 1945 "le Fantôme et Mrs Muir". Peu après, Mankiewicz s'empare du sujet pour en faire un film. Le film reste très...
Par
le 23 avr. 2022
30 j'aime
9
C'est vers l'âge de vingt ans que j'ai lu ce livre. Pas par hasard, je me souviens très bien qu'un copain me l'avait recommandé. J'avais bien aimé. Cependant, je n'ai jamais éprouvé le besoin de le...
Par
le 7 avr. 2023
28 j'aime
33
1959 c'est l'année de "125 rue Montmartre" de Grangier mais aussi des "400 coups" du sieur Truffaut qui dégoisait tant et plus sur le cinéma à la Grangier dans les "Cahiers". En attendant, quelques...
Par
le 13 nov. 2021
28 j'aime
5