Soif de vérité.

C'est un curieux film que voilà : loin d'être un western comme le décor, l'ambiance et le cinémascope peuvent le laisser suggérer, il s'agit d'un drame intimiste sur un homme en quête de vérité.

Spencer Tracy, apparaissant la main gauche amputée, y incarne John J. Macreedy, un homme en costard qu'on croirait sorti de nulle part, tout comme ce train qui l'a amené à Black Rock comme si tout cela n'était qu'une apparition "fantastique". Sa présence, ainsi que ses motivations, déclenchent l'hostilité soudaine des habitants qui voient en lui une menace potentielle sur un secret qu'ils espéraient avoir enfoui.

Su le papier, le film peut faire penser à "Yojimbo", "Pour une poignée de dollars", voire à "L'homme des hautes plaines" dans sa manière de présenter son personnage principal comme un homme sorti de nulle part, arrivant pour faire une chose particulière, et qui disparaitra tel un fantôme du passé.
Mais ici, le sujet, porté par une mise en scène exploitant à merveille le cinémascope, étend l'immensité du paysage et diminue la présence des hommes, comme pour leur faire porter le poids de leur tort, celui que découvrira le personnage de Spencer Tracy, qui incarne un personnage vraiment saisissant, amoindri physiquement, mais doté d'un moral d'acier.

Le film repose sur un fait considérable, mais qui fait remonter les heures les plus sombres de l'Amérique xénophobe, celle dont a peu parlé durant la Deuxième Guerre Mondiale. Impossible de ne pas évoquer aussi le maccarthysme, qui est constamment en sous-texte de l'histoire.

De par son rythme très serré (il dure moins de 80 minutes), sa galerie de personnages très intéressants (dont Glenn Ford, et on voit aussi Ernest Borgnine ainsi que Lee Marvin dans un petit rôle), "Un homme est passé" évoque ce que l'Amérique peut avoir de plus sombre, de plus immoral.