Une famille
7.1
Une famille

Documentaire de Christine Angot (2024)

Cette note est surtout l'expression d'un regret concernant un film qui se borne à exposer des conflits très interindividuels ; ce qui, en soit n'est pas un mauvaise chose, nous avons besoin de ces témoignages, ils nous montrent des vies détruites par des agressions, des viols, et du silence. Mais que devons nous faire de ces témoignages ? Nous pourrions peut-être les empiler les uns sur les autres, pour faire une magnifique tour de témoignages du haut de laquelle nous n'y verrions qu'un épais brouillard.

Je pense qu'il faudrait au contraire transformer ces témoignages en un outil politique. Devant le film, je suis resté capté par un récit émouvant qui montre un femme qui cherche désespérément des réponses, pour cela, elle va demander des comptes à des personnes qui sont, elles aussi, prises toutes entières dans des engrenages qui les dépassent.

Pourquoi ne rien avoir dit ? Pourquoi ne rien avoir fait ? Réponse : un long silence, des propos euphémisants, hyperboliques, contradictoires, encore du silences, des larmes.

Oui, il faut leur en vouloir.

Non il ne faut pas leur en vouloir.

Christine Angot, sa mère, sa belle-mère, son ex-mari, sa fille, le spectateur, tout le monde est désespérément désemparé. Nous voilà bien avancés.

La question de la structure sociale n'est qu'effleurée par trois extraits du plateau d'Ardisson. J'ai bien cru entendre le film me dire : "Débrouille toi avec ça, on est ici pour mettre la responsabilité sur le dos de la mère." C'est pourtant la structure qui permet à un homme de jouir ainsi de sa position de domination, c'est elle qui normalise les violences, qui minimise la parole des victimes, qui fait vivre un enfer à celles osent s'élever contre un patriarcat qui permet à de telles choses d'arriver. Le cadre de la dernière scène est en fait complétement représentatif du plus grand défaut du film : on y voit Christine Angot et sa fille dans un environnement très bourgeois, très lumineux ; il y a une terrasse, de jolies tasses, du café au lait, et en arrière-plan : la mer méditerranée. La fille essaye péniblement d'exprimer ce qu'elle ressent concernant le traumatisme de sa mère, c'est poignant, mais le décor bourgeois s'en fout, il demeure.

OttoBDM
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le 26 avr. 2024

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