En quoi la vie de ma grand-mère est-elle plus attrayante ?

Une Histoire Vraie est un film américain réalisé par David Lynch en 1999. Il raconte l'histoire d'Alvin Straight, un retraité de 73 ans qui effectue un voyage de 350 milles (563 km) à travers les Etats-Unis afin de rendre visite à son frère récemment victime d'une attaque. De plus histoire de rajouter un peu de piment à son expérience, le vieil homme a décidé de traverser la moitié de L'Amérique en tondeuse à gazon. Alors bien-sur dit comme cela le périple d'Alvin promet d'être une aventure très attrayante, mais en vérité il n'en ai rien. Car cette escapade est au finale si ennuyeuse que même la vie quotidienne de ma grand-mère paraît en comparaison bien plus attractive. On peut donc se demander en quoi l'existence de ma mémé est-elle plus amusante que celle d'Alvin. Pour le savoir nous étudierons d'abord individuellement ces deux modes de vies, avant de les comparer et d'en tirer les conclusions adéquates.

Rosaline Tordu, 78 ans se lève tous les matins à 5h36 précise, un réflexe matinal qu'elle tient depuis ses 12 ans, lorsque que son père l'obligeait à se lever la première pour préparer le petit déjeuner et faire le ménage avant le réveil de ses 5 petits frères. Elle a également pris l'habitude de regarder la matinale de Canal +, tous les jours depuis 1987. La déprogrammation de l'émission l'an passé n'y a d'ailleurs rien changé, elle se contente juste dorénavant de prendre un film en cours de route, qu'elle a le plus souvent déjà vu mais dont elle ne se rappelle de toute façon pas l'histoire. Quand la télévision est en panne, personne n'est capable de dire ce à quoi elle occupe sa matinée, et surtout pas la principale intéressée. Vers 9h30, elle effectue un petit aller retour dans sa cuisine afin de se chercher un café court et un Kinder Délice, pour finalement se recoucher et passer le reste de la matinée dans son lit douillé. Ensuite, après s'être doucher, avoir passé l'aspirateur, avoir passer la serpillière et fait une lessive, elle débute la préparation du déjeuner. La vielle femme a d'ailleurs parfois le plaisir de recevoir son adorable petit fils, Alfredounet qui habite à deux pas de chez elle. Lorsque que ce dernier vient la voir, trois possibilités de plats s'offre à lui : des pâtes à l'huile (ou plus exactement de l'huile aux pâtes), de la viande pré-cuite la veille et réchauffée au micro-onde, une bouillabaisse de restes datant de 1 à 6 jours ou une omelette aux œufs. A table, la grand-mère a systématiquement trois informations qu'elle répète en boucle et en rythme avec le son de la télé qui n'est jamais très loin et qu'elle ne quitte jamais des yeux. Une fois le repas terminé et le petit Alfredo repartit, la journée de Rosaline peut se poursuivre de quatre manières différentes : soit elle descend effectuer ses courses à Auchant, soit elle reste dans son jardin et s'occupe de ses plantes, soit elle va prendre le thé chez ses copines qui n'ont pas encore eu leur billet pour l'au-delà, soit elle passe l'après-midi dans l'atelier de mon regretté grand-père, se complaisant ainsi dans une époque passée qu'elle a de plus en plus de mal a garder en mémoire. Puis, après avoir regardé "On n'demande qu'à en rire" avec Jean Bengugui (son idole inavouée), Rosaline passe de nouveau à table pour le souper, elle a cette fois le plaisir d'être en compagnie du Grand et du Petit Journal de la chaîne cryptée. Elle se couche généralement assez tôt à l’exception du Samedis où il lui arrive de regarder "On n'est pas couché" jusqu'à 2h du matin. Mais bon, ce petit écart de conduite ne l'empêche pas d'être debout le lendemain à 5h36 précise pour une nouvelle journée encore plus palpitante que la précédente.

De son côté, Alvin Straight a également une vie bien routière. Il se lève à l'aube, roule toute la journée sur des routes de campagne aux paysages en tous points identiques et s'arrête au coucher du soleil pour dormir le plus souvent tout seul, dans des forêts désertes, à proximité de son chemin. Lui aussi n'a plus toute sa tête, car le bougre a décidé d'effectuer son périple en solitaire, dans une tondeuse à gazon roulant à 3km/h, afin de pouvoir tracer sa route sans l'aide de personne. Ce moyen de transport est non seulement dangereux, mais en plus il rallonge considérablement le temps à parcourir, obligeant ainsi le pauvre Alvin a se coltiner trois fois plus de paysages forestiers qu'un automobiliste ordinaire. Les seuls moments qui détonnent dans la monotonie de son trajet ce sont d'une part ses rencontres, qui ne sont absolument pas mémorables, ainsi que ses problèmes liés à la tondeuse qui ne surviennent que très rarement au cours du film et qui sont toujours réglés de manière rapide, nette et définitive. Heureusement pour nous, le réalisateur a eu la bonne idée d'accompagner son voyage d'une bande-son absolument fabuleuse, dommage qu'Alvin ne puisse pas l'entendre, il tirerait une autre gueule plus joyeuse si c'était le cas.

Vous l'aurez donc compris, c'est bel et bien le quotidien de ma grand-mère qui se trouve être 100 fois plus attrayant que celui du vieil homme américain. Et au cas où les imbéciles du dernier rang n'auraient pas compris mon raisonnement, je vais vous expliquez pourquoi. Certes nous sommes ici en présence de deux existences extrêmement routinière et monotone, mais toute la différence et dans la personnalité des personnes qui les vivent. En effet ma grand-mère a beau avoir une vie de merde et une cervelle quelque peu défectueuse, je ne me lasse pas de lui rendre visite. Car malgré le temps qui passe elle reste la grand-mère qui a bercé mon enfance depuis tout petit. Une éternelle bout en train qui voit la vie du bon côté, qui refuse de se montrer triste ou diminué devant les autres mêmes lorsqu'elle a des moments de blues, qui se montre toujours souriante et sympathique avec les autres, une personne énergique et drôle, qui se satisfait pleinement de son mode de vie et arrive grâce à son éternel optimisme à transformer en son quotidien, pour le rendre le plus amusant possible. La voilà la différence ! Car Alvin a beau vivre une existence peu banale en comparaison des autres veilles personnes, au final il vit exactement la même chose qu'eux, puisque outre le fait de répéter inlassablement le même cycle toute la journée, il a toujours la mentalité d'une personne du 3° âge. Il reste assis sur son cul toute durant des heures, ne sourit jamais, ne se montre ni aimable ni sympathique avec les personnes qu'il rencontre et ne fait preuve qu'aucun humour même dans les situations les plus farfelus. Ma grand-mère a peut-être une existence encore plus ordinaire mais au moins elle, elle sait bien vivre avec. Passer du temps avec elle est loin d'être une corvée. En revanche je vous défit de passer ne serais ce qu'une journée en compagnie d'Alvin et de sa tondeuse sans que ne nous vienne l'idée de vous pendre le plus rapidement possible.

En conclusion nous pouvons voir que les apparences sont parfois trompeuses et que le voyage de ce grand-père est en faite plus ennuyeux et inintéressant que n'importe quel trajet d'automobiliste classique. Si le personnage principal avait eu une personnalité suffisamment drôle amusante et sympathique qui aurait su rendre son expérience plus fun qu'il n'y paraît, ça aurait pu rendre quelque chose de plus attrayant, mais ce n'est pas le cas. Et c'est pour cela que le quotidien banal de ma mamie adorée et largement supérieure à celui d'Alvy.

Ceci est une critique réalisée dans le cadre d'un sujet lancé par TheBadBreaker.
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