Impossible pour moi d'être véritablement objectif. Ce film fait partie de ceux qui ont rythmé mon enfance (enfin mon adolescence), la VHS tellement usée que c'est à peine si j'osais la rembobiner, les dialogues appris par coeur, et cette scène gravée à jamais au fer rouge, ce lap dance qui en aura fait fantasmer plus d'un et qui reste, des années après, un anti -dépressif bien plus efficace pour moi qu'une cure de Prozac mixé au Whisky.
Oui, j'ai aimé Une nuit en enfer, et oui, les déhanchements sensuels de Salma Hayek, la divine mexicaine au regard de braise y sont pour beaucoup. Il faut reconnaître que, outre la plastique de la comédienne, la réalisation est pour beaucoup dans l'attrait de cette scène. Lascive, sensuelle, rythmée par la musique de Tito & Tarantula, elle sait mettre en avant les corps (enfin, le corps, et quel corps...) et émoustiller les sens. C'est aussi, accessoirement, le turning point du film...
C'est là que le bat blesse. Car le film est divisé en deux de façon assez nette et brutale, ce qui peut avoir tendance à troubler l'audience. La première partie tourne autour des deux frères Gecko, joués de façon inégales par George Clooney (excellent) et Quentin Tarantinon (qui a le mérite de rester au maximum dans l'ombre), et de leur tentative de fuite vers El Rey, Mexique. Ils embarqueront au passage un pasteur ayant perdu la foi (Harvey Keitel, sobre et efficace) et ses deux enfants. La caméra de Rodriguez emprunte beaucoup au style de son confrère QT, jusqu'au plan dans le coffre, le signature shot du réalisateur de Pulp Fiction. Les dialogues incisifs s'enchainent à un tel rythme que chaque répartie devient quasi culte en elle même. Et puis la joyeuse bande arrive au Titty Twister. Et les choses commencent à mal tourner.
Pour les groupe, tout d'abord, qui se retrouve charcuté sans prévenir par une horde de vampires. Pour les spectateur ensuite, qui ne s'attendait pas à un changement de style si radicale. La subtilité passe au placard, et on assiste dès lors à près de trois quarts d'heure de boucherie, généreusement assaisonné de sang vert (les vampires saignent vert, très pratique pour éviter une interdiction massive à un large public aux États-Unis).
Entendons nous bien : cette seconde partie n'est pas mauvaise en soi. Les dialogues restent affutés, le côté second degré est toujours présent, quoique bien alourdi. Mais il y a de quoi être déconcerté (pour ne pas dire plus) pas ce virage à 180 degrés opéré sous nos yeux ébahis. Et lorsque la fin arrive, on reste un peu sur sa faim, justement...
Le film partagera sans doute les foules, entre les adorateurs de la première moitié, les fervents défenseurs de la seconde partie, et ceux, plus rares, que ce revirement brutal n'aura, au final, pas dérangé. Je fais personnellement partie de cette dernière catégorie, et ne me lasse pas de revoir ce film déjanté (j'ai le DVD maintenant, bien plus pratique). Malgré tout, on ne peut s'empêcher de se demander ce qu'aurait donné le film s'il avait continué sur sa lancée... Peut être Tarantino nous donnera-t-il la réponse un jour.