Saga n°2 : Jason, l'homme des situations ?

L'évolution du slasher et de l'horreur à travers deux décennies, OU de la problématique de renouveler un genre qui se meurt à petit feu

Vendredi 13, Halloween et Les griffes de la nuit font parti du fameux trio des grands slasher, auquel je rajouterait personnellement Hellraiser. Si ces sagas ont marqué le genre de l'horreur et ancré définitivement les codes du slasher, genre qui à vu le jour avec des films tel que Black Christmas et le fameux Massacre à la tronçonneuse.
Aujourd'hui je vais vous parler de la saga Vendredi 13, de son évolution, et de ce qu'elle retranscrit des tendances dans le milieu horrifique de ses débuts à sa fin.

Le premier film Vendredi 13 voit le jour comme beaucoup de premier film de saga horrifique : en plein boum du genre : c'est à dire le début des 80's, en 1980 même !
Pour rappel massacre à la tronçonneuse sort en 1974, Halloween en 1978.
Le premier film est assez bien pensé et reprend des codes préétablis par les deux oeuvres précédentes, à savoir le groupe de jeunes stéréotypés du premier massacre à la tronçonneuse, et le coté mutique et monolithique du tueur dans Halloween pour ses suites, le tout dans un décor censé revenir en boucle par la suite : Crystal Lake.
Le film est bien amené, bien monter, tout est dans la suggestion, en opposition avec la crudité des deux autres, surtout de massacre à la tronçonneuse. Le slasher est ici plus accessible, plus " grand public " pour l'époque après de grosses controverses.

Ses suites restent dans la même optique de rester grand public et semblent parfois être des copies du premier, avec deux trois changements. Mais le personnage se construit, et mine de rien, fait des victimes. On verra se mettre en place le masque et la machette, ainsi que l'élément comique du corps lancé à travers la fenêtre sorte de running gag de la saga.
Si ces deux derniers éléments n'ont rien de très significatif il est important de se pencher sur la symbolique du masque.
Le masque semble être devenu depuis Jason une constante du slasher, voir même du film d'horreur en lui même. Si il n'est pas le premier à en porter, il n'en reste pas moins le plus emblématique, au coté de ghostface, de Scream.
Et ce n'est pas pour rien, le masque cache le monstre derrière, il laisse libre court à l'imagination, et il déshumanise le tueur, le rendant encore plus impressionnant.
De plus le masque en lui même, de par sa forme, son design, peut transmettre un message, et choisir le masque de hockey d'une équipe meurtrière n'est pas anodin, loin de là.
Chaque masque est un peu une signature du tueur, comme sa façon de tuer. Je citait plus haut ghostface de scream mais pourquoi un fantôme ? Parce que c'est à l'image du tueur : on ne le voit jamais, il est au téléphone, il est caché dans la maison : en bref, il tue sans qu'on l'aperçoivent, sauf quand il est déjà trop tard.
Ici Jason est aux antipodes, tel un joueur de hockey furieux, il rentre dans le lard, il taille la bidoche, en bref, il y va de front, et rien ne semble pouvoir l'arrêter.

C'est ainsi que Jason va tracer son chemin tant bien que mal dans des films passablement bons, ennuyant et bon à effrayer la ménagère moyenne. Cette affaire durera tant bien que mal, chaque épisode à partir du second étant en passe d'être le dernier, mais à chaque fois un nouveau réalisateur voulant se lancer dans le cinéma ranime la flamme.
Puis débarque de nouveaux slashers : Freddy et Hellraiser, plus de gore, plus d'humour, plus de mise en scène dans les meurtres. Deux film sont fait et Jason commence à prendre le pas : on voit apparaitre à l'image de sa transformation en mort vivant, une résurrection bienvenue pour la saga. Plus de gore, plus d'humour et de la mise en scène.

Avec le film " Un nouveau défi " qui semble une copie du premier sur la forme, avec la final girl découvrant les cadavres à la fin, Jason s'offre même un retour à zéro, on met les pendules à l'heure, les gens veulent plus d'humour, on est à la fin des 80's et le film d'horreur prend une nouvelle tournure. La même année commencera la saga chucky d'ailleurs.
Jason est souvent mis dans des situations intéressantes, on à tendance à faire en sorte que quoi qu'il arrive il crève l'écran par sa présence. Il faut que Jason soit ce monument indestructible, et surtout, qu'il soit toujours en train de tuer dans une frénésie meurtrière. On remarquera ainsi que le nombre de victimes à augmenter drastiquement entre le second film et le 7ème.

C'est justement là que prend enfin place la plus grande qualité de cette saga à mon sens : Jason n'est pas seulement l'homme de la situation, il est l'homme DES situations. Avec le huitième film on emmène Jason loin de son cocon naturel, Crystal Lake, pour une première partie en huis clos dans un navire, et une seconde dans une chasse à l'homme dans un New York poisseux et sale au possible.
Et malgré ce changement drastique, le film est à mon sens l'un des meilleurs de la saga : Jason s'adapte à l'environnement, et tue en fonction de celui-ci, tout en gardant une mise en scène intéressante et parfois hilarante, je pense surtout à la scène avec le boxeur sur le toit d'un immeuble.

Après quelques années sans rien la saga revient et surfe à nouveau sur les tendances, plus ou moins bien. La SF Horror à commencer à faire son apparition avec Alien et Predator mais aussi les moins connus Xtro et Tremors.
Dans cette veine l'épisode 9, Jason va en enfer propose de transferer Jason dans un autre corps via un parasite, ce qui permet certes un habile tour de force au niveau de l'intrigue, permettant de montrer de faire tomber le masque et transposer la menace sur des personnes normales, mais justement après avoir travailler dur le personnage de jason, il est un peu dommage d'en arriver à l'éliminer et cette histoire de parasite ne verra pas de suite dans les prochains films.
Mais encore une fois Jason se retrouve dans une nouvelle situation, et c'est toujours intéressant de voir qu'il garde certain aspect essentiels du personnage : machette et mutisme, ainsi que pas mal de mise en scène pour les meurtres.
On remarquera que la saga vendredi 13 ne sera pas la seule à vouloir suivre la tendance de la SF Horror puisque l'épisode 4 de Hellraiser est quand même pas un franc succès, et se déroule dans l'espace, dans le futur...

Puis la SF Horror se fait un peu oublier et la plupart des sagas sont en train de s'achever, on entre dans la fin des 90's, début 2000 avec la nouvelle vague du slasher, initié par scream. On voit revenir sur le devant de la scène des sagas d'horreur plus cru, plus violentes quitte à avoir des effets spéciaux parfois très discutables.
Je pourrais citer par exemple la trilogie Cube, les Wishmaster, et les premiers films de la vague Animal Horror tel anaconda et lake placid.
Cela permettra d'ailleurs à la nouvelle vague de l'horreur, coté asiatique voir le jour et dominer le marché avec des films certes cheap mais sans vraiment d'effets spéciaux compliqué et onéreux. On peut citer ici Ring et Ju-On.
C'est dans ce climat que Jason tirera sa révérence avec un Jason X qui le projette dans le futur et qui tente de faire un huis clos spatial mais avec un budget cheap, des acteurs au rabais mais tout de même de l'humour pour sauver la situation. On notera tout de même un Jason amélioré qui fait plaisir à voir, et encore une fois une nouvelle situation pour ce dernier.

La saga se cloture en 2003 avec une autre retardataire : Les griffes de la nuit. On aura droit à un cross over, et pour la première fois Jason crée la tendance, car on verra par la suite fleurir d'autres cross over de sagas, dont évidemment les Alien contre Prédator sorti l'année juste après mais aussi puppet master contre démonic toys ( toujours la même année ), puis plus tard ça partira en steak avec la série des mega-shark, spécialisé dans le versus nanardesque.

Pour essayer de synthétiser tout ça Jason est ancré avec des bases solides dans le slasher dit " classique " de par ses débuts : il à un masque, il ne parle pas, et il est immortel. Mais de par son parcours il à du s'adapter à l'évolution du genre horrifique et à commencer à mettre en scène ses meurtres, à opter pour un peu plus d'humour.
Et pour ce qui est de l'adaptation, Jason est très bon, on peut le mettre dans différentes situations, et c'est ça qui est intéressant à voir dans les derniers films : voir la forme de ces derniers changer, les enjeux aussi parfois, mais surtout voir jason lui même s'adapter à l'environnement, en tirer profit, et tuer toujours plus.
Une très belle métaphore de tout ça pourrait être dans Jason X, dans une scène assez emblématique à mes yeux.
Jason est augmenté, changer, mi mort vivant, mi robot, et alors que même son corps est un sérieux bordel, il préférera tout de même sa bonne vieille machette vieille de 400 ans à une toute neuve et toute clinquante.
Certes Jason évolue, mais c'est en gardant ses bases solides qu'il peut changer de style, de genre sans trop de problème.