Une semaine après « Les Sentiers de l’oubli » (4 août 2021), de la Chilienne Nicol Ruiz Benavides, sortira sur nos écrans, le 11 août, ce « Vent chaud » brésilien, également tourné dans la ville d’origine de son réalisateur, Catalaõ, pour la première fois exposée au cinéma.


Dans ce premier long-métrage de fiction, le jeune Daniel Nolasco, également scénariste et co-producteur, marqué par l’œuvre d’Alain Guiraudie et imprégné par les goûts chromatiques d’Almodovar, effectue le choix courageux de montrer le désir brut, entre hommes, débarrassé de tout enrobage sentimental. La photographie, très soignée, de Larry Machado est toutefois plus assombrie que chez le confrère ibérique, dans la mesure où Daniel Nolasco n’hésite pas à dépeindre la face obscure de ces liens humains, lorsque justement les sentiments finissent par surgir et par pousser à l’emballement une mécanique presque trop sagement, parce que trop froidement huilée. Une palette sombre, rompant avec les scènes solaires rattachées à la vie officielle, qui doit aussi sa présence à la part importante des rêves et phantasmes, à tel point que, vers la fin, il est possible d’hésiter ponctuellement sur la nature de telle ou telle séquence. Très habilement, les intérieurs de la mine dans laquelle travaille le personnage principal, Sandro (Leandro Faria Lelo) - entouré de Ricardo (Allan Jacinto Santan) et de Maicon (Rafael Theophilo), sans compter Paula (Renata Carvalho) et Cezar (Leo Moreira Sá) -, voient leur potentiel esthétique si profondément exploité que, arrachés à un réalisme primaire, ils rejoignent l’obscurité inavouable du monde de Sandro.


Grâce à son acteur principal, dont le point de vue est presque exclusivement adopté, Daniel Nolasco illustre à merveille la pétrification opérée par un désir qui vire à l’obsession, sous l’action décuplante d’un affect initialement banni et d’autant plus violemment présent qu’il lui a fallu s’imposer. On peut toutefois regretter que cette forme de rigidité s’étende souvent - et sans doute bien involontairement - aux dialogues, aux scènes socialisées, le réalisateur déployant surtout son talent dans la direction des scènes muettes. De même la musique est-elle, les rares fois où elle intervient, trop appuyée ou démonstrative… Il n’en reste pas moins que cette œuvre convie à une plongée intéressante et audacieuse dans l’univers d’un désir exclusivement masculino-centré.

AnneSchneider
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le 7 août 2021

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Anne Schneider

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