Ce qu’il y a d’étonnant dans ce Vesper Chronicles c’est qu’on sent une patte.
Sur de nombreux aspects on sent une ambition, un projet, même un savoir-faire.
Décors, costumes, photo… Tout participe à dire quelque-chose. Tout participe à construire un univers cohérent. Presque élégant.
Mais je me permets de dire que je trouve ça « étonnant », c’est parce qu’en définitive, ce film a été totalement inopérant sur moi.
Zéro émotion. Encéphalogramme plat. Ennui permanent.
J’ose même l’avouer : je ne suis pas aller jusqu’au bout.


Pourtant ça avait plutôt bien commencé.
J’avais vu l’affiche puis un trailer du coin de l’œil. Quelque-chose là-dedans m’avait attiré.
Un air de SF sans esbrouffe ; de CGI sans excès ; de film à démarche avant d’être un film à spectacle (Pas que je n’aime pas les films-spectacles, mais l’omniprésence du genre – surtout dans la SF – tend à développer chez moi une indifférence de plus en plus grandissante).
D’ailleurs la première minute du film m’avait entretenu dans cet état d’esprit d’émoustillement. Pour la première fois on dispose là d’un carton d’amorce plutôt malin ; sachant jouer de l’ordre d’affichage des mots pour imposer tout de suite un univers. Derrière ça enchaine sur une brume, une silhouette intrigante et difficilement cernable, ainsi qu’un robot au look ambigu.
Je voyais déjà une multitude de pistes à emprunter et de voies à explorer se dessiner à partir de cette seule intro…
…Et puis finalement rien.
…Ou pour être plus exact : rien là où il aurait fallu quelque-chose.


Parce qu’afficher une cohérence formelle certaine, de magnifiques costumes et un Eddie Marsan toujours appréciable constitue certes de bonnes dispositions de départ, à n’en pas douter. Seulement ce Vesper Chronicles, de par son seul titre, nous annonce tout de même autre chose qu’un univers ; autre chose qu’une esthétique…
Une chronique, c’est le récit à travers le temps, c’est un parcours, et c’est aussi une forme de synthèse à travers ce parcours…
…Or que dire du parcours de cette fameuse Vesper ?
L’essentiel du temps Vesper ne fait rien d’extraordinaire.
Vesper collecte de la nourriture. Vesper soigne son père. Vesper va marchander son sang. Vesper va sauver des citadins égarés…
En fait, le parcours de Vesper ne se limite qu’à faire de l’exposition… Et elle y passe du temps à la faire sa foutue exposition. Je me suis barré après plus d’une heure de film et on en était encore là. A exposer…
…Exposer ce qu’on savait déjà pourtant tous par ailleurs.


Parce qu’il a beau être travaillé cet univers qu’il n’en reste pas moins désespérément commun, pour ne pas dire tristement basique.
Ce n’était pas comme si Vesper Chronicles était le premier film à s’aventurer sur le chemin du post-apo.
Le monde gris et brumeux où tout le monde vit en haillon, on connait.
Le monde divisé entre une élite qui a tout et une masse qui n’a rien, on connait.
Et même chose pour ce qui est des thématiques de la dégénérescence, de la regénérescence, de l’élite chancelante et de la sauveuse d’en bas qui libérera l’opprimé… Tout ça aussi on fait plus que connaitre…
En fait cette chronique n’a rien pour surprendre et cela surtout parce qu’elle n’a rien à dire.
Au final sa proposition formelle n’est jamais mise au service de quoi que ce soit qui puisse soudainement faire sortir ce film de ses marais putrides.
Pire, à enchainer un à un les clichés sans parvenir à les réinventer, je trouve que ces chroniques de Vesper sombrent parfois dans une certaine forme de ridicule.


Car voyez-vous, dans ce futur post-apocalyptique, malgré le réchauffement climatique, il fait tout le temps gris et brumeux. Tout le monde s’habille comme dans un Dickens et Vesper a des faux airs de Causette se devant de résister à son oncle de Thénardier.
Tout le monde passe son temps à déprimer ou à dépecer un truc. Pas de sociabilisation ou très peu. Quand on n’est pas en quête d’une ressource à choper on attend sans rien faire et on broie du noir…
Mais malgré tout, tout ça n’a manifestement pas empêché Vesper de devenir un génie en génétique. Elle a beau galérer pour trouver des piles pour alimenter la machine de son darron qu’elle n’a pour autant aucun problème pour créer des nouvelles espèces de plantes… C’est comme ça, c’est magique, comme les bisous des habitants des villes qui guérissent tout.
Alors oui, d’accord, sûrement fallait-il y voir là la volonté d’une touche de poésie, mais pour qu’il y ait poésie il faut aussi qu’il y ait une légère forme de légèreté. Or là, quand j’assiste à une scène où Vesper et Camellia passent leur temps à imiter des bruits d’animaux, moi je ne trouve pas ça poétique… Je trouve ça juste malaisant.


Cette scène de chants d’animaux, pour moi elle résume tout du film.
Elle est très longue pour ce qu’elle a à dire et à montrer ; elle n’évolue jamais ; ne surprend jamais ; et elle se finit en eau de boudin avec un instrument de musique sorti de nulle part en mode « allez vas-y ma chérie, maintenant pousse la chansonnette histoire qu’on est une transition musicale afin de passer à autre chose… »


En ce qui me concerne, c’est tout le film qui m’a donné envie de passer à autre chose.
Il y avait longtemps que, pendant une séance de cinéma, je ne me mette à ce point à regarder ma montre toutes les deux minutes.
Et j’ai beau n’avoir aucune animosité à l’encontre de ce Vesper Chronicles que malgré tout je n’ai rien su trouver à quoi me raccrocher pour essayer d’en justifier le visionnage.
Les beaux costumes, les beaux décors et Eddie Marsan ça tient cinq minutes mais au-delà de ça encore faut-il avoir quelque-chose à raconter, et c’est finalement peut-être ce triste enseignement que – pour ma part – de cette chronique de Vesper – je conserverai.
Soigner la forme c’est certes un effort qui n’est jamais vain,
Mais quand il n’y a que ça, un film ne va jamais bien loin…

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le 3 sept. 2022

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