Une femme se faisant passer pour un homme... qui se fait passer pour une femme !
Oui, sûr, même après une 2e lecture ralentie, il y a de quoi ne plus savoir à quels seins se vouer !
Il existe un excellent moyen de savoir comment peut se vivre concrètement ce genre de situation digne d'une analyse à la Docteur Freud : visionner "Victor Victoria".
Qu'il soit signé Blake Edwards, à qui l'on doit le burlesque jamais grotesque de "La Panthère rose", avec l'hilarant Peter Sellers, suffit pour signifier qu'il s'agit d'une comédie. D'un genre toutefois assez spécial, dans la mesure où l'action se déroule dans le "gai Paris" des années 30. Et de "gai" à "gay", il n'y a qu'un pas - ou alors pas touche ! - à franchir.
Edwards le franchit. A partir de cette astucieuse et audacieuse association d'idée, il a choisi de faire baigner son film dans une ambiance ambiguë. Ce qu'est franchement la démarche de l'héroïne. Chanteuse de formation classique, elle va, sans succès, d'auditions en auditions. Jusqu'à ce qu'elle rencontre un chanteur homosexuel au chômage. De leur association artistique naît une étourdissante supercherie. Il la persuade de se mettre au goût du jour en devenant Victor, étonnant travesti d'origine polonaise et aristocratique. Directeurs de cabarets en vogue, gens de spectacles et noctambules amateurs de sensations troubles, tout le monde est dupé.
Grâce à ses numéros débordant de féminité - et pour cause ! - Victor devient en quelques semaines la coqueluche du Tout-Paris. C'est enfin l'heure de gloire pour la jeune chanteuse.
Mais la double appartenance sexuelle qu'elle doit assumer n'est pas sans lui poser des problèmes. Au fil des situations, elle se rend compte combien il est difficile et contraignant d'être simultanément homme et femme. De se voir "pile ou face", Victor ou Victoria, selon l'endroit, l'heure, ou encore avec qui. Surtout à partir du moment où sa nature féminine la fait tomber amoureuse d'un aventurier...
Fidèle au style qui a fait sa notoriété, Blake Edwards signe là une comédie bien filmée, alerte et drôle.
Une succession de quiproquos, rebondissements, placés sous ce signe de maîtrise : les quiproquos dérapent, ils sont faits pour ça, mais jamais l'humour sous-jacent !
Surtout, l'homosexualité est ici un prétexte et non une cible ! "Précieuse" précision !
S'il faut un peu pinailler (verbe ambigu, mais c'est voulu !), dommage que le cinéaste se laisse aller, par moments, à de la dérision prévisible.
Mais heureusement, il y a Julie Andrews Victor Victoria ! Bien loin du personnage de Mary Poppins qui l'a consacrée, elle livre une interprétation sidérante. En jouant les travestis façon 1930, elle prend manifestement un plaisir non déguisé !

Ticket_007
8
Écrit par

Cet utilisateur l'a également mis dans ses coups de cœur et l'a ajouté à sa liste * Fan des années 80 !

Créée

le 20 juin 2016

Critique lue 1K fois

17 j'aime

17 commentaires

Ticket_007

Écrit par

Critique lue 1K fois

17
17

D'autres avis sur Victor Victoria

Victor Victoria
Ugly
7

Double sexe

Il parait que c'est le remake d'un film allemand des années 30 que je n'ai pas vu, donc je me garderais de faire un comparatif, mais le fait est que Blake Edwards nous livre une comédie pétillante et...

Par

le 19 févr. 2019

26 j'aime

14

Victor Victoria
Tonto
8

Sapiens homo

Paris, années 30. Chanteuse désargentée et au chômage, Victoria Grant (Julie Andrews) vit dans la plus extrême misère. Elle fait alors la rencontre du chanteur homosexuel Carroll Todd (Robert...

le 9 févr. 2023

22 j'aime

18

Victor Victoria
Ticket_007
8

Identité sexuelle à "Pile ou face"

Une femme se faisant passer pour un homme... qui se fait passer pour une femme ! Oui, sûr, même après une 2e lecture ralentie, il y a de quoi ne plus savoir à quels seins se vouer ! Il existe un...

le 20 juin 2016

17 j'aime

17

Du même critique

Qui veut la peau de Roger Rabbit
Ticket_007
9

Comédie policière et cartoon dopés par une "Fantasia" d'effets spéciaux

Un détective privé s'immerge dans le Hollywood de l'après-guerre, pour enquêter sur la brouille entre un acteur célèbre et sa femme. A peine a-t-il ciblé un potentiel rival que celui-ci est...

le 19 mai 2016

50 j'aime

8

L'Été meurtrier
Ticket_007
7

"Identification d'une femme"... vengeresse !

"L'Eté meurtrier" est resté à l'état de projet trois ans. Le temps qu'Adjani se fasse à l'idée d'endosser les habits d'une jeune femme ayant pour caractéristique sautant aux yeux de ne porter que des...

le 3 oct. 2015

43 j'aime

13

Les Ailes du désir
Ticket_007
9

Envolées en "eaux profondes" du Moi

Attention, chef-d'oeuvre ! Attention, danger ! Parce que "Les ailes du désir" est un spectacle anti-spectaculaire au possible, pour approcher cette vérité inconfortable : vivre en le sachant. On sort...

le 16 juin 2016

40 j'aime

22