Douze tableaux, soit douze scènes de vie d'une jeune femme à Paris. Elle cherche sa liberté mais elle est ruinée. Elle joue de son charme avec les hommes pour combler son manque de domicile fixe et oublier (un charme parfaitement retranscrit à l'écran par les regards caméras saisissants d'Anna Karina). Elle devient alors prostituée, d'abord avec beaucoup de pudeur puis elle s'affirme, sans trop savoir si elle ressent du bonheur.

Les différents tableaux qui découpent le récit sont séparés à l'aide de cartons sobres (noir sur blanc), décrivent simplement les mots clés de la scène à venir. Ce découpage brut et sommaire illustre froidement la vie de la jeune femme et reflète totalement les échanges dénués de toute humanité avec ses clients.

Les mouvements de caméra de Raoul Coutard, dans le contexte de l'époque, sont tout bonnement jouissifs de fraîcheur. Anna Karina filmée de toutes les façons : de profil, de face, en lumière, en contre-jour... On la scrute physiquement de manière tellement riche que l'on parvient à identifier son malaise et sa fragilité assez facilement. Des emprunts cinématographiques (beaucoup), où Godard cherche notamment à recréer des plans et des ambiances façon Fritz Lang (je pense notamment à cette contre-plongée dans une cour avec deux enfants qui s'amusent) et des petits clins d’œil amusants avec l'affiche de "Une femme est une femme" dans le bistrot ou encore la queue devant le cinéma affichant le tout dernier "Jules et Jim" de l'époque.

Certaines bricoles de dialogues répétés, ou frôlant parfois l'absurde de situation (l'homme imitant un enfant et son ballon de baudruche) m'ont dérouté et je n'ai pas très bien saisi leur intérêt, bien que cela ne soit pas le premier film de Godard m'ayant troublé.

Mais Vivre sa Vie, c'est aussi une séquence culte et spontanée de débat philosophique dans un bistrot, une célébration de l'art, de la poésie et au final de la vie elle-même. 85 minutes de pur cinéma riche, honnête et pur.
Basile_Roussièr
9

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Créée

le 4 nov. 2014

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