Voyage à Tokyo est le film qui a fait connaitre Yasujiro Ozu dans le reste du monde, et j'avoue en être ressorti lessivé d'émotions, car il parle de la place des parents quand les enfants deviennent adultes.
Un couple âgé est invité chez leurs enfants, qui travaillent et ont des vies de famille, mais ils se rendent comptent peu à peu qu'ils gênent, ils sentent que leur présence tient plus du boulet qu'autre chose. Sauf pour leur belle-fille, jeune veuve de leur fils mort à la guerre...
Il faut dire qu'en 1953, le sujet était étonnamment moderne et audacieux, presque brisant un tabou au sein du Japon. A savoir que parents, ainsi que leurs enfants, leurs gendres, leurs petits-enfants, peuvent ne plus vivre sous le même toit, et qu'il est question d'émancipation, ce qui pourrait difficilement se faire en vivant tous sous le même toit. Mais tout cela est montré avec douceur, tendresse, où la caméra semble placé comme si nous étions un témoin invisible, c'est vraiment sublime.
Quant aux acteurs, on retrouve plusieurs d'entre eux qui ont déjà travaillé avec Ozu, dont le père joué par Chishū Ryū, la mère Haruko Sugimura, et bien entendu, son actrice fétiche, la divine Setsuko Hara, qui joue cette jeune veuve dont le mari est décédé depuis longtemps, mais qui reste encore attachée à sa belle-famille, et qui va être en quelque sorte celle qui va sortir ses beaux-parents de la torpeur. On retrouve même du Marcel Pagnol dans la partie du film où un de leurs fils leur offre un séjour dans une station balnéaire, comme s'il ne les voulait plus dans ses pattes, où les dialogues se font souvent drôles, mais également empreints d'une certaine mélancolie.
Ajoutons à cela une conclusion vraiment bouleversante, où les liens les plus fort ne sont pas forcément ceux du sang, et on a là un chef d'oeuvre absolu.