Souvent, quand les gens disent qu’une comédie romantique était « mignonne », c’est généralement de manière péjorative, pour expliquer que voilà, c’était sympa, mais que ça ne cassait pas trois pattes à un canard. Pourtant, il y a des films qu’on qualifie de mignon pour le sens premier et noble du terme, et When a Wolf Falls in Love with a Sheep en fait partie. Le deuxième film du taïwanais Hou Chi-Jan, découvert en 2005 avec son documentaire Taïwan Black Movies, est une romance qui bouillonne d’énergie et d’espoir, un film traitant de la nostalgie qui nous explique que cette nostalgie doit parfois rester derrière nous et qu’il faut aller de l’avant. C’est surtout un film plein de légèreté qui fait du bien par où il passe. Et en ces temps obscurs de Covid, guerre en Ukraine et autres élections présidentielles, c’est presque une bénédiction.


When a Wolf Falls in Love with a Sheep est un film qui va tourner autour de ses personnages, et on sent que le réalisateur Hou Chi-Jan leur porte une réelle affection. Tung et Yang sont tous les deux des rêveurs et c’est cette part de rêve qui va définir le ton du film ainsi que sa mise en scène. Par exemple, après que Tung se soit fait larguer, sa vie connait des ralentissements, des stops, des redémarrages, et le réalisateur va illustrer cela en ayant recours au stop motion pour le représenter visuellement. D’ailleurs, When a Wolf Falls in Love with a Sheep va être un terrain de jeu pour Hou Chi-Jan qui va aller d’expérimentation visuelle en expérimentation visuelle. Stop motion avec les acteurs, mais pas que : décalage temporel, dessins qui vont s’animer, angles de caméra inventifs, … On pense parfois au cinéma de Michel Gondry, au cinéma de Wong Kar-Wai, l’héroïne interprétée par la jeune Jian Man-Shu semblant renvoyer à celle de Faye Wong dans Chungking Express, par son look, et même parfois par sa façon d’être. Mais on pourrait y avoir également du Amélie Poulain, pour les actions qu’entreprennent certains personnages. Il y a les petites manies (l’un d’eux adore respirer l’odeur des photocopies toutes fraiches), mais aussi des actions envers d’autres personnes, comme notre héros qui a perdu sa fiancée et qui se lance pour mission de ramener des objets perdus à leurs propriétaires, c’est un peu sa façon à lui de garder espoir pour que sa fiancée revienne un jour. Citons également le personnage de Yang qui, voyant un parapluie abimé abandonné, va le ramener dans un panier rempli d’autres parapluie afin qu’il trouve une nouvelle main, car elle-même se sent seule et en souffre. Car When a Wolf Falls in Love with a Sheep est surtout une histoire sur les ruptures et les nouveaux départs, une histoire alimentée par l’optimisme plutôt que par l’angoisse et la dépression, et il va pour cela pencher vers la magie et la fantaisie. C’est entre autre pour cela qu’il va s’élever au-dessus de la masse de toutes ses rom-com interchangeables.


Il n’y a jamais de fantastique, mais pourtant l’ambiance du film nous donne parfois cette impression d’irréel, de poésie, de décalage. Contrairement à beaucoup de comédies romantiques pour adolescents, il n’y a pas ici de méchant, ou de rival un peu pédant, ni même de « confrontation » amoureuse à la fin. Non, When a Wolf Falls in Love with a Sheep est juste un film ancré dans la vie émotionnelle de ses personnages principaux. Ils seraient parfaits l’un pour l’autre, mais ils ne s’en rendent pas compte, parasités qu’ils sont par le souvenir de leur ex et l’espoir qu’ils reviennent un jour. Aucun d’entre eux n’envisage un avenir romantique avec l’autre, l’affectation naissance entre eux va s’épanouir dans les interactions qu’ils vont avoir chacun de son côté avec les personnages hauts en couleurs qui peuplent le film. Ces personnages secondaires sont également une réussite, parfois intriguants (l’ancien alcoolique devenu prêtre, le vendeur masqué de riz frit), parfois barrés (le patron de Tung, l’amie de Yang), parfois touchants (la tante « riz collant » qui a perdu son chien). Les acteurs/trices sont naturels, ils rendent leurs personnages crédibles grâce à leur excellente performance. Et puis il y a ces dessins de mouton et de loup, qui vont être le fil conducteur du film et, en quelques sortes, le moteur de l’histoire. Ils sont des personnages à part entière. When a Wolf Falls in Love with a Sheep ne va jamais s’attarder sur la situation de la jeunesse à Taïwan, sur les pressions et les défis auxquels elle est confrontée. Il préfère s’attarder sur le côté plus léger de cette relation qu’entretiennent Tung et Yang, toujours à la limite de la mièvrerie mais sans jamais y tomber dedans, et c’est tant mieux car il en résulte un très joli petit film.


When a Wolf Falls in Love with a Sheep est un film qu’on savoure comme un bonbon tout doux, qui nous met le smile, et qu’on apprécie grandement qu’on aime ou non les comédies romantiques. Oui, When a Wolf Falls in Love with a Sheep est une très belle réussite.


Critique originale avec images et anecdotes : https://www.darksidereviews.com/film-when-a-wolf-falls-in-love-with-a-sheep-de-hou-chi-jan-2012/

cherycok
8
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Créée

le 4 mai 2022

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cherycok

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