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Il s’appelle Michiel. Treize ans. Et il glisse. Lentement, sans bruit, sans appel. Dans la fange grise d’un village néerlandais où les arbres sont plus bavards que les adultes, où le silence des bottes a plus d’écho que les sermons de son père. Ce père-là — maire à la mine neutre, qui compose avec l’occupant — n’a pas de moustache, pas de fouet, mais trop de raisons. Trop de prudence. Trop de compromis pour sauver la paix. Alors Michiel se cherche un héros — et le trouve, cabossé, planqué dans la forêt : un pilote anglais à la jambe cassée, planqué comme une balle dans la neige, comme un rêve dans un pays qui a oublié comment respirer.
Ce n’est pas un film de guerre. C’est un film de guerre intérieure. Un désapprentissage du confort moral. Une fable en charpie, dans laquelle les repères s’effondrent au fil des pas. Comme dans Come and See d’Elem Klimov ou le Empire of the Sun de Spielberg, les enfants ici sont des baromètres du chaos. Leur regard pèse plus que tous les tanks.
Lellouche avait Le Grand Bain, Koolhoven a la boue jusqu’aux joues.
Il ne neige pas : il tombe du blanc sale. Il ne parle pas : il racle les silences. Il ne vieillit pas : il mutile doucement sa propre innocence.
La caméra ? Elle suit. Pas trop près. Pas trop propre. Lumière délavée, palette sourde, plans trop larges pour rassurer. Tout est en creux. Tout est en perte. L’image elle-même semble contaminée par la honte de ne pas pouvoir crier.
Et pourtant, il y a du cinéma. Du vrai. Du sensoriel. Le montage racle la peau, la musique de Donaggio effleure les nerfs. Pas pour sublimer. Pour fissurer. Les dialogues suintent la retenue. L’acteur, Martijn Lakemeier, ne joue pas : il accuse. Il absorbe. Il trahit ses propres attentes, jusqu’à devenir un adulte sans prévenir.
Le film ne cherche pas à dénoncer. Il laisse la boue parler. Et c’est pire. Parce que ce n’est jamais spectaculaire. Jamais cathartique. C’est précis. Cruel. Étouffé.
Pas de grandes batailles, juste des petits renoncements. Pas de héros, juste des décisions. Michiel aurait pu fuir. Il a choisi de rester. Ou d’avancer. Ou de tomber. On ne sait plus trop. Il est devenu résistant non pas contre l’Allemand — mais contre le flou. Contre les adultes.
Winter in Wartime est un film sur ceux qui grandissent trop vite. Sur ceux qui n’ont pas choisi la guerre, mais qu’elle choisit quand même. Comme une morsure qui s’infecte dans l’âme.
Pour ceux qui savent que l’innocence ne revient jamais. Pour ceux qui n’ont pas besoin de bruit pour entendre la peur.