Etrange parcours que celui du canadien David Hayter qui passe pour la première fois de sa vie à la réalisation avec Wolves. Il commence une carrière d’acteur dans les années 80 en prêtant sa voix d’enfant pour la diffusion de mangas japonais – alors en plein essor – dans son pays et évoluera au fils des ans en passant enfin devant une caméra live dans les années 90, tout en continuant à faire du doublage dans les dessins animés et surtout les jeux vidéos : le « John – Big boss » de Metal Gear, c’est lui !


Puis il deviendra le scénariste attitré de X-men (d’autres sont impliqués avant lui dans l’écriture comme Christopher McQuarrie) et fort de ce succès, David Hayter participera au scénario du Roi Scorpion (2002), de X-men 2 (2003), de Watchmen (2009) et enfin de Wolves (2014), projet datant de 2010 sous le titre Slaughter’s Road, film personnel qui sera co-produit par le Canada et la France.


En droite lignée d’un genre traditionnel que j’affectionne tant, l’introduction rentre dans le vif du sujet en allant directement à l’essentiel : portée par une petite tonalité dramatique et intimiste, la mécanique bien huilée annonce un divertissement qui s’assume dans lequel on rentre très facilement. Ainsi, le jeune, beau et athlétique Cayden (Thomas Till) se retrouve vite à écumer les routes quand il charcute par mégarde ses parents et sa petite amie sous l’emprise d’une pulsion toute nouvelle qu’il ne maîtrise pas du tout.


Si le passage de l’adolescence à la vie d’adulte n’est pas franchement nouveau comme traitement pour faire du mythe du loup-garou cette période charnière de tout être humain, la mise en scène efficace et la photographie plutôt soignée comblent habilement cette absence de réelle originalité qui semble franchement secondaire, voire anecdotique, à ce niveau là de l’histoire.


La voix off du protagoniste accompagnant les images permet donc de poser assez rapidement le premier acte avant qu’il débarque à Lupine Bridge, lieu ou se déroulera toute l’action de Wolves. Cayden s’y rendra sous les conseils d’un redneck au visage salement amoché répondant au doux nom de Wild Joe qu’il rencontre un peu par hasard … ou pas.


De cette ville, nous ne connaîtrons que son bar et la ferme du vieux Tollerman, un père de substitution qui parle comme Gandalf le gris et fume la pipe comme un hobbit. Véridique ! La deuxième partie peut enfin commencer. Malheureusement, les clichés et les facilités de scénario, qui ne gênaient pas trop jusqu’à présent, auront raison de moi et finiront par gangréner beaucoup trop l’intrigue pas franchement passionnante et que l’on connaît hélas ! par coeur.


En effet, les décors champêtres et forestiers de Lupine Bridge, qui évoquent à la fois les westerns et un retour au source pour Cayden, ne sont le théâtre d’aucun enjeux vraiment captivant et on se lassera très vite de toutes ses révélations et cette galerie de personnages archétypaux, aussi sympathique soient ils. SPOIL : S’appuyant sur le modèle du parcours initiatique ou le protagoniste se révélera à lui même, David Hayter ne fera qu’appliquer sans style et sans finesse le récit typique du héros devant tuer le père afin de libérer les habitants apeurés et dominés de son autorité. FIN DE SPOIL !


C’est à se demander comment le scénariste des X-men a pu à ce point manquer d’inspiration et de bon sens pour rédiger un tel scénario ! Il tentera maladroitement d’incorporer un twist pour surprendre le spectateur dans son final, mais mordu profondément par la fatigue trois quart d’heure avant, aucune surprise, quelle qu’elle soit, ne viendra perturber mon ennui profond puisque même l’ultime scène d’action est loin d’être la plus réussit.


Malgré sa mauvaise haleine, Wolves a visuellement de la gueule et du mordant ! Rien de bien transcendant, mais la mise en scène frontale et le montage bien nerveux parviennent aisément à combler un budget modeste qui ne peu pas offrir de scènes vraiment spectaculaires. Dommage que l’histoire soit tellement conventionnelle car le casting est lui aussi loin d’être ridicule : le bestial et charismatique Jason Momoa (vu dans Conan, Du plomb dans la tête mais surtout Game of throne) en chef de meute est parfait et Lucas Till possède un charme angélique et une allure sauvage qui rivalise bien avec le physique herculéen de son antagoniste.


Vers la fin du film, je n’ai pas pu m’empêcher de penser à The Wolfman (2010) de Joe Johnston sortit cinq ans plus tôt. SPOIL : Lui et ses scénaristes étaient vraiment parvenus à offrir une relecture intéressante et originale du mythe du Loup-garou avec une bien meilleure confrontation père/fils, tout en rendant un bel hommage aux productions de la Hammer. Le Wolves de David Hayten a des allures de chiens mouillé quand on ose soudainement la comparaison. FIN DE SPOIL !


Et pourtant, à bien y repenser, il y avait de quoi faire un bon film de genre sévèrement burné avec cette bande-originale très rock, son décor en milieu naturel et cette volonté de faire vivre un univers sudiste transpirant la sueur et la chair à l’écran. Mais non, le spectateur rentrera bredouille de sa chasse aux sensations fortes. A moins de vouloir passer modestement une bonne soirée pizza-bières entourée de ses potes un samedi soir, il y a peut être moyen de bien rigoler et de le prendre pour ce qu’il est.


Bref, rien de bien neuf au pays des loup-garous ! Je me suis tout de même consoler sur le sympathique making-of qui nous invite à pénétrer les bureaux et ateliers où ont été créé et conçu toutes les prothèses (d’excellentes factures !), maquillages et costumes du film. Plusieurs techniciens et artisans parlent de leur travaux, des choix artistiques qu’ils ont opéré et David Hayter revient lui même sur sa volonté de faire un film de loup-garou qui sorte vraiment de l’ordinaire. Si ses intentions sont louables, le cinéaste ne réussit aucunement à dépoussiérer un des mythe les plus emblématiques et iconiques de la culture populaire.

Mathieu_Babhop
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le 18 août 2016

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