Wonka
6.2
Wonka

Film de Paul King (2023)

Willy Wonka fait parti de ces rares personnages adaptés au cinéma qui rajeunissent à mesure qu'ils font leur apparition dans un nouveau film.

Originaire du célèbre livre de Roald Dahl sorti en 1964, il se voit premièrement représenté à l'écran, 7 ans plus tard, en tant que soixantenaire bipolaire joué par le génial Gene Wilder. En 2005, le chocolatier fou revient à la charge avec pour acteur le mythique Johnny Depp qui enlève 20 ans d'âge à la première adaption. Finalement, dans cette réadaptation de Charlie et la chocolaterie flamboyante et chantante, le jeune adulte Timothée Chalamet nous interprète les prémices de la carrière du chocolatier le plus connu au monde (sans rancune chers lecteurs suisses).

Wonka nous conte donc l'histoire de ce chocolatier, inventeur et magicien éponyme, génie de la fève de cacao qui a l'absolue conviction d'ouvrir une chocolaterie en souvenir d'une promesse qui lui fut faite durant sa (pas si) tendre enfance. Un généreux personnage qui n'hésite pas à donner pièces par pièces toute sa fortune aux habitants de la ville dès son arrivée, en dépit de trouver une chambre pour dormir. Une ville qui, a contrario, ne lui rend pas du tout l'appareil. Que ce soit à cause d'un cartel de chocolatiers, de policiers corrompus, d'amphitryons malintentionnés ou encore d'une simple affiche déclarant "Interdit de rêvasser", tout semble aller à l'encontre de ses rêves et de la notion même du rêve.

Dans cette atmosphère glaciale, les plus démunis sont obligés de mendier afin de s'assurer une chambre pour la nuit, seule assurance de ne pas mourir gelé. Les plus riches, eux, contrôlent le chocolat, et qui dit contrôler l'or marron dit contrôler le pouvoir de toute la ville (c'est bien connu). Bien que rivaux d'apparence, ils n'ont aucuns problème à se mettre d'accord sur deux points indistubales :

  • Willy Wonka doit plier bagages
  • Le terme "pauvre" ça fait vomir.

Il y a un petit élément solitaire mais qui m'a fait beaucoup rire dans ce film, c'est le fait que les deux seuls personnages ayant les dents jaunes (l'adorable duo d'hôtes) sont aussi les deux seuls à ne pas manger de chocolat, eux qui se rassasient exclusivement de pièces et de billets. Un détail minime mais qui affirme tout de même encore plus l'aspect social de l'histoire de Dahl qui veut mettre en lumière la lutte des classes et dénoncer l'hégémonie de la richesse.

Au-delà du respect apporté au récit du livre (hormis peut-être cette approche trop positive et joyeuse du personnage de Wonka), le film est une comédie musicale irrésistible qui a su rassembler avec brio le manichéisme de l'œuvre de Mel Stuart et la fantaisie de celle de Tim Burton créant une fusion qui se ressent durant tout le métrage. Le cadre est un mélange entre l'artificialité des décors propre aux années 60-70 (représentation par excellence du kitsch) et les effets visuels novateurs du début du 21e siècle. Le Willy Wonka de 2023 s'inspire aussi bien de l'exubérance du personnage de Gene Wilder que la rêverie humoristique de celui de Johnny Depp.

Et pour ce qui est des musiques, on ne peut pas être mieux servi. Si nous appréciions entendre une fois de plus la cultissime marque de fabrique auditive qu'est la musique des Oompa Loompa, il est très plaisant de découvrir de nouveaux titres qui se savourent différemment selon les spectateurs (pour ma part, j'ai flashé sur "Scrub Scrub" !!). Le tout est accompagné de superbes chorégraphies, pas forcément très académiques mais d'une inventivité remarquable (on pensera notamment à cette scènes dans le zoo avec les ballons d'hélium).

Ces dernières sont d'autant plus magnifiées par les lieux de tournages qui, tenant à cœur le réalisateur, parcourent toute l'Angleterre. On y retrouve la ville de Bath rappelant la renaissance italienne, la Rivoli ballroom Broclkley a Londres avec sa touche vintage et colorée, le bord de mer de la station balnéaire de Lyme Regis ou encore les murs d'Oxford et de la rue historique Catte street.

On appréciera enfin les quelques références faites aux anciennes comédies musicales telle que Marry Poppins et la fameuse marche en canard du personnage de Bert, toujours accompagné de sa canne.

Côté acteurs on est servi par un casting 5 étoiles où les comédiens sont d'ailleurs les victimes de références subtiles faites à leur filmographie personnelle, comme pour nous rappeler la richesse de la cinématographie anglaise. On remarquera principalement cette scène où le personnage de Timothée Chalamet a le regard tourné dans notre direction, fixant le feu de cheminée illuminant son visage, qui nous rappel ce même regard émouvant de minutes interminables à la fin de Call me by your name. Il y a de plus Rowan Atkinson qui, dès sa première apparition, ne pourra pas s'empêcher de faire presque machinalement ses très célèbres mimiques de Mr Bean. Mais aussi Sally Hawkins qui joue, à l'instar de Paddington 1 et 2, une mère aimable et tendre toujours emmitouflée dans ses écharpes. Pour ce qui est de Hugh Grant, j'avoue ne pas me souvenir d'un film où il apparaît en tant que nain orange aux cheveux verts et converti au vol... Peut-être que le film en question est sorti seulement à Oompaland, ce qui expliquerai ainsi pourquoi il m'aurait échappé...

Outre la prestation de Timothée Chalamet qui semble survoler trop brièvement les caractéristiques dramatiques de son personnage, une des quelques déceptions que j'avoue avoir ressenti durant le visionnage est à propos de la performance de Hugh Grant qui, par le biais de la VFX, ne se contente que de simples expressions faciales plutôt creuses. Du moins pas aussi excentriques et caricaturales qu'on pourrait se l'imaginer d'un petit homme vert chapardeur venant d'une île lointaine.

Wonka est une promesse tenue. C'est ce que l'on attendait exactement de la part de Paul King qui, au bout de son 4e long métrage, semble affirmer une fois de plus un sans-faute dans sa filmographie. Ses œuvres sont d'une justesse exemplaire dans ce que doit être un film familial : une comédie (musicale) qui aborde le thème de la famille, de la confiance, du courage, de l'amour, de l'espoir et un brin de folie, le tout proposant différents degrés de lecture et un panel de couleurs infini pour continuer de faire rêver petits et grands.

Et surtout rappelez-vous bien d'une chose : Le secret d'une bonne séance c'est pas le film, mais ceux avec qui on le regarde.
(non en réalité c'est le film, mais bon...histoire d'être raccord)

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le 24 déc. 2023

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PabloEscrobar

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