Adapté du roman de Kan Shimozawa qui aura déjà donné naissance à de nombreux films entre 1962 et 1989, Zatoichi est la tentative du cinéaste Takeshi Kitano de proposer un long-métrage apte à réunir un public plus large, de s'essayer à un cinéma plus commercial, avant de se plonger dans une trilogie bien moins accessible.


Rendant un vibrant hommage au chambara et surtout au personnage immortalisé à l'écran par Shintaro Katsu tout en se le réappropriant, Takeshi Kitano parvient à conserver un univers qui lui est propre, où viennent se mélanger violence sèche et soudaine, mélancolie, poésie et humour pince-sans-rire. Un cocktail qui fonctionne parfaitement, le cinéaste dosant parfaitement ses effets si l'on excepte quelques longueurs et un recours dommageable au sang numérique.


Endossant la mythique défroque du masseur aveugle avec un réel talent, alliant espièglerie et vivacité aussi bien physique que psychique, Takeshi Kitano choisit pourtant de laisser son héros en retrait, d'en faire principalement le catalyseur d'une époque violente et difficile, broyant l'individu tel une vulgaire brindille. Le film se construit ainsi autour d'une poignée de personnages tour à tour dangereux, mystérieux et attachants, dont la destinée tragique trouvera son apothéose par le biais du personnage principal.


Si les inévitables séquences d'action bénéficient d'une mise en scène soignée et de chorégraphies efficaces, les rendant aussi brèves que fulgurantes, la véritable force de Zatoichi se trouve finalement davantage dans ses protagonistes, ainsi que dans l'anachronisme qui imprègne tout le film. Abordant son long-métrage comme une sorte de comédie musicale, Kitano apporte à l'ensemble une certaine folie douce, renforcée par l'incroyable travail de Keiichi Suzuki sur la bande sonore en lieu et place d'un Joe Hisaishi en bisbille avec le cinéaste.


Aussi dévoué au matériau qu'il adapte que furieusement contemporain dans son exécution, ce Zatoichi nouveau est une réussite de plus à l'actif d'un cinéaste passionnant, dont il me reste cependant à voir tout ce qui a suivit cet hommage aussi bien sanglant que drôle et poétique.

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le 17 juil. 2016

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Gand-Alf

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