Pas du tout amateur du registre formel adopté par le célèbre documentariste états-unien Alex Gibney, qui sous prétexte d'aborder le sujet des opérations d'ingérence informatique développées par les USA à l'encontre de pays ennemis, se perd un peu dans une mise en scène un peu putassière, très académique dans sa façon de révéler peu à peu des informations dans une logique de grand spectacle. Pourtant le fond est là, et ce en grande partie grâce aux révélations de Edward Snowden (qui sera à peine mentionné une fois) : déjà, en 2010, États-Unis et Israël collaboraient secrètement au travers d'un projet de cyberattaques contre le programme nucléaire iranien baptisé Opération Olympic Games, via la National Security Agency américaine et l'unité 8200 israélienne. La figure de proue de cette opération étant le développement d'un ver informatique appelé Stuxnet.
"Zero Days" montre bien la continuité en matière de décisions politiques entre l'administration Bush et l'administration Obama. Au final le documentaire s'intéresse très peu à la composante politique de l'affaire, alors que c'est à mes yeux la chose la plus importante et scandaleuse, en préférant se consacrer aux aspects informatiques et en faisant intervenir de nombreux spécialistes de la sécurité des systèmes d'information comme Symantec. Ce qui intéresse majoritairement l'essentiel des intervenants, ce n'est pas du tout la condamnation des pratiques politiques états-uniennes, mais plutôt les préoccupations en matière de retour de flammes : ce malware surpuissant et pas toujours contrôlable pourrait très bien se retourner contre eux, que ce soit par sa propagation chaotique à l'international ou son utilisation en représailles par l'Iran.
Le plus drôle, au sens le moins maîtrisé, arrive dans les dernières minutes, quand une intervenante anonyme conclut son propos sur la révélation d'un plan de plus grande ampleur nommé Nitro Zeus, sans élément consistant pour l'étayer, ainsi que sur la signature à l'époque du traité visant à réguler le programme nucléaire iranien. Et Hillary Clinton déclarant que jamais les USA n'avaient été impliqués dans une telle manœuvre... Dix ans plus tard, Mahmoud Ahmadinejad et George W. Bush appartiennent au passé, mais la géopolitique n'a pas changé.