La beauté de la colère

Pour commencer, Asura's Wrath n'est pas un bon jeu. Comme déjà dit un peu partout, il n'est composé que de QTE sans enjeux, de phases de shoot sur rail inutiles, ou encore de combats façon beat'em all sans reliefs.
En tant que joueur donc on s'ennuie ferme, et on pestera contre des combats trop longs et à quelques exceptions près chiants.

Pourtant... Pourtant Asura's Wrath dépote largement dans sa mise en scène et dans son objectif de nous présenter un personnage avec une volonté et une rage incommensurable.
Effectivement plus proche d'un anime dans son découpage et sa construction, le jeu met l'accent sur la représentation de la puissance d'Asura, sur sa rage qui ne cesse d'amplifier. A la manière d'un Gurren Lagann, rien n'arrête le gigantisme des situations et l'imagination des développeurs. Mise en scène qui est largement suivie par une OST bien sentie, qui emprunte au répertoire classique et surtout au talent de la compositrice du studio, Chikayo Fukuda.

Au final, cette mise en scène transcende le gameplay aux fraises, le scénario sans grande surprise et la technique un peu faiblarde bien que contrebalancée par un cachet artistique certain.
Plus qu'une sorte de nekketsu bâtard, c'est à mon sens une vraie poésie de la colère et de la volonté qui est faite à travers le personnage d'Asura. La démesure des situations ne donne jamais envie de rire, mais plutôt de rester abasourdi par ces pouvoirs et le déchirement du personnage.
Beaucoup d'animes lorgnent du côté du nekketsu, mais peu à mon sens parviennent à sublimer visuellement une telle philosophie. Après Gurren Lagann, Asura's Wrath m'a fait ressentir ce sentiment.


Mais j'ajouterai une dernière réflexion: pourquoi un jeu vidéo?
Pour moi il n'y a clairement pas de réponse qui justifie un tel choix. Pour faire un bon jeu, il faut que le joueur manipule le jeu, le gameplay, et apprenne à jouer avec les ficelles conçues par le développeur. Le développeur qui veut donc raconter une histoire dans son jeu, doit penser à l'intégrer avec un gameplay intéressant, et c'est sur ce point précis qu'on reconnait un bon développeur.
Or ici Cyberconnect2 a complètement jeté le gameplay, sans pour autant se débarrasser des contraintes du média jeu vidéo. On a donc un Unreal Engine qui tourne péniblement, une faible durée de vie, et une impossibilité de développer une histoire riche (car le genre et le gameplay au ras des pâquerettes ne le permettent pas vraiment). A mon sens, ce non-jeu récolte les défaut du support sans ses qualités. L’œuvre n'en est que plus bridée, et je pense qu'un tel projet en anime aurait eu des chances de mériter un 9/10.
Bref, c'est un peu dommage, mais ce non-jeu mi-anime aux allures de pièce de théâtre virtuelle grandiose aura au moins permis aux développeurs de créer, dans le fond, une belle chose.