Detention, le conte d’une âme tourmentée.

Le survival-horror est un genre popularisé grâce à Alone in the Dark ainsi qu’aux séries de jeux Resident Evil et Silent Hill, qui ont instauré les principaux codes et bases du genre (armes et munitions limitées, vulnérabilité du héros…). De nos jours, le survival-horror est presque absent des grandes productions actuelles, excepté quelques jeux comme Alan Wake. Cependant, la scène indépendante continue de créer des jeux qui innovent, que ce soit par leur style graphique (White Night) ou bien par l’utilisation de mécaniques et de thèmes plus originaux, comme le fait notre sujet d’aujourd’hui, Detention.


AVERTISSEMENT : Au vu des nombreuses scènes dérangeantes voire choquantes que possède ce jeu, je ne le recommande pas aux âmes sensibles.


Detention est donc un survival-horror/Point&click sorti le 12 janvier 2017 développé par Red Candle Games et co-édité par Coconut Island Games. Disponible sur PC, PS4 et Nintendo Switch, le jeu nous place dans la peau de Ray, une étudiante de l’école de Greenwood, qui erre dans son établissement afin de s’en échapper, puisqu’il est menacé par un typhon et hanté par des esprits. Detention se passe durant les années 1960, sous la loi martiale. Cela peut sembler être un détail, mais il aura son importance au cours du jeu.


Une ambiance dirigée d’une main de maître.


L’ambiance, importante pour tout bon jeu d’horreur, est l’une des plus grandes réussites de Detention. Celle-ci tire son excellence de plusieurs facteurs, à commencer par la musique. Composée par Wei-fan Chang, elle se différencie des autres par l’utilisation d’instruments traditionnels de Taïwan, pays d’où sont originaires les développeurs. Selon les développeurs, cela avait pour but de présenter un peu plus la culture musicale de leur pays, en plus de renforcer les émotions provoquées par la narration. J’ai eu personnellement un coup de coeur pour la musique Namo Amit Bha, qui se lance lorsqu’on rencontre l’un des esprits du jeu. On peut ajouter à cela le contexte historique, qui instaure une tension supplémentaire et qui permet aussi d’introduire les thèmes principaux du jeu (que je m’efforcerai de ne pas spoiler, afin de ne pas gâcher la surprise), qui sont pour la plupart assez dérangeants. Enfin, il y a le sound design, qui est d’une immense qualité, en particulier pour les esprits. Ma petite préférence est le bruitage du « Lingered », qui doit faire partie des effets sonores les plus étranges que j’ai entendus dans un jeu vidéo.


Un scénario accompagné d’une narration et d’une mise en scène parfaites.


Le synopsis du jeu paraît assez simple au début : deux adolescents (puis un seul), errants dans une école afin d’éviter le typhon qui menace celle-ci. Cependant, au fil du jeu, on peut reconstituer l’histoire des deux élèves (surtout de Ray, puisqu’elle est l’héroïne), et on finit par effectuer une enquête afin de déterminer la vérité plutôt qu’un voyage pour sortir de l’établissement. Les deux premiers tiers du jeu se concentrent beaucoup sur l’ambiance et les mécaniques horrifiques, et semblent ne pas avoir beaucoup de sens sur le plan scénaristique. Mais, de son côté, le dernier tiers du jeu se concentre sur la narration, et permet au joueur de relier tous les éléments présents dans les passages précédents. Et, pour couronner cette narration et le scénario qui se révèle être d’une grande profondeur, la mise en scène est vraiment un immense coup de coeur. Tous les passages qui se veulent dérangeants possèdent une très bonne mise en scène pour les accompagner, et celle-ci possède souvent plusieurs niveaux de lecture, avec beaucoup de symboles et de possibilités d’interprétations (il en est évidemment de même pour le scénario et pour les excellentes fins du jeu). Personnellement, j’ai adoré la deuxième cinématique qui, en plus d’être le passage le plus glauque du jeu, est aussi le mieux mis en scène.


Un gameplay qui combine efficacement deux genres.


Detention arrive à garder une certaine simplicité dans son gameplay tout en reprenant les principales caractéristiques du Point&click et du survival-horror. Ainsi, le joueur devra résoudre des énigmes au moyen d’objets trouvés au cours du jeu, tout en devant éviter d’alerter les créatures qui habitent les lieux. Pour cela, l’héroïne aura l’aide de petites notes qu’il lui faudra ramasser au cours de l’aventure, ce qui lui permettra de savoir comment outrepasser les monstres et d’avoir des indices afin d’avancer dans sa quête. Je trouve cependant que le personnage principal est un peu lent, ce qui est légèrement gênant à certains passages. De plus, je trouve le jeu assez court (entre 4 et 5 heures de jeu), j’aurais vraiment adoré voir plus de créatures provenant des légendes taïwanaises, même si ce qui est contenu dans le jeu est déjà vraiment excellent et semblera sûrement suffisant pour la majorité des joueurs.


Une direction artistique marquée par de nombreuses inspirations.


Les graphismes de Detention sont très jolis, avec des modèles de personnages, d’environnements et d’objets très réussis. Il y a un mélange entre la 2D et la 3D à certains moments, en général lorsque le personnage observe quelque chose. Au delà de ça, je trouve les créatures très jolies, en particulier l’esprit de la Lanterne, que l’on rencontre dans le chapitre 2. Pour le reste, ce qui ne touche pas aux légendes, les développeurs se sont beaucoup inspirés de photographies, de vidéos et de journaux datant des années 1960-70, ainsi que de certains films issus du mouvement de la Nouvelle Vague Taïwanaise (A brighter Summer day par exemple). Le jeu possède des salles vraiment magnifiques, et tombe même dans le surréaliste à certains moments, ce que je trouve personnellement très joli. Mes salles préférées (esthétiquement parlant) seraient la salle des miroirs et le « chemin » vers le cinéma, qui tranche énormément avec le reste du jeu.


Qualités :


– Une ambiance (très) angoissante du plus bel effet
– Une mise en scène d’une rare perfection
– Une OST mêlant plusieurs genres très qualitative
– Un scénario excellent avec plusieurs niveaux de lecture
– Un gameplay agréable à manier
– Une direction artistique très jolie
– Les légendes taïwanaises soigneusement respectées
– Le dernier tiers du jeu, magnifiquement maîtrisé
– Les fins du jeu


Défauts :


– Personnage assez lent
– Légèrement trop court (4-5h)


En conclusion, Detention a réellement été un coup de coeur, en particulier grâce à son scénario et à sa mise en scène. Le jeu marque par ses thèmes, son ambiance ainsi que par le support des légendes asiatiques. Même si le jeu est assez unique, je vous recommande The Cat Lady, qui reprend à peu près les mêmes mécaniques de gameplay. Je vous recommande évidemment de suivre les développeurs dans leurs deux prochains projets, dont on devrait avoir des nouvelles dans peu de temps : Devotion et Stay with Me.


Cette critique de Detention est tirée de mon blog, si vous voulez y jeter un coup d'oeil (il y a des captures d'écrans et le -très joli- logo en plus, mais c'est tout :p), vous pouvez la retrouver ici !


Detention, le conte d’une âme tourmentée.


Merci d'avoir lu ! :)

MurkyKwak
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le 11 nov. 2018

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