Mirror's Edge
7.1
Mirror's Edge

Jeu de DICE et Electronic Arts (2008PlayStation 3)

Sorti en 2008, on peut dire presque 10 ans plus tard que Mirror's edge vieillit bien tant dans son graphisme que, plus important, son sens du design, sa jouabilité instinctive et son ambiance incroyablement immersive. L'histoire, assez basique, n'est au fond que le prétexte à proposer une sorte de remake ultra moderne et vidéoludique du film Le Fugitif. Sauf qu'ici, les partis-pris font tout le sel du jeu et lui donnent ce petit quelque chose qui en font plus qu'un simple petit jeu.


D'abord le design architectural extrêmement poussé de ses décors, nous propulsant dans une ville à mi-chemin entre un vingtième/début de vingtième siècle propret et un futur rêvé par un architecte maniaque, amoureux tant des codes de couleurs que de géométrie (les diverses captures en dessous parlent d'elles-mêmes). Pour reprendre le strip comique de l'illustrateur Jollyjack de Deviant Art (hop, le lien : Comic strip à lire), "c'est comme de vivre dans un Ipod". C'est clair.


Ensuite, outre son design et ses partis-pris graphiques (décors d'ensemble vertigineux une fois qu'on y est, la couleur rouge qu'on peut activer ou non dans les options pour faire office de marqueur visuel qui peut nous guider sans nous paumer --et croyez moi quand vous courez très vite sur un toit, poursuivis par une bande de furieux, dans le feu de l'action parfois ça aide d'avoir un indice où aller), l'originalité de ce jeu de plates-formes et de s'incarner à la première personne.


Kézaco me disent les non-joueurs ?


Comme dans l'écriture et à échelle plus réduite dans le cinéma (je pense à l'utilisation de la caméra subjective ou du gros plan qui va focaliser également cette dernière), on emploie la première personne, le "je" pour montrer un narrateur qui est également personnage principal et ce, pour nous impliquer à un niveau plus profond. Et puis il y a la troisième personne, le "il, elle". Quand un jeu est à la première personne, il se place donc non pas d'un point de vue extérieur, mais intérieur en plaçant la "caméra" (enfin l'écran de jeu) au même niveau que le seraient les yeux d'un être humain. Ce sont les jeux de shoots à la première personne, les "doom-like" (dont le nom vient du jeu "DOOM" même s'il n'était pas le premier à employer ce mode de jeu) ou FPS (first person shoot'em up) qui ont le plus utilisé cette vision, même si des exceptions sortent du lot telles que Jumping flash par exemple sur PS1 ou ce Mirror's edge.


Encore une originalité au passage, dans les jeux à la première personne, on ne voit jamais vraiment son corps ou à la limite la main qui tient l'arme. Ici, ce sont les bras de Faith que l'on voit (pour désamorcer un ennemi), voire ses jambes lors d'une roulade (et donc l'écran de pivoter intégralement aussi, comme si c'était vous qui faisiez une vraie roulade !) où qu'on regarde au sol.


Evidemment jeu de plates-formes (plus ou moins vu qu'il est mixé avec une forme de Shoot-em up donc) oblige, vous devrez bien calculer vos trajectoires et sauts sous peine de vous écraser constamment comme une vieille chaussette.


La moindre erreur renvoie souvent à la mort, même en jouant en mode facile... Etant donné que vous aurez beau avoir moins d'ennemis à affronter (ou moins tenaces, mettons) mais que le parcours lui ne change pas. Il se complexifie même en un casse-tête fascinant à mesure qu'on se rapproche des derniers niveaux. Car dans leur structure, on a presque l'impression de plus en plus de naviguer dans des puzzles gigantesques en étant non pas une pièce qui s'emboîterait avec une autre, mais chose inédite, juste un passant dans un monde qu'on ne comprends pas et où l'on tente juste de survivre.


D'où une certaine jouissance mêlée d'adrénaline quand on finit un niveau après une course monstrueuse à prendre des virages à droite à gauche, esquiver désespérément les balles en grimpant en haut, en bas, se planquant dans le moindre mètre disponible en dérapant sur le sol après avoir effectué un saut entre deux immeubles...


Il y a aussi le fait que le jeu impose des techniques de déplacements et d'esquives pour survivre qu'on est obligé d'apprendre puis maîtriser de plus en plus pour aller jusqu'au bout. Enfin (et c'est ce qui rend le jeu terriblement addictif) si je ne l'ai pas encore dit, l'immersion est incroyable.


Bien sûr il y a les graphismes, mais aussi le sens du détail visuel et sonore qui rajoute ce petit plus fascinant de réel. Levez la tête, vous apercevrez probablement cet avion dans le ciel qui laisse sa traînée blanche. Quand vous empruntez cette rembarde, regardez rapidement les pigeons qui étaient là s'envoler prestement. A vos pieds, le métro qui passe, indifférent. Dans le niveau d'entraînement, un décor presque laissé tel quel comme si les employés prenaient leur pause du midi en laissant tout en plan. Le bruit haletant de votre respiration après une course. Ou bien ce bruit des voitures qui passent dans la journée, klaxonnent parfois, un marteau-picqueur qu'on entend résonner hors-champ sans savoir d'où ça pourrait venir...


Tout est donc fait pour nous plonger encore plus dans la réalité de ce monde là où parfois, l'aspect irréel rajoute lui, paradoxalement une petite pointe d'onirisme en décalage (qui je rassure, ne nous sortira nullement du jeu. En même temps dans le feu de l'action, difficile de décrocher). Ce sont ces bureaux étonnemment blancs et vides surgis d'une sorte de 1984 décalé qu'on traverse comme un rêve ou cette station de métro trop propre pour être honnête. Et en même temps ça reste dans l'expérience architecturale promise par le jeu cela dit.


Enfin touche finale plus qu'appréciable, la musique du jeu.
Celle-ci, électronique (composée par Solar fields), a le mérite de se fondre dans l'ambiant quand il ne se passe rien ou que l'on reste en mode contemplatif (quand le joueur recherche son chemin en observant bien tous les éléments du décor), et s'accélère brusquement dès qu'il y a de l'action. Elle souligne le jeu sans chercher jamais à en faire trop, ce qui est un point de plus bienvenu.


Sinon que dire de plus mis à part mon avis du coup pas très objectif mais éminemment positif vis à vis du jeu ? Les obsédés de la manette, les mêmes qui torchent une merveille comme Journey (PS3) en 30 mn (ok c'est un "jeu" court quand même mais bon) auront fini Mirror's edge probablement en 8-9 heures. Oui le jeu n'est pas très long. Sauf que si vous faites l'histoire, puis essayez les contre-la-montre, puis essayer d'avoir pas mal de trophées PS3, plus la quête annexe dissimulée dans l'histoire de récupération des mallettes et qu'enfin vous reveniez au jeu régulièrement, ébahis par celui-ci, ben... Il y a de quoi faire en fait.


Au final une perle.

Nio_Lynes
9
Écrit par

Créée

le 31 janv. 2018

Critique lue 135 fois

2 j'aime

Nio_Lynes

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2

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