Rain fait parti de ces jeux poétiques qui tentent en une poignée d'heures de jeu de vous faire oublier les 12.99€ que vous avez investi pour son acquisition.
Rain fait aussi parti de ces jeux qui partent sur un concept original, (à priori) jamais vu auparavant, et qui nous excite toujours au départ sur les possibilités de gameplay et de narration qui peuvent en découler. Le souci est d'en faire un jeu à part entière, et si possible bien.
Pour ceux qui n'ont pas du tout entendu parler du concept de Rain, le voici : vous incarnez un petit garçon devenu invisible, dont sa présence ne peut être trahie que par la pluie qui tombe sur lui, ou les éléments avec lesquels il interagit (les flaques d'eau, les objets au sol...). Tout cela dans la quête de retrouver une fille elle aussi victime de ce phénomène.
À partir de ce concept, on devine facilement les possibilités de gameplay : devenir invisible en se cachant dans un abris, évitez de marcher n'importe où pour rester discret (car oui, il y a de méchants monstres pour pimenter l'aventure)... Et c'est tout ? Plus ou moins. Il y a de petits puzzles nécessitant un minimum de réflexion pour attirer l'attention des monstres, comme déclencher un bruit ou utiliser une poupée comme leurre, mais c'est tout. À côté de cela, on se retrouve avec des interactions classiques dans le genre (faire la courte échelle avec son compagnon, bouger des caisses pour atteindre des obstacles). Mais au final, on se retrouve avec un jeu d'un classicisme assez troublant au vu du concept original. Rajoutons à cela un level design poussant à une extrême linéarité et on se retrouve malheureusement avec un gameplay assez simple, voir simpliste. Dommage.
Néanmoins, est-ce vraiment le cœur du jeu ? Des jeux misant sur une jouabilité minimaliste pour se concentrer sur la poésie, la forme, l'histoire, sont légions, et parfois de grande qualité. Au niveau de la forme, c'est effectivement gagné : une direction artistique de qualité, évidemment centrée sur la pluie, avec des décors fournis, parfois hypnotiques (surtout vers la fin), de jolis effets d'eau... hormis la mise en évidence des personnages par pluie. Ces derniers ont plus l'impression de devenir translucides au contact de l'eau qu'autre chose. Mais passons.
La musique n'est pas en reste, nous accompagnant par de légères mélodies, souvent au piano, et faisant immédiatement penser à du Yann Tiersen. Parfois un petit peu générique, mais tout de même efficace.
Non, au final, ce qui me gêne, ce n'est pas les deux heures de jeux nécessaires pour venir à bout de Rain. Ce n'est pas le second run imposé pour découvrir la vraie histoire (alors que cela aurait pu être fait durant la dernière partie du jeu sans problème), qui n'est d'ailleurs pas folichonne. Non. Mon vrai problème avec Rain, c'est la narration. Un petit peu problématique quand il s'agit d'un jeu poétique, n'est ce pas ? (j'adore les euphémismes)
La narration dans Rain s'exprime plus ou moins sur deux axes : les interactions entre le joueur (le petit garçon) et son compagnon (la fille) et les textes s'affichant pour décrire les scènes. Je ne sais pas si je suis le seul à le penser, mais ces derniers me flinguent absolument tout. Supposés apporter un minimum de naïveté et de charme aux situations auxquelles on est confronté, ces descriptions se contentent à 80% du temps à décrire bêtement la scène en cours, façon "Captain Obvious". Le jeu montre le garçon regardant la fille ? Un texte affiche "Le garçon regarde la fille.". Le jeu met en avant (et en surbrillance) une caisse à pousser ? Un texte indique "Le garçon doit pousser la caisse pour progresser". Pour faire une analogie extrême pour le fun, c'est presque comme si votre mère vous décrivait chaque scène d'un film Disney que vous être en train de regarder. J'ignore si c'est juste moi qui devient un vieux c** ou si je ne suis pas le public visé, mais cette narration est excessivement premier degré, sans la moindre subtilité, et donnant plus l'impression qu'elle est plutôt destinée aux enfants. Après tout, pourquoi pas ? Rain est bien adapté pour être appréciés par les plus jeunes, de par sa simplicité générale. Mais difficile d'être émerveillé, face à ce manque de subtilité.
Bon, vous l'avez deviné, je suis assez mitigé face à Rain. Peut être un peu sévère, puisque en soi, le jeu reste bon et ne souffre d'aucun défaut majeur. L'ambiance mélancolique générale du jeu nous transporte durant ces deux heures (ou quatre, si on veut tout finir). Mais il ne bénéficie néanmoins d'aucun atout majeur, le genre de détail qui vous restera dans la mémoire et qui vous fera associer Rain à une œuvre. Passée la découverte du concept, on continue sans déplaisir à suivre cette aventure, mais sans vrai émerveillement.