Ce qu'on retiendra de Sekiro, en tout cas ce que j'en retiendrais, avant tout le reste, c'est son système de combat. Alors c'est sur qu'en soi, il est moins varié en builds que celui des souls (y a pas vraiment la possibilité de se faire un build pagne+double boucliers), mais il est plus précis, profond et gratifiant. Sans rentrer dans le détail de mécaniques que vous connaissez sans doute déjà, le jeu vous force à toujours maintenir la pression et à créer une ouverture plutôt que d'en attendre une. Espérer achever un boss en restant dans son angle mort n'est plus vraiment une option (sauf pour une petite poignée d'entre eux), et il va falloir aller au turbin pour vaincre. Ajouter à cela des prises de décision devant être rapide en piochant dans une palette de mouvement assez variée (déviation, saut, outil de prothèse,...), cela donne un titre pas forcément plus difficile qu'un souls (selon moi) mais demandant d'être constamment au taquet, même face aux ennemis de base de la deuxième moitié du jeu, sous peine de voir sa barre de vie fondre en une seule mandale. Les ennemis sont pour la plupart très réussi, et l'IA (en combat) ne vous lâchera pas la grappe, faisant de chaque combat contre un adversaire digne de ce nom un duel mémorable. Tout n'est bien sûr pas parfait, notamment quelques mini-boss réutilisés, des ennemis moins bien fichus (quelques boss à angle mort, les sans-têtes ou ces foutus nabots, mais on est loin des mélasses de Dark Souls), une caméra pas toujours au top et une tendance à la confusion quand le nombre d'ennemis se multiplie, mais rien de trop dérangeant, les combats demeurent en général excellents, en particulier contre les boss. Contrairement à ses aînés, Sekiro n'est pas un grand RPG, mais un grand jeu d'action.
A part se foutre sur la gueule (avec honneur), Sekiro nous laissera explorer et s'infiltrer, pour le gros du jeu. Et From Software nous montre encore sa maitrise en level-design, excellent de bout en bout et sublimé par l'utilisation du grappin (dont on ne se servira pas vraiment en combat, une occasion manquée pour certains, mais ça ne m'a pas dérangé), la construction des niveaux rend certains moments de jeux mémorables (comme l'ascension du château, par exemple). L'infiltration, comme on pouvait l'apercevoir dans les vidéos de gameplay, est finalement assez en retrait, et apparaît plutôt comme un moyen utile de désépaissir les rangs ennemis ou grappiller une barre de vie d'un mini boss qui trainait par là. Elle est plutôt intéressante grâce au level design et assez satisfaisante (on peut simplifier des combats quasi insurmontables sinon), mais reste limitée par une IA affreusement basique (assez bien calibrée pour pas qu'on en abuse trop, mais clairement nulle, ça reste assez agaçant de voir l'état dans lequel elle est, comme dans trop de jeux), et une palette de mouvements très modeste. C'est décevant, mais ça reste relativement intéressant (sans atteindre des sommets), et surtout subsidiaire (ça me chagrine un peu, j'aurais bien voulu voir un Tenchu par From Software, mais on ne peut pas imputer ça au jeu). En un mot, c'est sympa, mais c'est pas l'intérêt du jeu. Autre petite déception, la peste du dragon ne sert pas à grand chose; d'un certain côté, c'est pas plus mal (punir une mécanique centrale parait un peu frustrant), mais si c'était pour nous faire payer un impôt à la résurrection toutes les 2 heures, autant ne pas la mettre.
Dans la tradition des Souls, Sekiro nous offre des panoramas et des environnements qui défoncent (surtout dans la seconde moitié du jeu); l'ambiance est formidable, et si les musiques sont malheureusement moins mémorables que celles d'un Dark Souls 3, elles restes très bonnes et sont très bien utilisées; le jeu sait quand faire péter les tambours, et quand se taire pour nous faire apprécier l'ambiance. Entre ça et le level-design, explorer les alentours d'Ashina ne sera jamais une corvée.
Petit point scénar, les persos sont chouettes, l'histoire aussi, et pour la première fois depuis Demon's Souls, on comprend ce qui se passe. On perd un peu en mystère, mais on gagne en enjeu et en clarté, et ça ne m'a pas dérangé, au moins on sait à peu près ce qu'il faut faire pour accomplir une quête secondaire. En parlant de quête, le jeu m'a demandé 26 heures pour le terminer une première fois, et s'il n'a peut être pas la rejouabilité d'un Souls, il y a assez de capacités et de secrets à découvrir pour lancer le New Game Plus qui rehausseras la difficulté d'un cran (voir plus, il y a un mode difficile pour les masos).
Par la finesse de ses combats, la maitrise de son level design et la beauté de ses environnements, Sekiro est pour moi une incontestable réussite. Malgré quelques défauts bien présents, il reste un immanquable si vous êtes sensible à sa proposition de base, que vous soyez fans des Souls ou non (et qu'un challenge assez relevé ne vous rebute pas, rien d'infaisable cependant). Et s'il reste assez éloigné de ses grands frères, il est sans doute celui qui est le mieux parvenu à retranscrire leur philosophie pour moi: buter, analyser, maitriser pour enfin surmonter.