Silent Hill 2
8.6
Silent Hill 2

Jeu de KCET, Team Silent et Konami (2001PC)

Au cours de mes pérégrinations sur SensCritique, j'ai compris que ce qui me passionnait dans la vie, c'était d'en vivre plusieurs. Ainsi, je voyage à travers les histoires, tels le Sandman, rencontrant Nicholas, héros de l'album Metropolis Part 2: Scenes from a Memory de Dream Theater, Apu dans la trilogie du même nom par Satyajit Ray ou encore Winston Smith de 1984.
Sur tout les supports artistiques existants, il en est un qui réunit la plupart de ceux cité au dessus. Il s'agit du Jeu Vidéo, médium artistique réunissant plusieurs types d'art (musique, cinéma,...). Et le Jeu Vidéo, par son mélange artistique, à toute les capacités requises afin de transmettre les émotions qu'il faut. Pourtant, ce dernier n'est pas considéré comme de l'art. Et c'est en cela que c'est une erreur.


La peur est l'une des émotions que j'ai le moins ressenti de toute ma vie. On peut citer les films de Hayao Miyazaki qui, dans mon enfance, avait su me traumatiser, mais là, je part du moi d'aujourd'hui, majeur et bachelier, qui devant un film d'horreur, ce met à rire à cause du grand ridicule qu'il y trouve. Même un youtubeur chasseur de fantôme comme GussDx me laisse de marbre. Pourtant, je ne cherche pas à repousser ce sentiment. Il ne vient juste pas à moi.
Je disais donc que par son agencement de mélange artistique, le jeu vidéo était pour moi considéré comme art. Car autant qu'un bon bouquin, le jeu vidéo te fait vivre une histoire à travers les pas d'un personnage. Encore mieux ici, vous contrôlez ce personnage. Vous l'incarnez.


J'avais repéré il y a longtemps en Silent Hill 2 , cet espoir d'être surpris par un scénario incroyable et un twist dont on me revendiqué les mérites. Tiré du livre Crime et Châtiment de Fiodor Dostoïevski, le Jeu Vidéo est une suite de la saga Silent Hill. Mais pas besoin de jouer au premier pour comprendre le second. L'univers est parfaitement compréhensible une fois immergé rien que dans les premières secondes. Ville sombre et brumeuse, emplie de monstre et d'une ambiance sonore terrifiante, bienvenue dans ce qui semble être un jeu d'horreur tout ce qu'il y a de plus convenu. Pourtant, Silent Hill démarre déjà avec une pâte artistique qui fait la différence. Que ce soit par les choix de cadrages (pas de caméra libre ici, on est sur PS2 (ou émulateur pour ma part)), la musique parfois larmoyante, terrifiante ou encore bien rock de Akira Yamaoka, puis l'ambiance sonore, le bestiaire épouvantable du jeu, surtout une fois l'enjeu comprise, ce jeu à tout pour être un produit fait avec une réelle bonne intention.


Je contrôle donc ici la vie de James Sunderland, un homme ayant perdu son épouse trois ans auparavant, et qui se retrouve à Silent Hill après avoir reçu une lettre de cette dernière. On arrive sur ce fameux parking (quasi culte une fois l'aventure complété), et là, une chose frappe. Bien que le jeu soit linéaire, il paraît être un monde ouvert. Pour cause, cette idée de laisser le joueur sans réel indicateur, si ce n'est une carte donnant de rare détails sur des lieux à visiter. Mais sinon, c'est démerde-toi. Ça l'est aussi pour les nombreuses énigmes du jeu, qui souvent ne sont pas évidentes (comment deviner qu'on peut faire une poignée avec un briquet, de la cire et un fer à cheval sans être MacGyver ?). Ensuite, en plus de l'esthétique de la ville où chaque pas est une frayeur (surtout quand s'allume la radio), on note l'importance des lieux principaux. L’hôpital, la prison, l’hôtel ou encore ce jardin terrifiant, chaque lieu est une aventure. On a peur d'y entrer, on est terrifié par les monstres, mais a chaque fois, on veut continuer. On ne veut pas que cela s'arrête. Alors on est content dès que l'on reprend une session.


Ainsi, on rencontre des créatures plus étranges les unes que les autres. Entre le classique monstre en chaire pourri, celui constitué d'une paire de jambes en haut et en bas, puis les sortes de lits sanglants, les infirmières psychopathes, on a l'impression d'être dans un bestiaire classique, mais pourtant porteur de sens une fois le jeu fini. Tout comme les lieux, les personnages ont un sens. On peut alors rajouter l'ennemi du jeu. Celui qui nous suis tout le temps afin de nous jouer de mauvais tour. La tête de pyramide nous suivra toujours dans un but précis. Ennemi d'une grande violence, ce dernier prouvera l'un des seuls gros défauts du jeu (les graphismes datés ne content pas comme un défaut à mon sens), je parle du gameplay des combats. Bien que je triche la dessus, étant donné que je joue sur émulateur, j'imagine tout de même que la pauvreté des combats est la même dans les vrais versions du jeu. Mais pour autant, on s'y fait. Ensuite, une seconde chose est à noter tant qu'on parle de choses plus ou moins vivante. Le jeu nous confronte à quelques personnages des plus atypiques, étant tous plus intriguant les uns que les autres. Que ce soit ce taré de Eddie Dombrowski, l'étrange Maria ressemblant à la femme de James, Mary Sheperd-Sunderland, ou encore la petite Laura et l'énigmatique Angela Orosco, le jeu est remplie d'être humain au passé tous très sombre. Je vous laisse découvrir vous même leur histoire, car chacune en vaut la peine, tous étant lié d'une manière ou d'une autre à James.


Je note tout de même le choc lorsque j'ai du tuer Eddie. L'un de ses moments où le jeu nous force à regretter. Puissant.


Puis aussi le meurtre de Maria par la tête de Pyramide... Mais à plusieurs reprises ?! Ce qui lance alors le jeu dans un délire psychologique de plus en plus intéressant.


On avance dans le jeu munis de différentes armes sur lequel tout notre espoir est fondé. Et lorsque le jeu veut agrandir sa terreur, il ne fait pas de jump-scare, il fait mieux. Il nous oblige par exemple à laisser tout notre matériel dans une armoire afin de passer au niveau supérieur par l'ascenseur fragile. Il nous dégoûte par son environnement et ses ennemis. Il nous force à passer par des endroits inconfortables. Et pourtant, on veut visiter chaque recoin de Silent Hill.
Puis, plus on avance, plus la lettre de Mary disparaît, la fin semble s'approcher et les spoilers avec. On arrive dans une chambre d'hôtel, munis d'une cassette, un magnétoscope branché à une télé. La fin est proche, le twist avec.


Sur la cassette, on découvre que James à tué sa femme. Tout va alors très vite. Atteint par une maladie, ce dernier à décidé de l'achever. Mais il ne se l'est jamais excusé. Il est alors parti à Silent Hill avec l'espoir de la revoir. Puis il s'est caché la vérité à lui-même afin de refuser la mort de sa femme. Et là, tout deviens claire. L'hôpital où à vécu Mary enfermé, les monstres lits que sont le désespoir sur un lit de mort, tête de pyramide qui est le refus et la violence physique et sexuelle de James, les infirmières et leurs seringues, Maria qui est tout ce que n'était pas Mary mais que James voulait. Et encore plein de détails à découvrir en y rejouant.


Car tout à un sens. Surtout lorsqu'on découvre le cadavre de Mary, au début du jeu, dans le coffre de la voiture.


Arrivé la fin, on affronte le refus, on se confronte au suicide (que j'interprète dans le personnage de Angela dans les flammes) puis on se retrouve face à la vérité. Et l'on ré-achève notre amour.


La fin est alors divisé en différentes possibilités selon nos choix.


Partir:
La mienne consiste à laisser partir le souvenir de Mary après un dernière adieu et une lettre, puis quitter Silent Hill, une fin logique et terrible à la fois. Car ai-je réellement accepté cette action ?


Dans l'eau:
Une autre fin fait comprendre le suicide de James, refusant de croire ce qu'il à fait. Un cas de bipolarité qui donne sens au jeu.


Renaître:
Une autre fin présente la tentative de ressusciter Mary. Le refus, une fois de plus.


Maria:
Une dernière possibilité montre la vengeance de Maria, que James décidera de suivre, comme si il espérait y retrouver une part de Mary en elle.


Au final, tout n'est qu’interprétions, mais surtout acceptation ou refus. Car c'est ce qui guidera la fin du joueur. Ce qui fait peur, c'est la psychologie que nous montre le jeu. Celle du deuil auxquels ont fera tous tôt ou tard la connaissance. Et c'est cela qui terrifie dans Silent Hill. Car toute l'ambiance du jeu est construite autour de ce sentiment. Alors on pleure, on sanglote... Et on tremble. On tremble de peur face à la mort.
J'ai beau eu avoir une réaction choc face au twist et une légère frayeur sur les boss de fins, ce qui marque surtout, c'est la lettre. Une lettre interminable sur lequel on reste là, sans réagir, avec juste une boule au ventre.



James... Tu m´as rendu heureuse.



Une fois le générique lancé, on relâche la pression. Certains pleurent, d'autres réfléchissent longuement sans comprendre réellement le sens de leur pensé. Puis l'on y repense. Longuement. Encore et encore. On repense à Silent Hill 2, non pas comme un bon moment, car l'on ne s'amuse pas dans ce jeu, on vit, mais comme une étape d'une existence. On réécoute le morceau de fin Promise, et l'on réfléchi encore si, comme James, l'on aurait accepté ou non. On y repense en pleurant, comme je pleure encore en repensant à la dur expérience auxquels Silent Hill 2 m'a exposé. Celle du deuil que j’expérimentai alors pour la première fois. Tout comme la peur de perdre un être chère.
On dit de l'art qu'il transmet des émotions mieux que le langage. En soit, Silent Hill 2 m'a apprit avant même que je ne les expérimente, ce qu'est le deuil et la mort.


Et en cela, le Jeu Vidéo est un Art.

Créée

le 5 mai 2019

Critique lue 704 fois

3 j'aime

noireau299

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