The Legend of Zelda: Majora's Mask
8.3
The Legend of Zelda: Majora's Mask

Jeu de Nintendo EAD, SRD et Nintendo (2000Nintendo 64)

Généralement moins estimé que son illustre prédécesseur Ocarina of Time (la moyenne des notes données par les utilisateurs de Sens Critique en témoigne), Majora's Mask est en effet moins abordable de prime abord, surtout de par le décompte du temps et le système de sauvegarde voulus par l'histoire. Link a en effet trois jours pour sauver la contrée de Termina d'une Lune qui menace de s'écraser. Trois jours qui équivalent en temps de jeu à 3h, avec un système de sauvegarde permettant de remonter le temps mais en perdant en contrepartie certains éléments de progression. Compliqué et déroutant. J'en ai moi-même fait les frais, et ma première expérience avec le jeu n'était vraiment pas terrible.


Remettons-nous dans le contexte. Je suis encore jeune et innocent, et après m'être pris une de mes premières vraies grosses claques vidéoludiques avec Ocarina of Time, je découvre un peu sur le tard que Zelda n'était pas un one-shot mais une véritable saga avec pleins d'opus déjà sortis auparavant… et également un nouveau, sur la même console et reprenant les mêmes graphismes que Ocarina of Time. C'est donc tout naturellement que ce jeu est devenu une nouvelle priorité pour moi. Seulement, m'y prenant vraiment sur le tard, le jeu était déjà relativement introuvable. Je me souviens encore avoir arpenté beaucoup de magasins d’occaz’ (enfin, dans la mesure de mes possibilités à cette époque), dont un où je revenais régulièrement pour m’enquérir de la présence du précieux jeu dans l’étalage. Toujours en vain, malheureusement.


Comme pour Ocarina of Time, c'est à nouveau ma maman qui m'a sauvé la mise en m'offrant la précieuse cartouche dorée dans sa boîte à un anniversaire. Et je n'ai pas attendu bien longtemps avant de le tester. Oui, il est vrai qu'en découvrant l'existence de ce jeu et en me renseignant dessus, j'avais entrevu cette histoire de décompte de 3 jours, et ça ne me rassurait qu'à moitié, parce que je suis plutôt pas copain avec les trucs chronométrés. Mais d'un autre côté, je me rassurais en me disant que vu la qualité et la jouabilité de son prédécesseur, cela ne pouvait pas être si différent. J'ai vite déchanté. Après avoir passé les premières étapes à l'aide d'une mini-soluce du début du jeu découpée dans un magazine télé, histoire de me mettre en confiance, je me suis donc retrouvé livré à moi-même après avoir récupéré l'ocarina. Je me lance donc seul à l'assaut des marais, en faisant ce qu'il faut pour progresser, jusqu'à me retrouver devant le premier donjon… avec très peu de temps restant. Je rentre alors dans le donjon, n'ai pas le temps de l'explorer à ma guise et me retrouve pris par le temps. Game Over. Et je constate avec effroi que j'ai donc tout à refaire. Complètement découragé, sur les nerfs et au bord des larmes, j'ai abandonné. Avant d'y revenir quelques temps plus tard avec une soluce fraichement imprimée sur Internet. Il s'avéra que, premièrement, j'ignorais complètement l'astuce consistant à jouer le chant du Temps inversé pour ralentir le temps, et deuxièmement, je n'avais pas pigé qu'une fois la statue de hibou débloquée devant le Temple, je pouvais remonter le temps et me téléporter directement devant le Temple sans avoir à refaire toutes les étapes précédentes, histoire d'avoir un cycle complet pour faire tout le donjon. Je ne supportais pas trop l'idée que tout ce que j'avais fait pour le petit singe soit annulé.


Suite à cette expérience, j'ai poursuivi le jeu, toujours avec la soluce sous le coude, par peur que la situation se reproduise, et également parce que je ne voyais pas comment réaliser certaines quêtes annexes sans ; comment savoir qu’il fallait se rendre à tel endroit à telle heure pour interagir avec tel personnage ? J'ai donc progressé de cette façon, avec la soluce, et sans jamais vraiment prendre mon pied ; je n'ai d'ailleurs jamais terminé cette partie. Ajoutez à cela cette atmosphère et ces musiques toujours pesantes et stressantes, et ce jeu me mettait vraiment parfois au bord de la crise de nerf.


Puis un beau jour, bien des années plus tard, je me suis procuré le fameux disque promo Collector’s Edition sur Gamecube. Et après avoir encore usé Ocarina of Time jusqu’à la moelle, j’ai retenté avec appréhension l’aventure Majora’s Mask. Mais cette fois-ci sans soluce (ou presque). Et là, tout a été différent. J’ai vite compris une chose : la première fois, je n’étais pas prêt. J’étais trop jeune, pas assez mâture pour aborder le jeu comme il se doit. Car Majora’s Mask est en réalité beaucoup plus sombre et adulte que son prédécesseur, beaucoup plus subtil également, et d’une richesse jamais égalée dans un Zelda ; mais encore fait-il savoir déceler cette richesse.


Tout d’abord, Majora’s Mask contient bien tous les éléments qui ont fait la popularité de son prédécesseur, ce qui est déjà bien sûr une très bonne base : une histoire et des personnages intéressants, des donjons ingénieux, une progression par interactions avec l’environnement grâce aux objets de l’inventaire, le réalisme des cycles jour-nuit, la possibilité de monter à cheval, etc. A cela s’ajoutent d’autres éléments de gameplay intéressants, dont le principal est bien-entendu constitué par les masques. Tous ont une utilité, des effets différents, et certains permettent de se transformer, apportant encore de nouveaux éléments de gameplay lorsque l’on incarne Link en Peste Mojo, en Goron ou en Zora (pour ne citer qu’eux). Mais qu’en est-il des éléments qui m’avaient découragé de prime abord… ?


Le délai de 3 jours ? Il suffit de savoir gérer le temps comme il faut : ralentir le temps, mettre le masque du lapin pour aller plus vite, remonter le temps au bon moment et utiliser les statues pour se téléporter. En s’y prenant comme il faut, le chronomètre devient tout à fait gérable sans entacher l’instinct d’exploration propre à la saga. Mieux, il offre même parfois de nouvelles possibilités, j'y reviendrais.


Les quêtes annexes, que je pensais impossible sans soluce ? Loin des traditionnelles et rébarbatives quêtes de collecte d’objets, il s’agit ici de véritables histoires dans l’histoire, ce qui les rend particulièrement passionnantes (on retiendra, bien sûr, surtout la quête d’Anju et Kafei). Le principe est donc d’aider des personnages qui ont chacun des problèmes qui leurs sont propres, ainsi qu’un emploi du temps déterminé sur les 3 jours. Ainsi, jamais les personnages tertiaires n’ont paru aussi humains, et donc attachants. Chacune de leur histoire va demander un certain temps à leur consacrer ; il vous faudra parfois même l’intégralité d’un cycle de 3 jours, voir même plusieurs cycles, à leur consacrer pleinement. Les soucis de ces personnages ne sont pas toujours apparents de prime abord, et c’est une véritable enquête qu’il faudra mener autour d’eux. En ça, le journal des Bombers est d’une grande aide, puisqu’il enregistre sommairement leurs emplois du temps respectifs en indiquant à quels moments des interactions sont possibles. Scoop : la soluce n’est donc pas indispensable lorsque l’on comprend bien le principe. Et le coup de génie, c’est l’exploitation de ce cycle de 3 jours répétables dans la résolution de ces enquêtes. Il permet en effet de pouvoir se trouver à deux endroits à la fois à un même moment du cycle, et donc à mieux comprendre et résoudre le problème. Cela permet aussi éventuellement de réaliser des actions différentes, qui auront des répercussions différentes, et il vous faudra toutes les accomplir pour terminer le jeu à 100%. Voilà les fameuses nouvelles possibilités offertes par le principe de chronomètre renouvelable.


Et enfin, comme je le disais, Majora’s Mask est, malgré les apparences, bien plus sombre et adulte que la plupart des jeux de la saga. Cette atmosphère pesante et ces musiques angoissantes ont de quoi stresser un novice, mais elles ne constituent en fait pas un défaut mais une grande qualité du jeu, celle de réussir à très bien retranscrire l’ambiance apocalyptique de ce dernier. Par ailleurs, le thème de la mort est très présent, à tel point qu'une théorie de fans voudrait même que Link soit en réalité mort et qu'on assiste à une aventure sans retour dans une sorte de purgatoire (une variante, que je trouve personnellement plus séduisante, voudrait quant à elle que le personnage ait été psychologiquement touché par sa précédente aventure et que tout cela se passe dans sa tête où il suivrait une sorte de quête initiatique pour remettre de l'ordre dans tout ça). Sans aller jusque là néanmoins, le thème de la mort est cependant bien présent, notamment par ces personnages, explicitement décédés, dont Link prend l’apparence en enfilant leurs masques, incarnation de leur âme apaisée. Mais l’un des aspects sans doute des plus dramatiques du jeu, c’est cette terrible destinée du héros qui pour une fois, est dans la totale incapacité d’aider tout le monde. Que ce soit lors de la quête principale ou des quêtes annexes, tout le bien que vous faites autour de vous se trouve balayé d’un revers d’ocarina à chaque fois que vois remontez le temps. Il va donc falloir avoir les nerfs assez solides pour passer outre la frustration et accepter cette destinée.


Tout ceci fait donc de Majora’s Mask un jeu particulièrement riche, mais aussi relativement éprouvant, demandant un certain investissement de la part du joueur. Il souffrira donc peut-être d’un moins bon potentiel de rejouabilité que son prédécesseur, mais n’en reste pas moins un chef d’œuvre sombre, ingénieux et poétique, trop souvent incompris. J’ai souvent pour habitude de proclamer Ocarina of Time comme étant mon Zelda préféré, mais Majora’s Mask serait alors aux coudes-à-coudes avec lui. En réalité, le ressenti entre les deux jeux est très différent, difficilement comparable. Si je devais juger par la richesse et l’ingéniosité, Majora’s Mask l’emporterait haut-la-main. Comme quoi, il ne faut jamais se fier à une première impression !

Evanizblurk
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le 24 mai 2015

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