Un bon démarrage pour un résultat très mitigé

Assassin's Creed Valhalla était un jeu que j'attendais moyennement. J'aime bien la série sans plus. J'avais beaucoup apprécié le 2 à 9 ans (quelle sensation d'y jouer en cachette!) et plus tard Black Flag, peut-être parce que celui ci s'écartait le plus du carcan fantasque de la série, se préoccupant bien plus d'être un jeu de piraterie qu'un jeu sur la lutte entre gentils Assassins et méchants Templiers.

Valhalla avait un cadre qui m'intéressait: l'invasion Viking de l'Angleterre au 9ème siècle était une période historique que je ne connaissais que peu ou presque pas et j'ai cru naïvement pouvoir en apprendre beaucoup d'un jeu qui se révèlera aussi lisse dans son approche historique des faits que dans ses mécaniques qui n'innovent pas du tout.

Valhalla vous fait incarner Eivor, un homme ou une femme du clan du Corbeau en Norvège, partant en Angleterre en quête de gloire, dans une contrée où les Nordiques se sont déjà bien implantés (Grande Armée Païenne et autres Ragnar Lothbrok). Vous allez tenter de vous y faire une place, entouré par vos camarades Danois et Norvégiens, contre les vilains méchants Saxons chrétiens et fanatiques.

Comme vous pouvez le remarquer dans ce que je viens d'écrire, le jeu manque clairement de nuance et d'objectivité historique: ici, les Vikings sont les gentils. Ils sont fraternels, honorables, poètes, virils, généreux et presque pacifistes à en croire les raids où vous ne tuez aucun civil et ne pillez que des monastères (à en croire que les villages n'ont ni bois ni nourriture à voler) et leurs coffres remplis de richesses abstraites (donc pas de vol direct d'objets religieux et de possessions personnelles, ce qui aurait été autrement plus choquant pour le joueur), loin de la réalité de l'époque, des massacres, des pillages de village, de l'esclavage (grande part de l'économie nordiques du temps), des viols et plus généralement de la brutalité absolue de cet envahisseur qui "colonisait" l'Angleterre, si vous me passez l'expression.

Dès lors, AC: Valhalla n'est plus crédible dans son propos historique. Ne le prenez donc pas comme une quelconque occasion d'en apprendre plus sur l'histoire de l'époque. Les rares personnages qui ne sont pas des caricatures vues et revues ne sont que trop sous exploités dans l'intrigue (notamment Aelfred le Grand, roi du Wessexe).

Que reste-t-il à Valhalla alors ? Le système de combat ? L'histoire ? La pure technique graphique et sonore ? Et bien pas vraiment, mais laissez moi le détailler.

Le système de combat est globalement le même que celui d'Origins: un semi-RPG dans lequel on affronte différents types d'ennemis avec différentes tactiques à adopter pour les vaincre. Au programme, un arsenal comprenant de nombreux types d'armes: haches et marteaux à une main, fléaux, boucliers lourds et légers, épées et haches à deux mains, lances, dagues et arcs.

Vous avez vu? Aucune mention d'épée à une main. C'est normal: il n'y en a aucune. À croire que l'Ulfberht, épée viking par excellence n'existait pas à l'époque, alors que les fléaux et les grandes épées, armes non-existantes à ce moment là sont pourtant bien présentes. Encore une fois, oubliez la fidélité historique, elle est absente. Cette décision étrange vient probablement d'un analyste de données au studio s'étant senti pousser des ailes et proposant à l'équipe de retirer les épées à une main afin que les joueurs puissent expérimenter, au détriment de leurs envies.

Le combat, bien que meilleur que celui d'Origins (je n'ai pas joué à Odyssey plus de 10 heures, j'ai eu l'impression que ce jeu ne respectait pas mon temps), est toujours mou, sans réel impact, trop centralisé sur l'esthétique plutôt que la sensation.

L'histoire principale est celle de votre personnage et de son frère, installés fraichement en Angleterre. La trame suit principalement la relation de cette fratrie et si le reste était écarté, elle se limiterait à une quinzaine d'heures sur l'interminable durée réelle d'environ cinquante. En effet, Valhalla se rallonge artificiellement à grand coups de suite de quêtes dans plus d'une dizaine de territoires afin de "forger des alliances" (comprenez jouer le Béni-oui-oui dans une dizaine d'endroits afin de terminer des quêtes).

Lorsque le joueur passe au delà de l'incipit du jeu et comprend qu'il va devoir faire les mêmes choses dans plusieurs endroits différents, il n'a qu'une seule envie: que tout cela s'arrête. Valhalla est long, beaucoup trop long, si long que le milieu et la fin du jeu deviennent une méditation sur les échecs des mécaniques du jeu: vient un moment où on ne peut plus supporter le système de combat si peu plaisant, où les dialogues sont aussi lents que lourds, où les choses se suivent et se ressemblent.

Vient alors la fin, qui même si elle n'est pas si incroyable, viens ajouter un peu de substance au scénario général de la série qui n'allait nulle part depuis le troisième opus (il y a 8 ans!). Rien de marquant au programme, mais elle reste plaisante si vous appréciez ce scénario, je suppose.

Question technique, le jeu a probablement subis de plein fouet les conséquences du travail à la maison lié à la crise du COVID-19: il n'est pas terminé. Buggé à souhait, un mixage son inacceptable pour un triple A, de nombreux problèmes de clipping, les animations faciales des dialogues consistant à animer une bouche sur un visage impassible, bref, Valhalla est loin d'être une démonstration technique de ce qu'il faut faire en 2020 dans un AAA, et se rapproche plus du contraire. Mais bon, que voulez-vous, il ne vendra pas tout seul en cette période de fin d'année et de sortie de la nouvelle génération de consoles.

Si certains jeux laissent un vide en vous après la fin, Valhalla ne laissera qu'un vide dans votre portefeuille après 50 heures interminables, où vous ne vous serez que très peu amusés, à moins que vous ne trouviez votre compte dans les open worlds d’aujourd’hui dans tout ce qu’ils ont de plus classique. Qui suis-je pour juger ?