Banana Kong
5.8
Banana Kong

Jeu de Gamaga et FDG Entertainment (2013Android)

Banana Kong est un jeu pour android et iOS développé par l'éditeur Gamaga (http://www.gamaga.com/) et publié par FDG-entertainment. Mais pour moi c'est avant tout une œuvre d'art à part entière, un monument vidéo-ludique aux qualités multiples que je vais vous exposez ci-après.


La narration commence par une scénette exposant le quadrumane gourmand que vous allez incarner le temps de quelques stations de métro. Notre héros, gorille de son état, est présenté dans son milieu naturel : une jungle luxuriante et pourvoyeuse de délicieuses bananes. Le bon sauvage de Rousseau, en somme. Mais, à force de se laisser aller à sa consommation de son fruit préféré, le singe - à l'instar de l'homme moderne - en oublie les déchets qui ne cessent de s’accumuler derrière lui. Il est déjà trop tard quand il découvre avec effroi la montagne de peaux de bananes qui s'apprête à s'écrouler sur lui : il faut courir, droit devant. Plein de ressources, notre singe peut néanmoins sauter, planer grâce à son petit parachute, faire des roulades et effectuer des charges. Course en avant figurant bien entendu la fuite consumériste absurde d'homo œconomicus et les externalités négatives qu'on lui connait sur son environnement. Au fur et à mesure de la partie, la course s'accélère, et tôt ou tard le joueur est mis en échec. Mais cette fuite est-elle si absurde que ça ? Contrairement à la plupart des running-games, Banana Kong ne nous propose-t-il pas des objectifs un peu moins frustrants que celui de courir, mourir et recommencer en tentant de battre notre records de distance parcourue ? Tel est l'objet de mon propos que j'articulerai sous quatre axes d'analyse différents :
Le premier traitera de la fuite à proprement parler, de ses contraintes et commodités qui en définissent les lignes mêmes (I).
Les lignes de fuites nous amèneront naturellement à déborder du cadre et à développer en seconde analyse les différents environnements traversés par notre héros (II).
Ces environnements variés constituant le biotope d'animaux solidaires, nous traiteront dans une troisième partie les alliés (III).
Cette analyse nous permettra de conclure sur la juste utilisation de vos pouces opposables dans l'univers des jeux mobiles.


I - la fuite :
Le jeu est donc et avant tout un running game, ce qui inclus la notion de fuite en avant : vous fuyez cette avalanche de peaux de bananes comme l'Homme fuit ses responsabilités. Nonobstant, avec Banana Kong, les auteurs ne nous proposent pas n'importe quel running game. En effet, la fuite est en elle-même d'une variété étonnante, nourrie par des composantes aléatoires, des obstacles et des facilités qui rendent chaque partie unique.
Cette composante aléatoire du jeu est l'expression d'une connaissance parfaite par les auteurs de la théorie du chaos. Vous courrez dans la jungle et devez éviter les différents obstacles qui jonchent aléatoirement votre route à chaque partie. Sur votre passage, vous ramassez des bananes qui, lorsque vous en avez assez, remplissent une jauge de charge vous permettant de traverser certains obstacles en les détruisant. Parabole de la puissance de la science à briser toutes les limites naturelles ? Analysons d'un peu plus près ces limites naturelles que sont les obstacles du jeu.
Ces obstacles peuvent se diviser en deux grandes catégories : les obstacles ralentisseurs et les obstacles stoppeurs. Les premiers sont constitués de tonneaux brisés, de toiles d'araignées, d'essaim de chauve-souris et de différentes espèces d'animaux marins. Ce type d'obstacle peut être traversé sans encombres, mais il ralentira votre course : après plusieurs traversées d'obstacles de ce type et sans utilisation d'une charge, la montagne de peaux de bananes vous engloutira, mettant fin à la partie. Il convient d'aborder ici le cas d' éléments de décors très étranges qui sont les sols dérobés. Au passage du singe, ce type de plateforme s'écroulera, avec pour objectif de faire tomber le coureur dans l'eau ou la lave... mais comme il s'agit d'un running-game, celà n'aura aucun effet sur la course du héros. Une étrangeté qui n'est là que pour intensifier le suspense, probablement.
Les obstacles stoppeurs, quand à eux, mettront fin à la partie d'une manière immédiate. Il s'agit de rochers, de carcasses d'avion, de murs, de statues, de fossiles ou de troncs d'arbres. Nous pouvons aussi citer les obstacles stoppeurs mobiles qui sont les tonneaux roulants et les stalactites. Grâce aux différents mouvements de gameplay, le héros peut néanmoins tenter d'éviter tous ces obstacles : il peut donc sauter (touchez l'écran), planer (maintenez le doigt sur l'écran), faire des roulades pour descendre sur une plateforme inférieure ou pour tomber plus précisément (abaissez le doigt sur l'écran) et enfin utiliser sa jauge de charge pour accélérer ou traverser des obstacles (tracez un trait avec votre doigt vers la droite). Mais ces différents mouvements ne suffiront pas toujours et notre héros aura besoin d'utiliser l'environnement pour fuir toujours plus loin.


Après avoir abordé les obstacles, il convient donc à présent de traiter des facilités offertes au joueur par les éléments du décors. Ils sont constitués par des lianes, des plantes rebondissantes et des courants accélérateurs.
Les lianes sont situées dans la jungle, elles vous permettent de vous balancez. En sautant à la fin du balancement, vus obtiendrez une bonne dose de bananes en bonus.
Les fleurs rebondissantes se trouvent aussi dans la jungle : elles peuvent aider à atteindre des plates-formes en hauteur. Le saut sera plus haut si vous effectuez une roulade sur la plante.
Les arbres rebondissants sont exclusivement situés dans la zone des cimes : ils en constituent la seule plateforme et ont les mêmes propriétés que les fleurs rebondissantes.


II - Les environnements :
Les différents environnements du jeu renouvellent le gameplay et se divisent en quatre zones distinctes : la jungle, la caverne, les fonds marins et la zone des cimes.



  1. la jungle : il s'agit de l'environnement de départ du jeu. C'est à partir de la jungle que vous pourrez accéder aux autres zones. C'est aussi la zone la plus variée en matière d'obstacles. Pour échapper à l'avalanche de peaux de bananes, vous devrez régulièrement effectuer des charges. Cette zone luxuriante est bien évidemment un symbole du jardin d'Eden. D'ailleurs dans le décor vous pourrez apercevoir de temps à autre un serpent, symbole de la tentation. Les auteurs ont-ils voulu ainsi souligner la tentation consumériste qui s'est emparé des hommes pendant les trente glorieuses, période "idyllique" s'il en est ? Les grands temples aux statuaires simiesques et à l'allure de ruines qui apparaitront eux aussi dans le décor ne font que renforcer cette théorie en soulignant l'aspect éphémère de la civilisation consumériste de bananes.


  2. la caverne : On y accède depuis la jungle en effectuant une charge pour briser l'entrée rocheuse qui apparait régulièrement. A pied, la caverne est une zone légèrement plus difficile que la jungle, et elle offre moins de bananes à ramasser. Un avantage assez paradoxal de cette zone est que si vous tombez dans a lave, vous serez éjecté dans la jungle pour continuer votre route au lieu de mourir. On peut en conclure que les gorilles sont des durs à cuire, et que seul l'impact de leur propre masse sur un obstacle en dur est capable de les mettre KO. Avec bien sûr l'étouffement sous une avalanche de peaux de bananes, laquelle est ici aussi présente. Si la zone de la jungle pouvait être comparée au jardin d'Eden, il va de soi que celle de la caverne représente indubitablement un voyage aux enfers. Ici, tout n'est que roche, squelettes de dinosaures et lave en fusion. Ainsi, le joueur qui a cédé à la tentation vénale d'accumuler plus de bananes aura compris qu'il lui en coûtera de passer par cette étape infernale, tant il est vrai que la caverne est à la fois le niveau le plus ardu et imprévisible, et celui offrant le plus de bananes (via le sanglier).


  3. les fonds marins : On y accède depuis la jungle en effectuant une charge dans un tuyau jaune dépassant d'un petit plan d'eau. Certains y voient une référence à l'univers de super mario, mais nous ne tomberons pas dans cet écueil en soulignant que si super mario bros a la paternité des tuyaux permettant d'accéder à d'autres stages de jeu, il n'en a pas l''exclusivité. Cette zone aquatique offre au joueur un gameplay fondamentalement différent des autres zones. Comme la zone des cimes, il s'agit d'un niveau bonus où le plus grand risque de votre singe sera de se faire croquer les fesses par le crocodile et de remonter finir sa course dans la jungle. Après le jardin d'Eden et l'enfer caverneux, la zone aquatique constitue une bénédiction sous bien des aspects : c'est un pur niveau bonus où vous ne pouvez ni perdre la partie en percutant un obstacle (ici il n'y a que des bestioles qui vous ralentissent), ni vous faire étouffer par l'avalanche de peaux de bananes (elles flottent !). Seul tomber entre les mâchoires du crocodile vous fera remonter à la surface, propre comme un singe nouveau-né.


  4. la zone des cimes : On y accède depuis la jungle en effectuant une charge à la fin d'un balancement à une liane. Le singe est éjecté plus haut et rebondit sur la cime des arbres en récupérant le plus de bananes. Comme la zone des fonds marins, c'est une zone bonus à 100% : c'est à dire qu'il y est impossible de mourir ni par des obstacles ni par l'avalanche de peaux de bananes. Le but est donc de rebondir le plus loin possible pour accumuler les bananes et améliorer votre record de distance en évitant les autres zones plus risquées. Les bananes y sont assez peu nombreuses, et bénéficier de l'amélioration "aimant" rendra votre visite dans les cîmes un peu plus profitable. Cette zone représente indubitablement une sorte de Nirvana extatique et paradisiaque : située au-dessus de toutes les autres zones, vous ne pouvez pas y mourir. Seul le fait d'en tomber vous ramènera sur la terre ferme de la jungle, où l'ange déchu vous tentera à nouveau sous l'apparence du serpent.



Vous l'aurez compris, chaque environnement propose une ambiance et un gameplay différents, et la sensation de danger sera souvent inversement proportionnelle à la quantité de bananes qu'il est possible d'y ramasser. Mais cette variété de gameplay est encore plus prononcée grâce aux différents alliés qui viendront vous aider sur votre chemin.


III - Les alliés :
1. le toucan vous attend dans la zone de la jungle. En le chevauchant, vous aurez droit à un mini-jeu de type "flappy bird" où vous devrez voler pour éviter les obstacles et ramasser le plus de bananes possibles. Mais dans tous les cas un impact avec un obstacle ne mettra pas fin à la partie, celà vous fera tout simplement perdre le toucan et vous pourrez continuer votre route. Cette phase "toucan" est assez difficile et ne vous permettra d'accumuler beaucoup de bananes. Les améliorations changent malgré tout un peu la donne : avec la résistance à 2 impacts, l'effet "aimant", puis la multiplication par 3 des bananes récoltées la phase devient plus intéressante.
2. le sanglier vous attend dans la zone de la caverne. En galopant sur son dos vous pourrez détruire des blocs gris spécialement dédiés qui vous apporteront un maximum de bananes ! Franchement, même sans amélioration, c'est l'allié le plus efficace en matière de récolte bananière. Le nombre de blocs gris est faramineux, et il n'est pas très compliqué de survivre un temps assez long pour en accumuler beaucoup. Qui plus est, vous pourrez améliorer la résistance du sanglier, puis doubler la valeur des bananes récoltées. C'est sans conteste ici qu'on récolte le plus de bananes.
3. la tortue pourra vous faire bénéficier de sa vitesse dans la zone sous-marine. Elle sera très utile pour éviter de vous faire mordre par le croco.
4. la girafe vous permettra de rebondir plus de fois dans la zone des cimes. Ce n'est pas l'allié le plus puissant, sauf si vous êtes du genre à vouloir battre des records de distance.


Conclusion : ce jeu est génial.

Sebart
10
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Créée

le 22 juil. 2015

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Sebart

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