BioShock Remastered
7.9
BioShock Remastered

Jeu de 2K Boston et 2K Games (2016PlayStation 4)

La ville de Rapture, inconnue du quidam, béotien, bien-pensant et, peut-être, disons-le, sans grande audace, fait la promesse suivante : libérer des normes, quelles qu'elles soient, ceux qui désirent plus que tout outrepasser toutes les limites morales et éthiques. D'aucuns diront que les règles de société, telles qu'établies dans cette décennie d'après-guerre où se déroule l'histoire, réfrènent tout naturellement les idées les plus folles, voire les plus excitantes. Et cela, quelle qu'en soit le prix ! Audrew Ryan, le fondateur de se vaste projet, fait partie de ses pionniers ayant décidé de s'opposer, et à la moral, et à la mainmise étatique. Avec lui, plusieurs scientifiques, créateurs et penseurs téméraires obsédés par les fantasmes les plus fous.

Ce premier volet fait intervenir un illustre inconnu. Inconnu dont le triste hasard (sous-entendu un crash d'avion) l'a mené aux portes de cette cité sans limite, à sa surface, où tout est strictement, radicalement, voire tristement possible. Et comme ce même hasard fait qu'il demeure le seul survivant de l'événement, il n'a d'autre choix que de se diriger vers le salutaire phare qui se dévoile dans le brouillard, surplombant les décombres de l'avion. Les premiers pas du protagoniste font rapidement comprendre au joueurs que la situation n'est pas au beau fixe. Que quelque chose a, comment dire, quelque peu dérapé. D'emblée, l'on comprend rapidement que de l'utopie littéralement libératrice s'est fatalement, en absence de réelles balises et de normes, muée en une dystopie radicale. Telle une ville post-apocalyptique sous cloche, Rapture a perdu tout son éclat. Sa promesse initiale étant désormais à mille lieues. Le joueur est rapidement épaulé par, semble-t-il, la seule personne encore lucide des lieux, un jeune père qui compte sur lui pour lui permettre de retrouver sa famille...

Bioshock propose ainsi de déambuler dans un environnement hermétique, délicieusement anxiogène et où la raison a, depuis longtemps, fait place à une folie généralisée. Tout cela à cause d'une nouvelle sorte de drogue, l'Adam, permettant à celui qui se l'injecte de développer des capacités jusqu'ici inimaginables mais faisant également perdre la tête à long terme. Et, comme de bien entendu, le joueur va devoir, pour survivre à son périple, s'en administrer, à plus ou moins forte dose. Bioshock est certainement le premier FPS m'ayant offert un tel sentiment immersif, dans tous les sens du terme. Sans pouvoir vraiment l’expliquer, le narratif désespéré, ce que le post-apo propose par nature, raisonne fortement en moi. Surtout quand il génère un sentiment dichotomique entre le malheur indélébile et la joie feinte de ses vieux succès musicaux, candides et optimistes, du milieu du vingtième siècle. Forcément, on retrouve une certaine analogie avec l’ambiance sonore des derniers épisodes de Fallout où l’on retrouve exactement le même contraste, avec un monde en réelle désolation.

Forcément davantage réputé pour ses performances techniques à sa sortie, ce qui est nettement, et naturellement, moins la cas plus où s’en écarte, le jeu reste en revanche très classique sur ses mécaniques, avec néanmoins cette originalité d’avoir la possibilité d’utiliser deux armes en tout instant : des plasmides - les aptitudes développées à partir d’Adam, offrant un panel somme toute assez classique avec la possibilité de brûler, de glacer ou d’électriser ses ennemis - de la main gauche, et des armes plus conventionnelles de la main droite. Ainsi ressort de Bioshock, et de ses « suites », des années après, le questionnement primordial de la moral, de ses limites. Mais aussi de la justice et de la justesse, à la foi établies, implicitement, par la conscience collective, mais variant néanmoins selon l’époque. D’une certaine manière, cela permet aussi de se projeter sur notre monde à nous, qui, parfois n’est pas forcément mieux, d'une certaine manière. De pouvoir
analyser nos actions, de voir où nous dépassons potentiellement les bornes pour replacer le curseur. Bioshock n'est certes pas un FPS révolutionnaire mais pose des questions très intéressantes, ce que je recherche avant tout d'un média culturel.

Gaeru83
9
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Créée

le 16 févr. 2020

Critique lue 123 fois

Gaël Barzin

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