Du sang et des tripes

From Software est sûrement l’un des studios les plus intéressant dans l’univers du jeu vidéo actuel, à l’heure ou beaucoup de créations se retrouvent de plus en plus simplifiées, et des gameplay de moins en moins inspirés. Le studio Japonais se dévoile comme étant un des derniers bastions du jeu Hardcore, une véritable Résistance qui n’est pas pour me déplaire. En 2009 sortait Demon’s Souls, un véritable Ovni vidéoludique qui a très vite gagné en popularité et qui fut considéré comme un jeu véritablement punitif et complexe dans le bon sens du terme, une erreur de déplacement et vous ne pouviez vous en prendre qu’à vous même. La série est à cette époque là au stade embryonnaire et malgré le fait que ce ne soit pas un échec commercial, il reste néanmoins un jeu de niche. En 2012 sort la suite de Demon’s Souls, sous un autre nom bien plus populaire, Dark Souls, ici on reprends à peu près les mêmes ingrédients que la dernière fois et surtout on garde l’essentiel, la difficulté. Le jeu se révèle être un véritable chef d’œuvre sur plusieurs points, avec un level design enseigné aujourd’hui dans toutes les écoles de jeu vidéo, devenu un véritable standard et une référence incontournable. Après cela From Software pouvait avoir la pression, Hidetaka Miyazaki, le créateur des deux premiers Souls, ne travaillera pas sur Dark Souls 2, qui, sorti en 2014, se révèlera être, sans grande surprise l’épisode le plus terne de la série.

Welcome to Yharnam

Le studio ne s’arrêtera pas là, et Miyazaki, encore lui, avait un autre projet dans la tête, il voulait apporter un petit peu de renouveau, se plonger dans un nouvel univers, celui dont je vais vous parler aujourd’hui, Bloodborne. Sorti en Mars 2015, Bloodborne est une exclusivité PS4, se déroulant dans un univers qui change du tout au tout par rapport aux anciennes créations du studio. En effet, ici nous ne somme plus dans un simili moyen âge mais plutôt au 18ème siècle dans les rues crasseuses et noircies de Yharnam, qui n’est pas sans rappeler la ville de Londres. On se retrouve ici au milieu d’un dédalle de rues à l’ambiance victorienne surplombées de clochers d’églises de style gothique, et autant le dire de suite, ça claque. Tout est extrêmement détaillé, tout est crédible, des pavés en passant par les toits, ou la structure des églises, voir d’un simple lampadaire, la direction artistique est tout simplement une des plus belles qui m’ait été donnée de voir depuis très longtemps. On prend un réel plaisir à la découverte, tout en n’ayant à aucun moment l’impression de déjà vue. Bien évidemment la zone de Yharnam n’est pas la seule du jeu, et je vous le dit direct, elles sont toutes dignes d’intérêt et c’est là d’une des forces du jeu.

Lovecraft aurait aimé ce jeu, c’est presque une certitude tant l’univers en est inspiré, on ressent tout le long de l’aventure, l’impression qu’une créature cosmique nous surveille… Plus sérieusement, je pense que c’est sûrement l’une des mises en image les plus réussie en ce qui concerne l’univers lovecraftien, et pourtant, c’est très certainement l’un des exercices les plus complexe à réaliser tant peu de gens s’y sont attelés - avec succès- que ça soit au cinéma ou justement dans l’univers du jeu vidéo. Même l’histoire du jeu est largement inspirée par les écrits tourmentés de l’américain, et ce même si cette dernière n’est pas explicite, il faudra pour la comprendre, recoller les morceaux en lisant les descriptions des objets et en étant attentif aux dialogues avec certains PNJ.

Sang borne

J’en aurai presque oublié la pièce maitresse du jeu tant celui ci me bluffe de part sa patte artistique. Vous, vous doutez bien que Bloodborne n’est pas une balade contemplative, ici, le sang coule à flot et les ennemis que vous rencontrerez seront un petit peu dérangés, et hargneux… En comparaison avec Dark Souls, ici, pas de bouclier, tout est misé sur l’esquive et la précision de vos mouvements, le gameplay est beaucoup plus nerveux à l’image d’un Hack’n’slash tout en gardant l’exigence propre aux Souls, à savoir que si vous prenez deux coups bien placés, ça commence à sentir le sapin. Vous aurez dès le début du jeu le choix entre plusieurs armes tranchantes que vous pourrez par la suite améliorer en terme de dégât. La montée de difficulté est toujours croissante, et les ennemis que vous rencontrerez seront de plus en plus tenaces, le jeu vous mettra très vite dans le bain, avec deux premiers Boss tout de même un petit peu violent, c’est le moins qu’on puisse dire. La frustration vous envahira sûrement plus d’une fois, mais si il y a une chose qu’on apprend dans les créations de From Software, c’est que la faute vient toujours de vous, de votre manque d’analyse du terrain, des ennemis, le Die & Retry est un élément majeur du jeu, vous serez amené à beaucoup, beaucoup mourir et à recommencer, néanmoins le sentiment de gratification après un combat épique n’a d’égal dans presque aucun autre jeu vidéo, vous ressortirez peut être en sueur d’un combat, mais toujours avec la même envie de découvrir toujours plus et de se donner des défis de plus en plus grand.

Vous l’aurez compris, Bloodborne reste un jeu exigeant qui ne plaira pas à tous, mais aussi un univers dont il faut avoir entendu parler et dont la beauté n’est pas seulement artistique mais aussi quelque part, philosophique. Il pourra aussi se targuer, comme ses trois grands frères, d’éviter tous les pièges du jeu vidéo actuel, à savoir que votre vie ne remonte pas seule, et qu’on ne vous indique nullement le chemin à prendre, à aucun moment. Si quelques défauts il devait avoir, ce serait graphique, avec quelques textures baveuses, un aliasing pas forcément folichon et des ralentissements parfois gênant, PS4 oblige. On outrepasse facilement tous ces petits désagréments techniques, parce que c’est une expérience qui à mon goût est quasi indispensable à tous les fans de Dark Souls, mais aussi à ceux qui veulent se tester les nerfs ou encore ceux qui recherchent à se lancer dans une aventure marquante et inoubliable.