C'est l'histoire d'un mec qui sème ses petites graines dans des femmes...

Pour plagier un site supposément pro, "c’est 7". Une note synonyme de "compromis", car bien que mon ressenti global soit plutôt positif, il m’est difficile de mettre de côté les importantes tares dont souffre inextricablement ce Deadly Premonition. Surtout que cette version PS3 est qualifiée de "Director’s Cut", donc théoriquement plus aboutie, sortant 3 ans après la version initiale. Et dire qu’avec un peu plus de peaufinage (ou de talent? d’expérience?), Deadly Premonition aurait vraiment pu être le jeu de la décennie que certains voient en lui…



"À l’inverse d’un film, un petit budget vidéoludique ne peut pas tout miser sur son scénario".



Ce testeur a dit/fait mille et une conneries, mais je suis pour une fois d’accord avec lui. Dans jeu vidéo, il y a le terme "jeu" autrement dit le gameplay, et le terme "vidéo", qui englobe le graphisme, le design et l’animation. Et les deux sont très insuffisants. Passons brièvement sur le visuel pur : oui, le jeu est "moche", alternant sans cesse entre de la PSP-HD et du presque PS3. Mais ça encore ça passe, tant que le reste suit. Et question design, le jeu assure avec certains parti-pris esthétiques intéressants et des personnages dans l’ensemble charismatiques. Par contre, difficile de pardonner un clipping omniprésent, de nombreux sauts d’image et de son, mais surtout un framerate souffreteux, qui m’a par deux fois OBLIGÉ à aller sauvegarder en quatrième vitesse ma partie pour la recharger dans la foulée. Et, croyez-moi sur parole, rejoindre un point de sauvegarde quand on est en 5 fps au max, c’est pas vraiment une sinécure suivant ce qui se trouve sur le chemin…


Le gameplay quant à lui, cumule les paradoxes, pour le meilleur et pour le pire. C’est d’autant plus dommage que les bonnes idées sont bel et bien là. On peut citer à titre d’exemple le principe de retenir sa respiration pour passer inaperçu un court instant (largement sous-exploité), la présence d’une jauge d’essence et d’un compteur de vitesse pour les phases en véhicule, ou de jauges de faim et de fatigue pour Morgan, ou encore une gestion plutôt intelligente de l’horloge, permettant d’aborder assez librement l’aventure, une journée s’écoulant en 6 heures réelles (et non pas huit comme je lis un peu partout, sachant qu’une minute dans le jeu est égale à 15 vraies secondes). Évitez cependant de sortir après minuit, ce serait un peu comme donner à manger à un mogwai…


À l’inverse, certains choix font grincer des dents. La visée caméra à l’épaule imposant l’immobilisme nous ramène 5-6 ans dans le passé, mais pire encore, suivant l’angle selon lequel l’ennemi attaque, il peut arriver qu’il soit camouflé par notre propre silhouette ! Oh, et la "visée auto" est une calamité, tellement elle est aléatoire ; à dire vrai, je l’ai très vite mise de côté pour une progression totalement manuelle… De toute façon, le jeu est dans l’ensemble très (trop?) facile, surtout quand on récupère les armes efficaces en mode munitions infinies


On peut aussi se défendre avec l’une des nombreuses armes de mêlée mises à disposition, comme le couteau, la barre de fer ou le club de golf. Si leur "défaut" principal est l’usure irrémédiable qu’elles subissent (plus ou moins rapide selon l’arme), celui-ci est largement compensé par la possibilité cette fois-ci de se mouvoir librement tout en tenant en joue l’ennemi, d’esquiver ses attaques puis contre-attaquer tout de suite derrière. Très efficace. D’ailleurs, une fois la clef incassable en notre possession, on est potentiellement "invincible", les seuls moments où on devra la délaisser seront contre les "spider-shadows", ennemi très mal pensé au pattern ultra prévisible mais très long à buter…et contre les boss.


Et en parlant de boss et de trucs mal pensés, les affrontements contre le raincoat killer sont de véritables purges, excepté le dernier, le vrai. Ce sont des phases de fuite en full-QTE indigestes au possible, la lie du gameplay vide de sens (malgré la bonne mise en scène), faisant rager le joueur qui meurt scalpé pour avoir appuyé sur O au lieu de X, alors qu’il avait fallu appuyer sur O pour les deux esquives précédentes… Ça sent le vécu… Les autres boss ne sont pas forcément mieux lotis, comme par exemple la deuxième phase du true-last-boss là encore en full-QTE, mais un full-QTE interMINABLE, où on se retrouve à astiquer son stick comme un dératé pendant plus de trois minutes ! Finalement, seul l’avant-dernier boss relève un peu le niveau…


Si le "shoot horrifique" prend une place importante dans Deadly Premonition, on passera aussi pas mal de temps au volant, pour arpenter les longues distances séparant les différents lieux de la bourgade, afin de remplir une quête annexe ou pour les besoins du scénario. "long" est d’ailleurs un terme très juste, sachant que les différents véhicules du jeu dépassent rarement les 60 mph…s’il n’y avait que ça ! Leur tenue de route est surréaliste (certains tournent trop, d’autres pas assez), le frein et les collisions nous stoppent net, le frein à main nous plante dans le décor quatre fois sur cinq… On finit par prendre (à peu près) le coup de main mais quand même…


"Eh mais dis-donc Wyz, t’avais pas dit au début que t’avais apprécié le jeu ?"


Effectivement c’est bien le cas. On va d’ailleurs abordé le meilleur du jeu, à commencer par son écriture. Déjà, à ceux qui crient au "plagiat de Twin Peaks"…désolé, mais non. Juste non. Le plot de départ est en effet très similaire (l’agent du FBI schizoptimiste, le meurtre sur fond de paranormal), mais la bifurcation intervient rapidement. Et pour dire la vérité, je n’apprécie pas plus que ça Twin Peaks (#bûcher) : une intrigue qui multiplie à l’infini les sous-intrigues et qui soulève plus de questions qu’elle ne donne de réponses, ce n’est pas du mysticisme / ésotérisme / quelconque superlatif en -isme, c’est juste de la branlette intellectuelle…mais Dale Cooper (et son génial interprète) est effectivement fabuleux.


Contrairement à Twin Peaks, l’intrigue ici est relativement complexe mais les éléments forment un tout cohérent et tangible, avec en sus la petite touche fantastico-surnaturelle qui va bien. On y incarne l’agent Francis York Morgan, venu enquêter dans ce très joli coin paumé qu’est Greenvale sur le meurtre apparemment rituel d’une certaine Anna Graham. Un petit pâtelin où il se passe pas mal de trucs chelous, comme une légende locale d’un tueur à la hache qui ne semble pas si chimérique que ça… Impossible d’en dire beaucoup plus sans risquer de spoil. On dit la fin sujette à diverses interprétations mais honnêtement, à part la nature réelle du true-last-boss (et encore), tout est clair comme de l’eau de roche si on a fait attention aux nombreux détails disséminés un peu partout… C’est d’ailleurs à la fois la plus grande force et la plus grosse faiblesse du récit : il nous en dit/montre parfois beaucoup trop, si bien qu’on découvre assez vite qui a quel rôle et qui tire toutes les ficelles…même si le coup du travelot, je l’avais pas vraiment vu venir…


Certes, il y a quelques facilités d’écriture un peu "gênantes", comme le fait que personne ne tilte qu’un certain individu n’ait pas pris une ride en 50 piges… Ça passe pour Morgan (traumatisme), ou pour Polly (complètement à l’ouest), mais beaucoup moins pour certains autres… Je trouve aussi l’idylle un peu forcée, sachant que les deux tourtereaux ne se connaissent finalement que très peu. Je ne demandais pas d’aller jusqu’au touche-pipi, mais au moins d’avoir quelques scènes de rapprochement et/ou de romantisme, comme un dîner aux chandelles, pour y croire un peu plus… Et le coup du choix qu’on nous impose de faire, mais qui n’est pas respecté dans la cinématique qui en découle…autant rester passif et juste mater la scène !


Le must à mon sens reste ce que Deadly Premonition "raconte" dans ses phases in-game, notamment l’ambiance hyper crédible de la ville, et ses habitants qui vaquent à leurs occupations. Qui vaquent VRAIMENT à leurs occupations. Suivez n’importe quel pnj dans ses pérégrinations et vous serez généralement surpris de voir à quel point son comportement est plausible. Chacun a ses contraintes horaires, va travailler, manger, faire les courses, s’adonner à ses loisirs comme une balade au parc, la télévision, la peinture, la cuisine… C’est parfois assez bluffant.


C’est d’ailleurs ça qui rend le jeu aussi attrayant : on est happé par son ambiance, on vit dedans. On est tellement absorbé par la justesse de cet univers, par l’authenticité de ses personnages, par la proximité qu’on entretient avec York, qu’on est tous (ou presque) prêt à pardonner tous les défauts sus-mentionnés au fil de la prose. Tous sauf un testeur "professionnel" apparemment. Mais ces défauts existent tout de même bel et bien…


Je signerais cependant volontiers pour un second épisode, qui pourrait améliorer plein de trucs, et pas forcément que les défauts techniques, comme par exemple une map fonctionnelle ou des phases de profilage qui impliqueraient un peu plus le joueur… Ce serait aussi l’occasion d’éclaircir le plus gros mystère toujours non-résolu du jeu :


WILLIE. Sans déconner, ce foutu clébard, c’est un ennemi ou notre ange-gardien ?

Wyzargo
8
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le 18 oct. 2016

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