Deathsmiles est d'une perfection à couper le souffle
Par Jérôme Dittmar
De tous les genres du jeu vidéo, le shoot'em-up est probablement le plus simple et difficile à décrire. Rien de plus basique a priori, c'est toujours la même chose, tout n'y est que nuances. Mais qu'est-ce qui distingue un shmup d'un autre ? Un univers, des options, un level design, le style du gameplay, la forme et cadence des patterns, l'aspect technique, la complexité d'un boss. C'est un condensé du jeu vidéo en général, sa synthèse minimaliste, épurée, réduite à quelques traits : avancer, éviter, tuer, pour continuer jusqu'à l'écran de fin. Ecrire sur un shmup c'est presque automatiquement faire le bilan de ses compétences, définir son système, en bon professionnel pour d'autres professionnels. Car de tous les genres il demeure celui le plus réservé à un public d'initiés, loin devant le jeu de combat revitalisé récemment avec SFIV. Jouer à un shmup, en 2009, c'est presque faire parti d'une communauté d'anciens ayant découvert le jeu vidéo à une certaine époque. Aujourd'hui, pour l'amateur, plutôt le collectionneur, ne reste plus qu'à exhumer ses oldies, le doujin (peu accessible) ou bien opter pour une Xbox 360 japonaise. Contre toutes attentes, la console de Microsoft est en effet devenue le dernier bastion du shmup. Il y a des raisons à cela, économiques, stratégiques, qui ont poussé les développeurs plutôt dans le camp de l'Américain que chez Sony. Celles-ci, par la force des choses, ont fait de la 360 la console des gamers au Japon, de la même manière qu'elle s'imposait ailleurs, mais pas avec les mêmes titres.
Il est vrai aussi qu'à l'heure de la 3D high tech et des jeux toujours plus scénarisés, le shmup ne fait plus rêver avec sa 2D antédiluvienne et son gameplay « archaïque ». Trop confidentiel, trop hardcore gamer : contrecoup d'un genre qui avec les années s'est également enfermé dans des jeux toujours plus difficiles d'accès, demandant des capacités surhumaines pour déchiffrer des nuées de boulettes. Ce fût l'avènement du manic (ou danmaku, « rideau de balles »), dont Cave, qui nous intéresse ici, fût et demeure l'un des maîtres avec entre autres sa série mythique Dodonpachi (récemment portée sur 360). On ne va pas refaire l'histoire du shmup, mais il illustre assez bien à sa manière les évolutions du jeu vidéo et une certaine partition du public. Pour ceux qui résistent, ses aficionados, il demeure le genre ultime, celui nécessitant la plus grande exigence, donc un amour absolu, tout en faisant revivre inlassablement nos premiers émois. A la fois, le shmup doit moins aujourd'hui à la nostalgie d'un temps passé associé à une certaine heure de gloire du jeu vidéo, qu'à perpétuer, en les peaufinant, sa plus ancienne esthétique et le plus vieux gameplay du monde. Les rares développeurs japonais continuant seuls, dans leur coin, à faire exister cette tradition, sont devenus autant des archéologues que des peintres de l'âge classique refusant de céder complètement à la renaissance, encore moins la modernité. Pour eux, les dernières consoles de salon et leurs puissantes turbines graphiques, ne servent qu'à optimiser le fruit d'un travail plus ancien dont il prolonge l'héritage. (...)
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