J’adore être bloqué dans un jeu d’aventure hardcore à cause de l’aléatoire, pas vous ?!

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Déjà le troisième jeu de la saga, qui mine de rien, avance d’un bon train. Dans le premier, on aidait notre brave Graham à devenir le roi du trou du cul du monde, c’est-à-dire le royaume de Daventry. Dans le second, on aidait Graham cette fois-ci à trouver sa dulcinée, car comme on l’a appris grâce à La Classe américaine, « Quand tu es célèbre, tu niques plein de gonzesses ». Puis arrive ce troisième opus, où, surprise pour tout le monde, on incarne non plus notre brave monarque, mais un jeune fringuant à l’identité inconnue, esclave d’un mage maléfique, avec qui on vivra une des meilleures aventures de cette première trilogie.


« Tu es un sorcier Graha… Bah merde, tu es qui toi ?! »


Eh ouais, fini Graham. On joue désormais un soi-disant orphelin, d’après son maître, maintenu en esclavage sous le joug d’un puissant sorcier, afin d’accomplir les tâches domestiques les plus ingrates. Et ouais, que ce soit passer le balai, nourrir les poules, ou encore servir à manger à Monsieur cet enculé de mage, on est bien loin de notre royal Graham. Bien loin ? Pas tant que ça au final, car le jeu se divise en deux grandes parties distinctes : trouver un moyen d’échapper définitivement au mage maléfique, puis accomplir un autre objectif, qui se découvre petit à petit à mesure qu’on explore l’univers.


En guise de premier contact, on a un beau manuel traduit en plusieurs langues, dont le français, ce qui est toujours un détail bien sympa pour un jeu de cette époque. Toute l’introduction de l’histoire y est très bien racontée, concernant le mage et notre personnage, parfait pour s’immerger en douceur. On a même une petite introduction dans le jeu mettant en scène le méchant mage ! Eh ouais, avec les 350 000 ventes du précédent opus, ils ont fait péter le budget chez Sierra pour cette suite ! Cette introduction sera d’ailleurs l’occasion d’écouter une musique en fond. Enfin je dis musique, mais avec les jeux DOS de cette époque qui ne peuvent faire que des BIP, entre deux bruits stridents qui me relancent mes acouphènes et font hurler tous les chiens du quartier, difficile de résister à la tentation de s’enfoncer un pic à glace dans chaque oreille au bout de quelques secondes d’écoute. On ira très vite dans les options couper ces sons atroces pour les remplacer par des sons d’ambiance trouvés sur YouTube, bien plus agréables. Mais je ne suis pas ingrat, j’apprécie l’effort. Au moins, ils ont essayé de faire de la musique. C’est nul à chier certes, mais on progresse.


Et je peux le dire, j’ai beaucoup aimé cette suite. Bien plus engageante que le second opus, qui reprenait bêtement ce qui avait fait le succès de l’original sans vraiment apporter de relecture. Ici, il faut désormais réussir à survivre aux colères de notre maître magicien, qui est un des méchants les plus détestables qu’il m’ait été donné de voir dans un jeu d’aventure ! Ce personnage est au centre du nouveau système de temps in-game, où ses tâches et retours à la maison sont ponctuels, et gare à nous si on est surpris à faire le con. On ne remplit pas la tâche ingrate qu’il nous a demandée dans les cinq minutes ? Allez hop, punition : enfermé dans la chambre. Il te surprend avec sa baguette dans vos mains à essayer un sort de rallongement de pénis ? Finito le petit orphelin, il en trouvera un autre pour te remplacer ! Il découvre que tu as fouillé son bureau sans tout remettre en ordre avant son arrivée, ou encore, découvre dans tes poches certains objets magiques ? Paix à ton âme ! Idem si tu te balades à l’extérieur et qu’il revient pendant ton absence : il te transformera en merde fumante sur le sol façon Les Visiteurs, crois-moi.


Si ce système de temps peut sembler rebutant au début, il n’en est rien, et je l’ai vraiment apprécié, surtout que le jeu l’exploite parfaitement. On comprend par exemple que le sorcier rentre toutes les tranches de trente minutes, ce qui permet de planifier nos sorties et d’apporter des moments de tension délicieux. Ah, je me souviens de ce moment où j’explorais le monde et suis revenu pile à temps, juste le temps de rentrer et de cacher tout mon matériel interdit sous mon lit avant l’arrivée du mage, frôlant ainsi la catastrophe. Ça apporte donc des situations assez inédites, et j’aurais même aimé avoir plus de mécaniques de jeu exploitant ce concept. Mais au final, hormis la gestion du temps très bien pensée au début, on ne retrouve plus vraiment ça par la suite, sauf pour une autre très bonne énigme sur un bateau bien plus tard.


Niveau game design, le jeu évolue aussi grandement. Fini le monde carré immense mais un peu vide, faut bien l’admettre, des anciens opus : ici, place à un univers cohérent, découpé en plusieurs sections. Il y a déjà la maison du mage, qui occupe une dizaine d’écrans, reliée au pays de Llewdor par un terrible chemin de montagne, qui donnera des sueurs froides à ceux ayant pesté contre les passages étroits du premier jeu. Le pays de Llewdor, quant à lui, occupe une vingtaine d’écrans : un monde plus petit donc, mais bien plus rempli et agréable à explorer. Les deux zones s’explorent en alternance grâce à la mécanique du temps avec notre maître, et force est de constater que j’ai adoré cette approche. On fouille un maximum le pays, puis quand il est temps, retour à la maison pour refaire le point et découvrir les secrets restants de la demeure du mage.


L’une des principales boucles du gameplay au début du jeu sera de découvrir le labo secret du mage, ainsi que sa baguette, pour pouvoir créer des sorts et les utiliser plus tard. Une nouvelle mécanique vraiment bienvenue, qui apporte beaucoup de profondeur au jeu, un peu à la manière de ce qu’a fait Infocom avec leur saga Sorcerer. Les nombreux ingrédients à récupérer pour créer les sorts seront notre principal moteur pour explorer le monde extérieur, car on s’en doute, c’est en retournant les armes magiques du mage contre lui qu’on pourra le neutraliser et s’en débarrasser une bonne fois pour toutes.


La seule petite ombre au tableau dans tout ça, c’est la création des sorts, qui est une des mesures anti-piratage les plus infâmes qu’il m’ait été donné de voir dans un jeu vidéo. Pour créer chaque sort, après avoir réuni tous les ingrédients, il faut réciter une série de dix phrases à la suite sans la moindre faute, sinon c’est la mort. Toutes les indications sont données dans le manuel, dans un livre de sorts où chaque page est dédiée à un sort. Mais ça va loin : faut indiquer devant le grimoire du mage la page du livre qu’on a entre les mains, décrire toutes les étapes expliquées dans le manuel (donc avec le manuel FR, faire toute la traduction soi-même sans se tromper, courage putain), puis finir par une formule magique de quatre phrases sans sauvegarde possible. JUSTE, UN PUTAIN D’ENFER. Niveau création de magie nulle à chier, je croyais qu’Ultima 8 était le king, mais putain, avec King’s Quest 3, je ne sais plus.


Parmi les magies, on en a de vraiment intéressantes, comme celle permettant par exemple de se transformer en mouche ou en aigle, très sympa et utile dans de nombreux endroits du jeu. Il y a aussi celle qui permet d’entendre tout ce que disent les animaux, pour écouter leurs conversations. Et si Infocom en aurait profité pour faire plein de blagues bien débiles, ici, les animaux vont au contraire, via leurs discussions, apporter des informations très utiles pour en apprendre plus sur l’histoire, et ça, c’est top !


Une seconde moitié des plus étonnantes


Attention, spoil durant toute cette section jusqu’au prochain titre !


L’aventure suit donc son cours, jusqu’à arriver à un tournant où, dans une grotte via un oracle, on découvre enfin nos origines. On n’est finalement pas un orphelin, mais bel et bien le fils du Roi Graham, notre gars sûr, et de sa femme Valanice (celle qu’on avait pécho dans le deux) ! En plus, on a même une sœur (hé bah il n’a pas chômé le Graham en mon absence) ! On apprend qu’on s’est fait enlever par le mage très jeune, et que depuis, le royaume de Graham tombe en ruine sous l’assaut d’un dragon à trois têtes qui a enlevé notre sœur ! Putain, c’te retournement de situation.


Et j’ai trouvé ça génial. Alors que le jeu nous faisait croire à une simple nouvelle aventure déconnectée des autres opus, avec juste pour but de vaincre notre maître, voilà qu’on apprend qu’on est le fils du héros qu’on a incarné dans les deux précédents jeux, et qu’un tout nouveau pan de l’histoire reste à découvrir. C’est juste beaucoup trop génial comme idée, et un excellent twist là où on ne s’y attendait pas, surtout dans les jeux de cette époque. On cherchera dès lors à se débarrasser et se venger au plus vite de notre décidément bien gros connard de maître, pour enfin être libéré définitivement (essayer de quitter le pays avec lui encore en vie n’est vraiment pas une bonne idée). Ce moment est d’ailleurs un des plus satisfaisants du jeu : réussir enfin à être plus rusé que notre maître et trouver un moyen de le mettre hors d’état de nuire pour de bon, c’était tellement kiffant. On obtient ensuite une totale liberté, sans plus aucune contrainte, et combiné à la carte magique permettant de se téléporter où on veut dans le pays en une seule commande, c’est juste génial. Oui oui, il y a un système de voyage rapide dans ce jeu de 1986 !


On cherchera donc, pour la deuxième partie, un moyen de partir, et suite à la consultation de l’oracle, ça tombe bien : un bateau avec des gens un peu louches vient d’arriver, quelle chance ! On y vivra par la suite toute une seconde moitié d’aventure bien plus linéaire, séparée en trois zones, pour finir par retrouver notre bon vieux royaume du premier opus et quelques lieux qu’on connaît bien (NOOON, PAS LES ESCALIERS SANS FIN MENANT AU PAYS DES NUAGES, NOOOOOON !). Et j’ai adoré toute cette seconde moitié, qui apporte un contraste agréable avec la partie ouverte du début. C’est top, car il n’y a aucun moyen d’être bloqué par la suite si on a bien préparé tous les sorts avant de quitter le pays. Et j’ai beaucoup apprécié ça, car ça corrige un défaut inhérent des jeux de cette époque, comme dans Space Quest par exemple, où on se retrouvait trop facilement soft lock, la faute à un objet manqué. Le game design est bien plus réussi que dans n’importe quel autre jeu de Sierra, et on sent vraiment un grand gain de qualité avec cet opus sur cet aspect.


Allô, service de soluce pour les jeux Sierra, j’écoute ?!


Alors, concernant les énigmes et leur difficulté… eh bien, j’ai envie de vous dire de regarder la date de sortie du jeu, et vous aurez votre réponse. En 1986, on était encore en pleine période des jeux d’aventure quasi impossibles sans livre d’indices ou guide officiel, et celui-ci ne fait pas exception. Je n’en tiens pas spécialement rigueur, car ce King’s Quest 3 est finalement comme tous les autres, dans son jus, surtout que j’ai apprécié certaines de ses mécaniques. Celles liées au temps, comme je l’ai dit plus haut, sont vraiment intéressantes (surtout avec le bateau, c’était très malin), ou encore tout le système de magie, vraiment sympa et qui permet plusieurs approches, notamment avec la transformation en mouche/aigle et la téléportation aléatoire, qui ouvrent des façons différentes de résoudre les situations.


Mais à côté de ça, on a toujours des purs trucs de merde introuvables, typiques de cette époque maudite. Genre les plumes d’aigle, avec un aigle qui peut apparaître uniquement sur un écran bien précis sans aucune indication, et très rarement en plus, t’obligeant à jouer avec l’aléatoire en sortant et revenant jusqu’à avoir assez de chance même avec un guide sous le nez. Et cette mécanique d’aléatoire est utilisée à outrance, jusqu’à l’overdose même. Tu dois récupérer des glands séchés, et tu en trouves au pied d’un arbre. Cool, tu te dis. Mais non, le jeu ne t’indique qu’aucun n’est sec. Bah merde, tu pars en chercher ailleurs, ici c’est mort, réaction normale quoi ! Bah non : il faut quitter l’écran, revenir, puis réessayer. Et sans aucun indice visuel, à un moment, tu auras tes putains de glands séchés. Pareil avec le chat qu’il faut attraper en spammant la commande TAKE CAT jusqu’à ce que ça passe… Il y a trop de trucs comme ça, imbittables, qui sans guide, vont forcément perdre le joueur qui devant un échec, cherchera une autre façon de procéder qui n’existe pas.


C’est dommage qu’on ait encore ce genre de mécaniques à la con, car à part ça, tout le reste tient la route. On arrive à bien progresser seul, l’exploration de la maison du mage est géniale avec ses secrets, celle du pays à côté aussi, toujours autant remplie de personnages issus de la mythologie et des contes de fées sans vraie cohérence, mais c’est justement ce qui fait le charme de la série. Ici, on pourra par exemple croiser Méduse dans le désert, juste à côté d’une maison avec trois ours sortis d’un conte pour enfants, mais curieusement, dans King’s Quest, ça passe plutôt bien ! Puis toute la seconde moitié du jeu est vraiment faisable sans soluce, en plus d’être plaisante, donc c’est rageant que ces énigmes merdiques à base d’aléatoire fassent tache dans la première partie. C’est la seule petite ombre au tableau.


Comme toujours, je vous recommande de cliquer ICI pour le livre d’indices publié par Sierra à l’époque, le meilleur compagnon de jeu pour vous débloquer petit à petit sans avoir la soluce directe.


Sinon, ICI pour une super soluce rédigée intégralement en français, donc que du bonheur !


Un excellent opus de la saga, clairement mon préféré parmi cette première trilogie. Enfin, pour la série, une véritable aventure, et non plus un simple monde ouvert où ramasser des trésors. Enfin un vrai monde fascinant à explorer ! Enfin un scénario plaisant à suivre ! Couplé à ça, le nouveau système de temps et notre redoutable maître sorcier, qui impactent grandement notre façon de jouer, font de cet opus un vrai coup de cœur pour moi, puis surtout, mon premier jeu Sierra que j’ai réellement adoré. Vivement la suite !

skorn-of-banana
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