200cc, l'odyssée de la Renault Espace

Mario Kart 8 est un excellent cru. Il est beau, il a de très bons circuits et il conserve toutes les qualités de sa licence. Je vous recommande d'ailleurs les coupes en DLC qui sont de grande qualité pour un prix abordable (12€ pour 50% de circuits en plus). C'est dit, rien à ajouter. Ce dont je vais parler ici, c'est du mode 200cc.

Ce mode, ce n'est pas juste un mode de difficulté plus relevé. Ce n'est pas un surplus de challenge car cela impliquerait que le défi qu'il représente est honnête et équilibré. C'est au delà de ces considérations. Les circuits du jeu n'ont pas été conçus pour être parcourus en 200cc : certains virages se retrouvent infaisables dans ces conditions, à moins de freiner mais cela n'aide pas forcément beaucoup. J'ai essayé plusieurs karts, j'ai anticipé mes virages au maximum : rien à faire. Sur certains circuits ça passe, sur d'autres on passe la moitié du temps en hors-piste. Même l'IA a parfois du mal, ce qui est inédit, mais elle s'en sort toujours mieux que le pauvre mortel que je suis. Cela devient frustrant, ce n'est même pas la peine de m'inciter à chopper toutes les coupes tant le challenge est inadapté au jeu. Je ne doute pas que les joueurs à haut niveau s'en sortent et me rient au nez, mais le constat est le même : si vous êtes un simple humain, le défi perfectionniste ne sera pas de mise. Je ne ferai pas ce mode pour de la compétition, je le trouve injouable.

Pour autant, est-ce une mauvaise expérience ? Faut-il éviter le 200cc comme la peste ? Certainement pas ! En terme de jeu, c'est absolument n'importe quoi. Mais en terme d'expérience à vivre, c'est assez marquant. L'infaisabilité des virages rend les courses encore plus folles qu'elles ne l'étaient, mes premières places à l'arrachée se sont avérées incroyablement gratifiantes tant elles étaient rares et tendues, offrant des scènes de bravoure mémorables. Le level design n'a plus aucun sens et nous fait enchaîner des situations toutes plus WTF les unes que les autres. Je me suis retrouvé perdu dans des éléments du décor dont je ne connaissais même pas l'existence, les tremplins me font sauter des virages entiers, les karts roulent en se cognant partout comme des savonnettes, l'IA est elle même complètement dépassée. Dès qu'un kart prend un tremplin, on se retrouve en apesanteur comme dans une parodie de Fast & Furious 7. Je n'appelle pas ça rouler, j'appelle ça voler sans panache. La logique explose, on a l'impression d'assister à un de ces tool assisted speedruns improbables. Absolument édifiant.

La vitesse devient enivrante. On doit réapprendre à jouer pour limiter les dégâts : ne pas faire de petit saut après un tremplin, éviter toutes les occasions de prendre de la vitesse en dehors des lignes droites, bénir les moments où l'on se prend un éclair car on pourra enfin rester sur la route. On se sent comme le réalisateur d'un de ces films maudits à gros budget qui se prennent toutes les merdes possibles dans la tronche : on n'essaie plus de bien faire les choses car c'est mort, on se contente de zigzaguer vers la fin pour en finir au plus vite, en essayant de grappiller des places.

A ce niveau, cela devient limite fascinant. Plus rien n'a de sens, plus rien ne tient debout, les bonus deviennent limite des malus, les exploits deviennent des fails et les fails deviennent des exploits. En 200cc, Mario Kart 8 n'est plus un jeu mais une expérience. Un sacré moment de fun, une usine à situations d'anthologie.