Prey
7.4
Prey

Jeu de Arkane Studios et Bethesda Softworks (2017PC)

Le Prey de 2017, qui n'a pas grand-chose à voir avec le Prey de 2006, est une simulation immersive prenant place dans une station spatiale nommée Talos I. Étant un jeu Arkane (surtout un jeu Arkane Austin), il se montre sans surprise extrêmement riche, que ce soit dans son univers ou son gameplay, avec un souci du détail poussé à l'extrême.


Mon premier contact avec le titre n'a cependant pas été des plus marquants. Hormis son excellente introduction qui mêle humour et mystère (je suis d'ailleurs surpris de ne pas voir Prey figurer dans le top 100 des meilleures introductions de jeux vidéo sur SensCritique tant il met à l'amende une bonne partie des œuvres présents dans ladite liste), le jeu se montre plutôt cryptique lors de ses premières heures... en tout cas, si comme moi vous avez tendance à fouiller de fond en comble les niveaux, vous allez très vite être surchargé d'informations et ne plus savoir où donner de la tête : il y a énormément de trucs à lire et une quantité phénoménale de personnages secondaires.


Néanmoins, cette surcharge d'informations est aussi ce qui fait la force de l'œuvre. Par exemple, là où, au hasard, un Fallout 4 ou un Skyrim vous évoqueraient l'histoire d'un personnage lambda à travers un document inutile via une quête secondaire quelconque pour ne plus le mentionner par la suite, Prey fait exactement l'inverse et donne un sens à tout ce qu'il fait, à tout ce qu'il nous montre. Talos I étant une station spatiale, chaque personnage qui s'y trouve possède son propre background, sa raison d'être ici, et rien n'est laissé au hasard les concernant. Du coup, on se retrouve face à un jeu qui, en plus de ses quêtes primaires et secondaires, possède tout un tas de quêtes cachées, une sorte de puzzle immense laissé au joueur, où chaque personnage, aussi secondaire soit-il, possède sa propre histoire à l'intérieur même du récit du jeu. Pour le coup, je n'ose même pas imaginer l'effort que cela a dû demander aux équipes d'Arkane afin d'atteindre un tel niveau de précision, une telle cohérence, alors que la majorité des joueurs passeront fort probablement à côté.


Bien sûr, les "vraies" quêtes et le scénario de Prey ne sont pas en restes. J'apprécie par exemple la manière dont les scénaristes nous "divulgâche" la fin de l'aventure, le choix final, dès les premières minutes de jeu, plus précisément via son dilemme du tramway.
Les objectifs secondaires ont aussi leur importance dans le récit, certaines influant grandement sur le déroulement du scénario : il y a par exemple deux personnages qu'il est possible de sauver lors de quêtes secondaires et qui nous accompagneront jusqu'à la fin de l'aventure si on accomplit lesdites quêtes.
Enfin, sans pour autant être vraiment surprenante, j'ai trouvé la fin (ou plutôt la double fin) très intéressante, nous mettant face à nos propres choix d'une manière assez intelligente durant la séquence finale.


La force des jeux Arkane est d'arriver à créer un "Grand Tout". Par là, je veux dire qu'on ressent systématiquement le fait qu'il y ait eu du dialogue entre les équipes lorsqu'on joue à leurs jeux. Nous ne sommes pas dans un Deus Ex Mankind Divided où les concepteurs de niveaux ont dû faire avec les éléments de décors que les programmeurs ont bien souhaité leur laisser et donc, où la présence d'une hiérarchie verticale se fait effroyablement ressentir.
Non ! Ici, tout est lié : le gameplay, l'univers, le scénario ou encore la conception des niveaux en eux-mêmes. Concernant ce dernier point, on ne peut, encore une fois, qu'acclamer le travail effectué par les développeurs. Les différentes sections sont cohérentes entre elles et parcourir chacune de ces dites sections se révèle être un véritable plaisir : les développeurs sont arrivés à créer un style unique (néo-déco), à le faire refléter partout dans la station, sans pour autant concevoir des décors qui se répètent ou semble se répéter.
Pour faire le lien avec la partie scénaristique, il y a de nombreux détails qui disent quelque chose sur l'histoire de la station. Autrement dit, en termes de narration environnementale, on est sans aucun doute dans ce qui s'est fait de mieux dans l'histoire du jeu vidéo.
Là où c'est encore plus fou, c'est que les développeurs ont poussé le détail le plus loin possible. Au niveau de l'architecture de la station, il ne paraît y avoir aucune faille : de multiples stations sont visibles de l'extérieur et inversement. Les développeurs n'ont pas "triché" avec le joueur en concevant des salles qui n'ont pas la même taille de l'extérieur et de l'intérieur. On sent véritablement un amour de l'architecture, des choses bien faites, chez Arkane.


Forcément, cette perfection liée à l'architecture doit aussi se ressentir en jeu, au niveau du gameplay. Cela peut paraitre surprenant, mais sur ce plan-là, Talos I est plus agréable à parcourir en se baladant, comme un walking-simulator d'une certaine manière, ou comme un puzzle-game, (je me suis souvent surpris à m'imposer des objectifs à la con, notamment en souhaitant atteindre des endroits paraissant inaccessibles) qu'en affrontant tous les ennemis mis face à nous. Pour le coup, même si de nombreux "jouets" sont mis à la disposition du joueur, qu'il est possible de battre les ennemis de mille et une façons différentes, je n'ai pas pris autant de plaisir avec le gameplay de Prey qu'avec celui d'un Dishonored 2. Peut-être est-ce dû à la trop grande liberté laissée au joueur ? Au trop grand nombre d'allers-retours ? Au fait que le titre soit moins orienté infiltration qu'un Dishonored ?... difficile à dire.
Cela ne veut pas dire que Prey est mauvais, c'est plutôt le contraire même vu qu'il éclate l'écrasante majorité de la concurrence sans broncher sur ce point. Mais, bien qu'il y ait systématiquement plusieurs manières d'aller d'un point A à un point B, le titre n'arrive pas à atteindre la minutie que l'on peut retrouver dans d'autres jeux développés par Arkane.


Vous l'aurez compris, bien que très bonne, la partie gameplay de Prey est sans aucun doute la partie la moins réussie du titre. Je pense que le principal problème vient du fait, bien que les ennemis soient plutôt réussis dans l'ensemble malgré leur faible nombre, qu'une fois qu'on a trouvé LA technique qui fonctionne contre un ennemi particulier, alors, on n'a plus vraiment de raison pour tenter ou improviser autre chose.
Du coup, je n'ai pas eu l'impression que le titre décollait réellement. En tout cas, je n'ai pas eu à faire de grosses surprises où à jouer d'une autre façon car l'œuvre me mettait face à une impasse.
Bien sûr, d'autres coquilles se sont glissés à l'intérieur du titre. Par exemple, immersive-sim oblige, on a droit à un mini-jeu de piratage répétitif qui deviendra rapidement chiant (coucou BioShock). Aussi, je ne suis clairement pas fan du fonctionnement de l'inventaire à la Resident Evil 4 : à la fois trop contraignant pour le joueur, mais aussi trop permissif pour être considéré comme réaliste ; pour un jeu dans lequel les niveaux sont remplis d'objets à ramasser, ce n'était peut-être pas le choix le plus judicieux que d'instaurer un inventaire de ce type.
L'autre gros défaut du jeu serait en fait son dernier quart, ce moment où la station est envahi par des machines contrôlées par un mercenaire nommé Dahl. Le problème de ce passage est évident : en limitant son bestiaire à un seul type d'ennemi bien précis, le titre gagne considérablement en répétitivité. Le pire dans tout ça, c'est que les développeurs avaient pleinement pris conscience du problème, mais faute de temps, ils n'ont pas pu totalement réarranger cette partie-là.


Côté technique, Prey étant un jeu Bethesda, on pouvait s'attendre à ce qu'il soit optimisé avec le cul... et bien, de manière extrêmement surprenante, il ne l'est pas. Étant un gueux possédant encore un i5 et une GTX 970, j'ai été surpris de voir que le jeu tournait en ultra 60 fps sans trop de difficultés. J'ai tout de même eu droit à quelques bogues, notamment deux bogues liés à des scriptes qui ne se lancent pas et qui m'ont obligés à recharger ma dernière sauvegarde. Les bogues que j'ai rencontrés en grande quantité sont cependant les bogues de collisions : les mimics ont la fâcheuse tendance à traverser le sol quand on les élimine (nous faisant perdre quelques ressources) et le pouvoir de transformation pouvant nous bloquer dans un mur. M'enfin, concernant ce dernier point, c'est un peu le problème de 99 % des jeux vidéo quand on joue avec leur moteur physique.


Dans l'ensemble, Prey n'est donc pas dénué de défauts. Pourtant, je ne peux qu'être admiratif du travail effectué sur le titre. Sur son nombre de détails ahurissants, sur sa complexité et sur sa profondeur. Sur ce plan-là, c'est peut-être même le meilleur triple A auquel j'ai pu jouer de toute ma vie. C'est donc pour cela qu'il vous faut impérativement y jouer.
Gloire à Arkane mes amis !

MacCAM
9
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Créée

le 25 avr. 2022

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MacCAM

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