Avant de parler du jeu, il faut parler de l’exploit de son existence!

Plus de 30 ans après Monkey Island 2: LeChuck’s Revenge, Ron Gilbert revient aux commandes non seulement de sa propre saga après d’autres jeux dirigés par de tierces personnes (qui vont de très moyen à très bon) mais aussi de l’un des univers les plus cultes du jeu vidéo et du plus grand pilier du jeu d’aventure. Véritable révolution dans la narration de jeu vidéo. Même si la légende raconte qu’il aurait officieusement participé au développement de l’opus épisodique de Telltalle Games avec son compère Dave Grossman (qu’il retrouve ici). Il a apparemment trouvé un accord convenable avec Disney après plusieurs années a se débattre pour les droits.

Et ce pour probablement le meilleur point and click depuis The Devil’s Playhouse et peut-être même le meilleur jeu de son créateur.


Je passerai sur les menaces de mort que l’équipe a reçu à cause de la direction artistique du jeu (probablement de gens qui n’y connaissent absolument rien en plus) car tout simplement le monde de Guybrush n’a jamais été aussi beau à parcourir. Rex Crowle (dont j’adore absolument le travail) a encore fourni un travail visuel dantesque, chaque environnement est un pur bonheur. Il joue avec les formes, il fragmente le corps humain, il malméne les architectures, il nous surprend constamment avec sa radicalité. Alors certes il a un style viscéral et jusqu’au-boutiste donc en un sens je peux comprendre ces réactions épidermiques, mais au bout d’un moment quand on y connaît rien en dessin, on se la ferme!


Mais bref,

Déjà le placement chronologique du jeu est étrange, Gilbert considère canon les jeux sur lequels il n’a pas donné sa vision, mais il fait commencer son jeu juste à la fin du dernier jeu sur lequel il a été tête pensante.


Mais le truc, c’est qu’il a tout compris. L’intro est un chef-d’œuvre à elle toute seule, on nous met dans la peau d’un enfant, ivre d’aventure, une sensation qui depuis le début est au cœur de Monkey Island, l’insouciance de se retrouver dans un parc d’attraction gigantesque, où le simple fait de se procurer des hot-dog devient une quête épique. Il va d’ailleurs s’en servir de tuto assez habilement, pas trop lourd pour les fans du genre et suffisamment compréhensible pour les néophytes. Les connaisseurs se diront que l’on joue Guybrush directement après la fin de Monkey Island 2, qu’on est sous le sortilège de LeChuck. Sauf que non, au détour d’un banc, on croise Guybrush, il a vieilli, et on s’assoit à côté de lui, tranquillement.

Nous étions dans la peau de son fils, et notre père va nous raconter son ultime histoire.


Celle où il a trouvé le fameux secret de Monkey Island, celui qui hante les fans depuis 30 ans !


Donc dès que le chapitre 1 commence, on est comme à la maison, l’île de mélée, l’ambiance est là, la musique aussi. On se rend vite compte que le jeu a été pensé comme beaucoup plus simple que ses aînés, pas de cassage de crâne sur une énigme un peu retor, on est là pour être promené sans accrocs. Et au pire si on est vraiment nul il y a un système d’indices.

Sinon une bonne entrée en matière pour le genre.


Et du coup on commence à bien se marrer (le coup de la serpillière sérieux) et on voit bien que l’inventivité comique n’a pas disparu. Quand on arrive devant la nouvelle génération de pirates et qu’ils se foutent de notre gueule, c’est juste super réussi, ça fait mouche. Parce qu’au final Guybrush a toujours été une baltringue finie et que se remémorer la nature même du personnage qu’on incarne c’est super touchant et super drôle 30 ans après !


J’ai adoré tout le chapitre 2 dans l’équipage de LeChuck, déjà la situation de base est cocasse, mais les membres de l’équipage sont vraiment cool. Flambé le démon à l’accent français qui en branle pas une est un de mes nouveaux chouchous.


Le chapitre 4 est sans doute le plus dense mais pas forcément mon préféré (je déteste en général les environnements de glace du coup tout ce passage m’a un peu refroidi lol)


Globalement les énigmes sont toutes sympa et ya même quelques petites idées originale (je pense notamment au formulaire de douane). À part peut-être la finale qui est un peu poussive pour rien.


Le jeu fini encore une fois dans le parc d’attraction, tenu par Stan ce que j’ai trouvé assez malin! Mais il ne pouvait pas y avoir d’autres fins, c’est ce que Ron Gilbert essaye de nous dire depuis Monkey Island 2.

Le secret est au final qu’un prétexte, et ce depuis plus de 30 ans.

Le plus important, c’était l’aventure.

La mise en abyme initiale est folle, le paternel raconte à son fils son ultime aventure.

Ron Gilbert raconte au joueur la sienne.

Et pour les 2 publics, que ce soit le voyage ou l’arrivée, ce n’est pas ce à quoi ils s’attendaient.


Ce regard final rêveur de Guybrush, posé sur son banc, il est devenu papa, il a vieilli, mais il pense toujours à cette période de liberté et d’insouciance avec tendresse. On est obligé de penser à son créateur qui 30 ans après reviens sur sa propre carrière. Quelle émotion.


Au final, Ron Gilbert livre peut-être la fin la plus mélancolique que j’ai vu dans un jeu.


SubwaySam
9
Écrit par

Cet utilisateur l'a également ajouté à ses listes Les meilleurs jeux point'n'click et Les meilleurs jeux vidéo de 2022

Créée

le 22 sept. 2022

Critique lue 457 fois

17 j'aime

2 commentaires

SubwaySam

Écrit par

Critique lue 457 fois

17
2

D'autres avis sur Return to Monkey Island

Return to Monkey Island
docteur_match
8

Critique de Return to Monkey Island par docteur_match

Monkey Island... Voilà un nom qui parle au cœur de tout aventurier d'un certain âge ! J'ai découvert le jeu sur Atari ST en son temps, et si je ne lui dois pas mon amour immodéré et définitif pour le...

le 27 sept. 2022

6 j'aime

Return to Monkey Island
Nival
4

"Tu as vu, c'est comme dans les anciens !"

J'étais plutôt sceptique à voir Ron Gilbert ressusciter avec son comparse Dave Grossman cette série mythique, a fortiori vu ce qu'elle était devenue passés les deux opus originaux (et peut-être aussi...

le 2 déc. 2022

3 j'aime

6

Du même critique

Return to Monkey Island
SubwaySam
9

Melancholia

Avant de parler du jeu, il faut parler de l’exploit de son existence! Plus de 30 ans après Monkey Island 2: LeChuck’s Revenge, Ron Gilbert revient aux commandes non seulement de sa propre saga après...

le 22 sept. 2022

17 j'aime

2

Wendell et Wild
SubwaySam
7

La meilleure calvitie du Cinéma.

13 ans après Coraline et s’être fait honteusement couper les fonds par le diable Disney en personne (je vous invite d’ailleurs à regarder l’extrait de The Shadow King sur Youtube pour se rendre...

le 28 oct. 2022

16 j'aime