Remaster décevant mais retard rattrapé

Encore un monument du jeu vidéo que je découvre sur cette génération grâce à un remaster ou plutôt portage HD ici... En effet le remaster se contente du strict minimum : lissage HD avec quelques effets de lumières timidement améliorés, une caméra supplémentaire sur le joystick droit, la possibilité de sauvegarder quand on veut et... je crois que c'est tout. Ah si quand même la traduction française du premier Shenmue. Mais même pas une retouche du gameplay pour assouplir les déplacements. Paresseux mais bon, à 35e les deux jeux, fallait pas s'attendre à un miracle. Réjouissons nous de pouvoir jouer à ces raretés sur nos consoles actuelles !

SHENMUE 1 :
Même s'il a vieilli sur quelques aspects, il est facile de s'imaginer le choc qu'il a pu représenter à sa sortie : Shenmue est un monde ouvert ambitieux, avant-gardiste pour son temps, techniquement et artistiquement.
Première chose qui frappe aujourd'hui, c'est l'interaction avec l'environnement et la gestion du monde ouvert, étonnamment similaire à ce qui se fait aujourd'hui dans ses mécaniques de jeu. Ça ne paraît pas comme ça, mais en contextualisant le jeu, c'est assez fou. Les pnj n'avaient jamais été aussi cohérents et réalistes jusqu'alors, chacun ayant un parcours de vie tracé et certains ayant une personnalité bien définie. Le souci du détail fait plaisir à voir. Sans compter le temps qui passe, et surtout, se ressent. C'est d'ailleurs une bonne idée que de laisser le temps couler même lors des petites cinématiques ou des interactions avec l'environnement, cela renforce l'immersion. Malheureusement, même si le jeu propose quelques activités pour passer le temps entre deux moments clés, attendre tel ou tel rendez-vous devient vite pénible et il est impossible d'avancer le temps, un confort de jeu qui manque beaucoup.
Au niveau de la jouabilité, oui, ça a vieilli, Ryo est lourd à diriger et demandera un petit temps d'adaptation. Le système de combat, emprunté à virtua fighter, n'a plus la saveur d'antan et la caméra ne lui rend pas justice souvent... Quelques plaisantes sensations peuvent survenir si l'on s'entraîne un tant soit peu. Les QTE, les fameux, et bien contre toute attente je les ai trouvé plutôt bienvenus et bien trouvés, notamment lors de certains mini-jeux ou quelques cinématiques bien senties.
Encore aujourd'hui, je me suis surpris de l'immersion qu'arrive à développer ce petit coin de japon vidéoludique 20 ans après sa sortie. On est très vite embarqué par cette histoire de vengeance simple mais prenante dont le caractère impassible du héros fait accepter plus facilement le côté "japoniaisant" du jeu par rare moments. Et surtout, jouer son détective dans les rues en questionnant les gens autour de nous, ça fait encore son effet et l'on se prend volontiers au jeu tant l'univers sait se montrer attachant grâce à son ambiance et ses personnages. Il est vrai que la deuxième partie du jeu, lorsqu'on travaille, montre une baisse de régime par des redondances qui cassent le rythme et cela même à sa sortie mais Shenmue reste encore aujourd'hui un grand jeu au charme presque intemporel. Culte.

SHENMUE 2 :
Le même en mieux. Ou pas tout à fait. La première partie a su me combler d'entrée et me rassurer sur le fait que le jeu allait mettre les bouchées double : (je fais une liste ça ira plus vite)
- Ryo est plus agréable à contrôler
- Les QTE sont encore mieux pensés
- La map totale du jeu doit bien faire facilement le triple du premier
- Possibilité d'accélerer le temps à quelques moments
- Plus confortable dans ses mécaniques et son interface
- Les combats sont plus fluides et nerveux
- La mise en scène toujours aussi plaisante
- Le mystère qui plane toujours
- Plus d'activités, plus de rencontres (des personnages vraiment réussis)
- Beaucoup plus long
- Un rythme plus soutenu

Bref on ressent clairement l'ambition d'un grand jeu, ce qu'il est. MAIS une fois sorti de Hong Kong pour arriver à Kwool, le jeu va perdre un peu de sa splendeur, déjà rien que par le décor proposé, grisâtre et moins inspiré. C'est sûrement voulu de rendre le lieu hostile mais cette hostilité est juste fade à la longue. Le choix de passer à Kwool après toutes les couleurs et la vie grouillante que propose Hong Kong est une erreur selon moi et ce ne sont pas les nombreux immeubles que l'on va monter et descendre qui vont enthousiasmer les joueurs d'aujourd'hui : c'était peut-être une prouesse technique pour l'époque de proposer autant d'intérieurs et d'étages à parcourir (ils insistent bien là dessus...) mais aujourd'hui cela devient vite épuisant et pénible, tant tout se ressemble.
Heureusement quelques combats mémorables et des phases sympas, notamment accompagné de Ren, viennent casser la répétitivité de cette partie un peu trop longue - le dernier immeuble à gravir, très redondant par exemple - qui abuserait presque du QTE (ces putains de poutre !!!). Bref dommage qu'à trop vouloir en faire, Shenmue 2 se rallonge artificiellement et ennuie par moments le joueur dans sa seconde moitié.
La courte dernière partie, elle aussi, se montre peu convaincante pour aujourd'hui en se transformant en simulation de randonnée sans fulgurances avec des dialogues pas très élevés et qui offre même quelques moments un peu niais. Pourtant c'est à la toute fin que la magie revient, je ne dirai rien mais je plains ceux qui attendent depuis toutes ces années une suite à cette porte ouverte...
Comme le premier, Shenmue 2 a ses lourdeurs (et pas mal mine de rien) tout en rectifiant de nombreux défauts du premier et en améliorant de nombreux points. Moins charmant que le premier mais plus accompli et plus généreux, ce voyage en chine est une digne suite à Shenmue et l 'un des grands jeux de son temps lui aussi. L'un ne va pas sans l'autre finalement. Vivement le 3 ?