Octopattes Cavaleur

Ah, l’araignée ! Quel animal fascinant quand on y pense ! Objet d’adoration pour certains, source de peur panique pour (beaucoup) d’autres (environ 5% de la population mondiale serait arachnophobe, soit tout de même 350-375 millions de personnes!), sa gueule d’amour et sa démarche inquiétante en ont souvent fait le symbole idéal de la menace et de la terreur dans les œuvres fictionnelles, notamment les films, ceux-ci leur conférant des tailles parfois outrancièrement démesurées (Arachnid, Tarantula, Spiders, It…), alors que la réalité est toute autre : seulement 0.5% des espèces sont potentiellement dangereuses pour l’Homme, tandis que 10% de celles-ci (soit une vingtaine d’espèces) présentent des risques mortels…et les plus gros spécimens atteignent difficilement les 30 cm. Paye ton fantasme horrifique ! :p

Pour une fois, l’arachnide sera le "héros" de l’aventure proposée. Enfin, plus ou moins. L’action prend en effet place en 2018 (big up du présent!), dans l’un des laboratoires de recherche de la MicroTech, une multinationale maléfique (pléonasme) spécialisée dans les nanotechnologies. Alors qu’il finalise les derniers préparatifs de son expérience de transfert de l’esprit humain dans le corps de petits êtres vivants moins évolués, le Dr. Michael Kelly voit subitement débarquer deux nettoyeurs engagés par les bigs boss de la firme, ayant pour ordre de récupérer le fruit de ses recherches tout en ne laissant aucun témoin… Réussissant tout de même à activer le transfert vers son sujet d’étude favori, une tarentule "génético-cybernétisée", il assiste impuissant à son propre "assassinat"…

Alors que les meurtriers s’éloignent peu à peu avec ses notes et sa dépouille inerte, spider-Kelly se lance à leur poursuite, bien décidé à récupérer son enveloppe charnelle. Un objectif des plus ardus, sachant que dans la confusion ambiante, de nombreux autres cobayes se sont échappés de leurs geôl…comment ? Quel est donc l’intérêt pour Kelly de chercher à réintégrer un corps visiblement devenu inutilisable ? Ah ça les amis, j’en ai aucune foutue idée, et je pense que le scénariste non plus d’ailleurs… J’ai depuis longtemps abandonné l’espoir d’une représentation "crédible" du scientifique dans la fiction, qui agirait avec intelligence, en vertu du bon sens et non au nom d’idéaux misanthropo-machiavelo-megalomaniaques ou en fonction de ce qu’il a "décidé de croire"… :)

À première vue, faire d’une araignée la star d’un jeu de plateforme n’est pas spécialement logique compte tenu de sa "faible" agilité : elle ne court en effet pas beaucoup, et saute encore moins. Mais comme l’a montré une certaine mascotte piquante usainboltienne, on s’en balek du réalisme dans un jeu du genre, et pis d’abord, c’est une araignée à la fois cybernétisée et génétiquement modifiée ! Elle, elle pourra donc courir et sauter, et faire tous ces trucs cools d’arachnide comme se déplacer sur les murs et le plafond, ou encore se suspendre (et même se balancer) au bout d’un fil de soie ! Pas de projection de fil à la Spidey par contre, mais sa nature cybernétique lui permet de s’équiper de nombreuses armes (en complément de sa lame de base) : mines, lance-flammes, poison, missiles téléguidés, faisceau électrique, boomerang…il y en a pour tous les goûts ! Le must suprême étant de se suspendre au-dessus des ennemis et de les canarder au lance-flammes ou au poison sur 180°. Carnage garanti !

Côté esthétique, les développeurs ont opté pour la fameuse "2,5D", à savoir des environnements tout en 3D, mais arpentables sur un seul et unique plan (comme les Pandemonium!). Les niveaux sont relativements courts mais la moitié disposent de plusieurs sorties, et la difficulté du jeu est globalement plutôt retors (deux points de santé maxi, et pas de checkpoints). À défaut d’être extrêmement diversifiés, les décors s’enchaînent avec cohérence (laboratoire, rue, usine, musée, égouts…) et ne sont pas avares en pièges plus ou moins naturels (et quelques sauts millimétrés) ; le bestiaire quant à lui, puise son inspiration dans toutes les petites bébêtes susceptibles de (nous) nuire : araignées, mouches, guêpes, sauterelles, mantes, rats, chauve-souris, limaces, scorpions…peut-être un chouïa trop dispersés dans les niveaux, mais souvent loin d’être stupides. L’environnement sonore enfin, est d’excellente facture, composé de musiques atmosphériques sobres mais efficaces, et de bruitages crédibles qui participent à créer l’ambiance si particulière qui se dégage du soft…

Allez, si j’avais un seul "grief" à formuler, c’est sur l’ergonomie un brin désuète (mais complètement raccord avec son époque). On contrôle en effet les armes offensives (pattes avant) avec O tout en pouvant les switcher avec R1 quand on en a deux, et les armes défensives (pattes arrière) sur le même principe, avec Carré pour les utiliser et L1 pour les alterner. C’est une jouabilité à laquelle on se fait très vite, mais quand on y réfléchit aujourd’hui, avec des yeux de 2018, on se dit qu’il eût été tellement plus pratique de consacrer les quatre boutons de la tranche aux armes, et ainsi laisser vacants les boutons de façade pour d’autres actions inédites (course rapide, combos de coups…). Ça aurait par exemple évité ces situations ubuesques où l’on est forcé d’utiliser ses armes les plus efficaces durement économisées sur la plus insignifiante des oppositions, là où quelques coups de lame bien placés auraient largement suffit…

En définitive, Spider est l’une de ces nombreuses petites pépites "injustement" méconnues du grand public, qui aurait vraiment mérité plus de visibilité, même si bien sûr son "austérité" graphique tranchant radicalement avec les univers colorés des cadors du genre ne le destinait certainement pas à régner sur le monde de la plateforme. Il suffit pourtant de surfer ici et là sur la toile pour se rendre compte que la plupart des joueurs ayant eu la chance d’être pris dans ses filets en gardent un excellent souvenir. Serez-vous donc sa prochaine proie ?